La Bolivie sous tension après un coup d'État avorté

(AFP)

Le 27 juin 2024

Une tentative avortée de coup d’État militaire a confronté jeudi à La Paz le président bolivien Luis Arce à sa pire crise depuis sa prise de fonction en 2020, dans un contexte déjà incendiaire: un pays étranglé par la hausse des prix et la pénurie de liquidités.

La tempête institutionnelle n'a soufflé que quelques heures mais suffisamment pour laisser apparaître les failles d'un pays en grave déclin économique, plongé dans une bataille de succession au plus haut niveau avec la présidentielle de 2025 en point de mire.

Les motivations du chef de l'armée Juan José Zuniga, qui avait installé des hommes et blindés sur la place Murillo, face au parlement et au palais présidentiel, restent confuses.

Avant son arrestation par la police, puis celle du chef de la Marine Juan Arnez Salvador --les deux hommes étant poursuivis pour "soulèvement armé et terrorisme"--, le général Zuniga avait affirmé vouloir "restructurer la démocratie, d'en faire une véritable démocratie (...) Pas celle de quelques-uns, pas celle de quelques maîtres qui dirigent le pays depuis 30 ou 40 ans".

Il a aussi affirmé devant des journalistes avoir agi sur ordre du chef de l’État qui lui aurait demandé dimanche de "mettre en scène quelque chose pour augmenter sa popularité" au milieu d'une situation "foireuse" du pays, sans donner plus de détails.

Le président Arce, dégradant le général Zuniga et faisant prêter serment mercredi à un nouveau commandement des forces armées, a affirmé au contraire qu'il s'agit d'une "tentative de coup d'État par des militaires qui salissent l'uniforme".

Son ministre du Gouvernement (Intérieur), Eduardo Del Castillo, a fustigé "deux militaires putschistes qui voulaient détruire la démocratie".

- "C'est un ordre" -

Restent des images fortes. Celle d'une porte du palais présidentiel forcée par un blindé et l'entrée dans la cohue du général Zuniga, la sécurisation de la place et des tirs de gaz lacrymogènes par les militaires, et les images de la conversation entre MM. Arce et Zuniga, diffusées par la présidence.

"Je suis ton capitaine (...) ramène toute la police militaire dans leurs casernes (...) retire toutes ces forces maintenant. C'est un ordre général, vous n'allez pas m'écouter ?", réprimande alors le président Arce.

Le général le regarde et lui répond par un "non" catégorique.

Après le retrait des militaires de la place Murillo, le président Arce est apparu au balcon du palais présidentiel saluer la foule venue se masser. "Personne ne peut nous enlever la démocratie que nous avons gagnée", a-t-il scandé.

Plus tard dans la soirée sur X il a dit être prêt à "défendre la démocratie et la volonté du peuple bolivien, quoi qu'il en coûte" et remercié les pays "qui ont condamné et se sont prononcés en faveur de la démocratie bolivienne face à la tentative de coup d'État contre notre gouvernement".

Les condamnations de l'action du général Zuniga ont afflué du Chili, de l’Équateur, du Pérou, du Mexique, de la Colombie, du Brésil, du Venezuela, de l'Espagne qui ont appelé au respect de la démocratie.

Les États-Unis ont dit suivre "de près" la situation et appelé au calme. La Russie a condamné "fermement" la tentative de coup d’État et la France a appelé "au respect de l'ordre constitutionnel".

- Crise économique et querelles politiques -

Jamais en plus de 20 années d'alternance démocratique, une tentative de coup d'État militaire n'avait secoué la Bolivie.

Cet épisode survient dans un contexte de fortes turbulences économiques, d'une flambée des prix et d'une rareté de dollars provoquant la colère des commerçants en tous genres, alors qu'une pénurie de carburant étire les files d’attente devant les stations-service.

M. Arce en a fait référence en appelant "les Boliviens à travailler pour faire avancer le pays" plutôt que des soulèvements qui "nuisent à l'image de la démocratie bolivienne au niveau international et génèrent une incertitude inutile".

En toile de fond se trouve également le conflit entre M. Arce et son mentor politique, l'ancien président Evo Morales (2006-2019), tous deux désireux de se présenter au nom du parti au pouvoir, le Mouvement vers le socialisme (MAS), à la présidentielle de 2025.

Le général Zuniga avait exprimé sa ferme opposition à un éventuel retour au pouvoir de M. Morales, premier président d'origine indigène en Amérique latine qui bénéficie d'un fort soutien dans tout le pays mais qui selon une décision de la Cour constitutionnelle ne peut pas concourir.

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Le 27 juin 2024

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