Ce qui va changer dans la réglementation marocaine de l'industrie cinématographique
Ayant pris du retard, le projet de réforme de l'industrie cinématographique commence enfin à se dessiner. Agréments de production, institution d'un "Label Studio", création d'un registre national du cinéma et réforme du Centre cinématographique marocain... Voici ce qui va changer dans la réglementation marocaine de l'industrie cinématographique.
Ce qui va changer dans la réglementation marocaine de l'industrie cinématographique
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Basma Khirchi
Le 11 juillet 2024 à 16h25
Modifié 11 juillet 2024 à 17h16Ayant pris du retard, le projet de réforme de l'industrie cinématographique commence enfin à se dessiner. Agréments de production, institution d'un "Label Studio", création d'un registre national du cinéma et réforme du Centre cinématographique marocain... Voici ce qui va changer dans la réglementation marocaine de l'industrie cinématographique.
Réuni le 12 juin dernier, le Conseil de gouvernement a approuvé le projet de loi n°18.23 relatif à l’industrie cinématographique et portant réorganisation du Centre cinématographique marocain (CCM). Une présentation a été consacrée à ce texte lors de la réunion de la Commission de l’enseignement, de la culture et de la communication à la Chambre des représentants, tenue le mardi 9 juillet.
Ce nouveau projet de loi vient combler les lacunes de la loi en cours, notamment la loi n° 20.99. Adoptée il y a plus de vingt ans, cette dernière ne reflète plus les avancées du secteur cinématographique à tous les niveaux, notamment sur le plan technologique.
Une fois le nouveau projet de loi adopté officiellement, le lancement d'un appel à candidatures pour le poste de directeur général du CCM sera automatiquement engagé. Les évolutions dans les mécanismes de gouvernance régissant l'industrie cinématographique, notamment celles concernant le CCM, ont en effet conduit à envisager la révision de la loi n° 70.17 pour réorganiser le CCM afin de lui permettre de suivre les développements actuels du secteur.
Les nouveautés du projet de loi concernant l'industrie cinématographique
Le projet de loi n° 18.23 prévoit plusieurs nouveautés concernant l'industrie cinématographique.
D'abord, au niveau de la délivrance des licences relatives aux activités de l'industrie cinématographique. Les conditions de délivrance, de suspension et de retrait des licences relatives aux activités de l'industrie cinématographique ont été unifiées, avec des délais précis de décision fixés par le CCM. Il s'agit notamment des licences suivantes :
- licence d'exercice de l'activité de production cinématographique ;
- licence de tournage d'un film cinématographique ou d'une œuvre audiovisuelle ;
- licence de détermination des lieux de tournage d'un film cinématographique ou d'une œuvre audiovisuelle ;
- licence de distribution d'un film cinématographique ;
- licence d'importation ou d'exportation d'un film cinématographique à des fins commerciales ;
- licence d'exploitation d'une salle de cinéma.
Le CCM délivre ces licences dans les délais stipulés par la législation relative à la simplification des procédures et formalités administratives, et les textes pris pour son application. Les décisions négatives émanant du CCM concernant les décisions administratives doivent être motivées et notifiées à l'intéressé, conformément à la législation en vigueur.
Les demandes de licences sont déposées selon les modalités fixées par un texte réglementaire. La création sous forme de société anonyme ou de société à responsabilité limitée est requise pour obtenir une licence d'exercice de l'activité de production cinématographique et de distribution de films cinématographiques. Quant à la licence d'exploitation d'une salle de cinéma, il est stipulé que la création doit se faire sous forme de société selon la loi marocaine ou d'association.
Il est également stipulé qu'il est impossible de gérer ou de diriger plus d'une société de production à la fois, ainsi que de gérer ou de diriger plus d'une société de distribution simultanément. De plus, une société de distribution de films cinématographiques ne peut exploiter une ou plusieurs salles de cinéma ni posséder des actions ou des parts dans le capital d'une société exploitant une salle de cinéma.
Agréments nationaux et internationaux de production
Deux types d'agréments ont été créés pour les sociétés de production souhaitant réaliser des productions cinématographiques, avec des conditions définies pour leur attribution, suspension et retrait, ainsi que des délais de décision fixés par le CCM.
Il s'agit notamment des agréments nationaux pour la production au compte de personnes physiques marocaines ou résidentes au Maroc, ou de personnes morales soumises au droit marocain et des agréments internationaux pour la production au compte de personnes physiques étrangères non résidentes au Maroc ou de personnes morales non soumises au droit marocain, d'une durée de 5 ans renouvelable selon les conditions et modalités fixées.
