Après plusieurs mois de croissance à deux chiffres, l’activité touristique dans les principales destinations estivales du Maroc semble marquer le pas en juillet. Visiblement déçus du ralentissement de l'activité touristique dans leur région respective, les dirigeants des plus importants CRT du Royaume s’inquiètent de son éventuel impact négatif sur la saison estivale, alors que la ministre de tutelle se veut rassurante en tablant sur un rebond en août.

"Un retard à l’allumage dans la région TTAH" (Rkia Alaoui)

Sollicitée par Médias24 pour connaître le niveau de fréquentation en juillet de la région Tanger-Tétouan-Al Hoceïma (TTAH) dont elle préside le CRT, Rkia Alaoui estime que trois semaines ne suffisent pas pour faire un bilan de son activité estivale tout en reconnaissant que le démarrage de la saison a connu un retard à l’allumage.

"Cela s’explique par le décalage de huit à dix jours des dates de cours qui se terminaient le 15 juin l’année dernière et qui recommençaient à la fin du mois de septembre", déclare la présidente en précisant qu’il y a toujours des concours et que les élèves de la mission française n'ont terminé leur scolarité que vers le 5 juillet.

Et d’ajouter que les fausses rumeurs relatives à une hausse des tarifs hôteliers, véhiculées sur les réseaux sociaux, ont contribué à une certaine désaffection du marché des touristes nationaux et des MRE qui est essentiel pour sa région.

Rkia Alaoui observe toutefois que, depuis quelques jours, le rythme des réservations s'accélère et pense par conséquent que la reprise sera au rendez-vous en août.

"L'autre raison est que, pendant la fête de l’Aïd du 17 juin dernier, notre région a connu un énorme flux de visiteurs marocains inattendus qui avaient réservé un long week-end de quatre jours", rappelle la présidente en ajoutant que certains ont déjà dépensé une grande partie de leur budget voyage.

Selon elle, le mois de juillet a démarré laborieusement par rapport à celui de 2023 à cause des examens, mais le rush actuel des réservations de dernière minute laisse présager un mois d’août bien meilleur que l'année dernière.

En conclusion, la directrice générale de l’Hôtel Marina Smir affirme que son établissement a déjà rattrapé le retard enregistré en juillet avec un taux d'occupation qui devrait être bien plus important en août.

"Un pic de fréquentation attendu en août dans la région Agadir-Souss-Massa" (Salaheddine Benhammane)

En attendant la publication des chiffres officiels des arrivées de juillet, le président du CRT Agadir-Souss-Massa préfère temporiser sur le niveau de fréquentation du mois en cours, en soulignant que 40% à 50% de la clientèle de cette période était constituée de nationaux.

Devant notre insistance, Salaheddine Benhammane déclare que sa région a connu une affluence importante durant cette période et que, jusqu'au mois de juin, la croissance était à deux chiffres.

Tout aussi optimiste que la présidente du CRT de TTAH, notre interlocuteur s’attend à un pic de fréquentation à partir de début août qui constitue la très haute saison de sa région.

"S’il est vrai qu’il y a eu de légères fluctuations dues à certains événements sportifs, il n’y a pas lieu de s'inquiéter", conclut Salaheddine Benhammane pour qui la croissance à deux chiffres des arrivées, enregistrée depuis janvier 2024, devrait se poursuivre tout au long de l'année.

"Des clubs bondés qui contrastent avec la désaffection des hôtels classés" (Abdellatif Abouricha)

Citant la forte fréquentation nocturne de la place Jamaâ El Fna comme un indicateur fiable du niveau d'affluence touristique dans la ville ocre, le chargé de communication du CRT de Marrakech-Safi-Essaouira, Abdellatif Abouricha attend aussi les statistiques de l’Observatoire national du tourisme avant d’être en mesure de se prononcer sur le bilan "moyen" de juillet.

"Il y a une baisse de fréquentation des établissements de luxe, mais les 17 clubs de la ville ocre affichent un taux d’occupation compris entre 70% et 90%", révèle Abouricha.

Ce dernier indique toutefois que la situation des hôtels classés devrait s’améliorer avec la vague de départs en vacances qui démarre en France et dans les principaux marchés émetteurs européens.

Qualifiant le mois de juillet de période intermédiaire, le chargé de communication avance que la hausse du nombre des vols hebdomadaires, passé de 430 en 2023 à 580 en 2024, devrait permettre de corriger en août prochain la baisse des arrivées dans les 276 hôtels classés et les 1.575 maisons d'hôtes

Et de conclure que la destination de Marrakech aurait besoin d'être desservie par au moins 930 vols par semaine pour maximiser le taux d’occupation hôtelière des 85.000 lits disponibles.

"Un début de saison catastrophique dans l’Oriental" (Youssef Zaki)

Visiblement déçu par le bilan de sa région durant le mois de juin et les trois premières semaines de juillet, le président du CRT de l’Oriental estime que le début de la saison estivale a été très difficile, voire "catastrophique" pour l'ensemble des hôtels de la région.

"Malgré d'indéniables progrès en matière d’animation et d'infrastructures touristiques, nous attendons avec impatience l'arrivée des MRE qui dynamisent notre économie pendant le seul mois d’août, car nous traversons une vraie crise des arrivées depuis plusieurs mois, ", résume Youssef Zaki pour qui la région de l’Oriental n’a pas encore atteint une maturité suffisante en termes d’arrivées.

Selon lui, la dépendance de cette destination envers la diaspora marocaine révèle une fragilité structurelle. Une stratégie de diversification du produit est nécessaire pour stabiliser l’économie régionale en attirant des visiteurs nationaux et étrangers tout au long de l'année.

Tout en dénonçant la propagation de fausses nouvelles sur une hausse des tarifs hôteliers, ayant dissuadé de nombreux visiteurs, le président reconnaît "une évolution timide des réservations" depuis le 20 juillet, qui ne sera cependant pas suffisante pour rattraper le retard accumulé.

 "Un rebond en cours depuis quelques jours (Fatim-Zahra Ammor)

Sollicitée après avoir recueilli la lecture des dirigeants des principaux CRT du Maroc, la ministre de tutelle nous confirme le ralentissement d’activité des trois premières semaines du mois de juillet.

Selon Fatim-Zahra Ammor, cette situation s'explique par des facteurs conjoncturels liés au retard des dates d'examen (baccalauréat…), ⁠à l’affluence des touristes européens et américains à des événements sportifs (Coupe d’Europe et Copa America) et à la tenue des élections en France qui est le 1^er marché de la destination Maroc.

"Je me dois de préciser que ces deux dernières raisons ont également impacté de manière significative le tourisme sur la Côte d’Azur française, et que les dépenses des célébrations de Aïd al-Adha juste avant l’été ont poussé de nombreux vacanciers à reporter la date de leurs vacances", estime la ministre qui se veut toutefois optimiste pour une forte reprise durant le mois d’août qui permettra de corriger la baisse d'activité de juillet.

Et de conclure que les réservations s’accélèrent depuis quelques jours et que les prévisions du taux d’occupation à fin juillet seront supérieures à 2023, que ce soit dans le Nord ou à Agadir et Taghazout.