L'agrément national est délivré aux sociétés de production remplissant les conditions suivantes :
- un capital social d'au moins 500.000 DH pour les sociétés anonymes, ou 300.000 DH pour les sociétés à responsabilité limitée, entièrement libéré ;
- avoir produit au moins un long métrage cinématographique, ou deux longs métrages cinématographiques coproduits à hauteur de 50% du coût total de chaque film, ou trois courts métrages cinématographiques, tournés au Maroc et réalisés par des réalisateurs marocains différents, dont au moins une réalisatrice. Les films produits doivent respecter les normes définies par un texte réglementaire.
L'agrément international est pour sa part délivré aux sociétés de production qui remplissent les conditions suivantes :
- avoir obtenu l'agrément national depuis au moins trois ans ;
- avoir réalisé, au cours des trois années précédant la date de dépôt de la demande d'agrément international, la production d'un long métrage cinématographique, ou deux longs métrages cinématographiques coproduits à hauteur d'au moins 50% du coût total de chaque film, ou trois courts métrages cinématographiques, tournés au Maroc et réalisés par des réalisateurs marocains différents, dont au moins une réalisatrice. Les films produits doivent respecter les normes définies par un texte réglementaire.
Institution de deux types de licences de tournage
Deux types de licences de tournage ont été également instituées et sont délivrées par le CCM, à savoir la licence de tournage de films cinématographiques ou d'œuvres audiovisuelles et la licence de détermination des lieux de tournage de films cinématographiques ou d'œuvres audiovisuelles. La liste des œuvres audiovisuelles soumises à ces deux licences est déterminée par un texte réglementaire.
Il est également prévu que le CCM puisse accompagner, à leur demande, les sociétés de production ayant obtenu une licence de tournage, dans l'obtention des autres autorisations nécessaires pour accéder aux lieux de tournage concernés. Il est en outre stipulé que le titulaire d'une licence de tournage doit respecter le scénario conforme aux constantes du Royaume, à l'ordre public et aux bonnes mœurs, sans apporter de modification substantielle.
Pour les universités, institutions et instituts de formation dans le domaine des métiers du cinéma et de l'audiovisuel, il est exigé de déclarer préalablement au CCM tout tournage de film cinématographique ou d'œuvre audiovisuelle dans le cadre des activités des étudiants qui y poursuivent leurs études. Les tournages réalisés par des amateurs, destinés à un usage personnel et non commercial, ne sont pas soumis à la licence de tournage.
Bientôt une commission de visionnage des films cinématographiques
Il est prévu de créer une commission auprès du CCM appelée "Commission de visionnage des films cinématographiques". Cette commission est chargée de vérifier la conformité des films cinématographiques aux constantes du Royaume, à l'ordre public et aux bonnes mœurs. Elle donne son avis conforme sur l'octroi du visa d'exploitation commerciale des films cinématographiques et du visa culturel, en déterminant les tranches d'âge autorisées à voir le film.
La commission de visionnage, présidée par le directeur du CCM ou par la personne déléguée par lui à cet effet, se compose des membres suivants : des représentants de l'administration, un représentant du CCM, des personnalités reconnues pour leur compétence et leur expérience dans le domaine de l'industrie cinématographique ou, le cas échéant, dans tout autre domaine connexe, dont le nombre et les modalités de nomination sont fixés par un texte réglementaire.
Les modalités de fonctionnement de la commission de visionnage sont définies par un texte réglementaire.
Visa d'exploitation commercial et visa culturel
L'exploitation commerciale de chaque film cinématographique est subordonnée à l'obtention d'un visa délivré par le CCM, après avis conforme de la Commission de visionnage. La demande de visa d'exploitation commerciale du film cinématographique est déposée auprès du CCM selon les modalités fixées par un texte réglementaire.
Ce dernier ne peut délivrer un visa d'exploitation commerciale pour un film cinématographique comportant un contenu contraire aux constantes du Royaume, à l'ordre public ou aux bonnes mœurs. Il ne peut le délivrer qu'après que la société de distribution de films cinématographiques ait supprimé la ou les scènes concernées. Le visa d'exploitation commerciale du film cinématographique indique, le cas échéant, la ou les scènes à supprimer lors de la projection ainsi que les tranches d'âge autorisées à voir le film.
Par ailleurs, la projection de tout film cinématographique dans le cadre d'un festival, d'une manifestation cinématographique ou d'une activité culturelle est soumise à un visa appelé "visa culturel", délivré par le CCM après avis conforme de la Commission de visionnage.
Le visa culturel est valable exclusivement pour la projection du film cinématographique dans le cadre du festival, de la manifestation cinématographique ou de l'activité culturelle. Le visa culturel est délivré à l'organisateur du festival, de la manifestation cinématographique ou de l'activité culturelle selon les mêmes conditions applicables au visa d'exploitation commerciale.
L'organisation de la première édition de tout festival ou manifestation cinématographique est soumise à une déclaration préalable déposée auprès du CCM, sans préjudice de la législation en vigueur.
Exploitation des salles de cinéma et programmation des films marocains
Les salles de cinéma sont classées selon des critères de qualité des équipements techniques, du nombre d'écrans dédiés à la projection, des moyens de confort et d'accueil, conformément aux modalités définies par un texte réglementaire.
Le permis d'exploitation d'une salle de cinéma précise la classification de la salle. L'exploitation commerciale de tout film cinématographique fait l'objet d'un contrat conclu entre la société de distribution de films cinématographiques et l'exploitant de la salle de cinéma.
Les salles de cinéma font l'objet de contrôles périodiques, et chaque fois que cela est nécessaire, effectués par les agents du Centre cinématographique marocain. Ces contrôles visent à vérifier le respect par l'exploitant de la salle de cinéma des conditions et critères d'exploitation définis. Le permis d'exploitation d'une salle de cinéma est retiré si elle n'est pas exploitée dans un délai d'un an à compter de sa délivrance.
Quant à la programmation des films marocains, chaque exploitant de salle de cinéma doit programmer la diffusion des films marocains selon les conditions suivantes :
- au moins trois projections par an, pour une durée d'au moins une semaine par film, pour les salles de cinéma équipées d'un seul écran ;
- au moins quatre projections par an, pour une durée d'au moins une semaine par film, pour les salles de cinéma équipées de deux écrans ;
- au moins cinq projections par an, pour une durée d'au moins deux semaines par film, pour les salles de cinéma équipées de trois à cinq écrans ;
- un écran spécifique pour la diffusion des films marocains, pour les salles de cinéma équipées de plus de cinq écrans.
Chaque exploitant de salle de cinéma doit vendre les billets d'accès à la salle à travers un système informatique qui inclut, notamment, les informations relatives au nombre de billets et leur prix par film cinématographique programmé. Ce système doit pouvoir être intégré au système d'information géré par le CCM à cet effet.
Soulignons qu'il n'est pas permis d'exploiter commercialement un film cinématographique en dehors des salles de cinéma, quelle que soit sa forme de diffusion, avant l'expiration d'une période de six mois à partir de sa première diffusion en salles de cinéma, ou après trois mois à partir de sa dernière diffusion dans lesdites salles. Le CCM peut toutefois réduire exceptionnellement cette période conformément aux conditions spécifiées dans la réglementation, sur demande du détenteur des droits d'exploitation commerciale du film, à moins que le contrat en cours pour le film ne stipule le contraire.
Un "Label Studio" et un registre national du cinéma
Pour ce qui est des activités professionnelles liées à l'industrie cinématographique, le nouveau projet de loi prévoit que toute entreprise désirant exercer une activité parmi les activités professionnelles liées à l'industrie cinématographique doit déposer une autorisation préalable auprès du CCM.
Un label d'excellence appelé "Label Studio" a été aussi institué. Il est délivré par le CCM aux professionnels exerçant des activités liées à l'industrie cinématographique, conformément aux normes et critères définis dans un texte réglementaire.
Au sujet des techniciens et stagiaires, les exploitants de salles de cinéma ainsi que les sociétés de production sont tenus, lors de la production de chaque film cinématographique ou de la réalisation de chaque œuvre audiovisuelle, d'employer des techniciens marocains titulaires d'une carte professionnelle cinématographique, ainsi que de recourir à des stagiaires marocains. La proportion des techniciens et stagiaires marocains et leurs domaines de spécialisation sont déterminés par un texte réglementaire.
Les conditions fixées pour l'obtention de la carte professionnelle cinématographique sont : posséder un diplôme délivré par une université ou une institution, ou un certificat de formation dans le domaine des métiers du cinéma ou de l'audiovisuel et avoir une expérience professionnelle dans l'une des catégories des activités professionnelles liées à l'industrie cinématographique.
Le CCM délivre la carte professionnelle cinématographique à toute personne remplissant ces deux conditions, après avis d'une commission consultative dont la composition et le fonctionnement sont définis par un texte réglementaire. De manière exceptionnelle, le CCM peut délivrer la carte professionnelle cinématographique à toute personne ne remplissant pas ces conditions, si elle apporte la preuve de sa participation à des films cinématographiques ou à des œuvres audiovisuelles.
Il a été également décidé de créer un registre national du cinéma, confié à la gestion du CCM, dans lequel sont enregistrées toutes les données relatives à l'industrie cinématographique. Le registre national enregistre également les contrats conclus par les sociétés de production avec les scénaristes et les réalisateurs de films cinématographiques. Les modalités d'enregistrement des contrats dans le registre national sont définies par un texte réglementaire, et leur certification est effectuée selon les besoins.
Le CCM gère le registre national dans le cadre du respect de la législation en vigueur, particulièrement en ce qui concerne la protection des personnes physiques concernant le traitement des données à caractère personnel et les mesures prises pour sa mise en œuvre.
Les nouveautés du projet de loi concernant le CCM
Le CCM reste une institution publique, réorganisée en vertu de la loi n° 70.17, jouissant de la personnalité morale et de l'indépendance financière, et soumise aux dispositions de cette loi. Le Centre est placé sous la tutelle de l'État, dont l'objectif est de veiller au respect des organes compétents du Centre conformément à cette loi, en leur attribuant les missions qui leur sont dévolues, et en général, de veiller à l'application des textes législatifs et réglementaires relatifs aux institutions publiques. Il est également soumis au contrôle financier de l'État appliqué aux institutions publiques et à d'autres entités selon les dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
Le projet confié au CCM inclut la mise en œuvre de la politique de l'État dans le domaine de l'industrie cinématographique, en lui confiant de nouvelles compétences parmi lesquelles figurent :
- le soutien au secteur de l'industrie cinématographique et proposition de mesures incitatives en faveur des investisseurs dans ce secteur ;
- le soutien à la production de films cinématographiques et encouragement de la production étrangère au Maroc pour les films cinématographiques ou les œuvres audiovisuelles ;
- la contribution à la promotion des ressources naturelles, culturelles, architecturales et infrastructures dont regorge le Royaume du Maroc pour en faire une destination privilégiée pour le tournage de films ou d'œuvres audiovisuelles, en coordination avec les organisations professionnelles et les associations œuvrant dans le secteur cinématographique ;
- le soutien aux festivals et événements cinématographiques, leur organisation, participation et proposition de films pour représenter le Maroc dans les festivals ou événements cinématographiques internationaux ;
- la promotion du marché des films marocains à l'étranger ;
- le soutien à la formation professionnelle et à la formation continue dans le domaine de l'industrie cinématographique ;
- la conservation, préservation et valorisation du patrimoine cinématographique à travers la restauration des archives cinématographiques, leur numérisation et la facilitation de leur accès.
La composition du conseil d'administration du CCM est définie comme suit :
- des représentants de l'administration ;
- des représentants des organisations professionnelles œuvrant dans le domaine de l'industrie cinématographique ;
- trois membres indépendants reconnus pour leur compétence dans les domaines liés aux missions du Centre ;
- le représentant des ressources humaines du Centre, élu parmi eux, dont le mode d'élection est défini dans les statuts des employés du Centre ;
- le président du conseil d'administration peut inviter, à titre consultatif, toute personne physique ou morale qu'il juge utile de convier aux réunions du conseil ;
- la liste des organisations professionnelles, le nombre de leurs représentants et les modalités de leur nomination sont précisées dans le texte réglementaire.
Dispositions diverses, transitoires et finales
Le nouveau projet de loi fixe également les dispositions transitoires et finales.
Les établissements de production, de distribution et les exploitants de salles de cinéma titulaires d'une licence ou d'un permis en vertu des dispositions de la loi n° 20.99 régissant l'industrie cinématographique doivent se conformer aux dispositions de cette loi dans un délai d'un an à compter de sa date d'entrée en vigueur.
Les permis de tournage délivrés conformément aux dispositions de ladite loi n° 20.99 demeurent en vigueur jusqu'à l'expiration de la période de tournage. Les détenteurs de cartes d'identité professionnelle délivrées en vertu des dispositions de ladite loi n° 20.99 doivent se conformer aux dispositions de cette loi dans un délai n'excédant pas cinq ans à compter de sa date d'entrée en vigueur.
Le projet de loi n° 18.23 entre en vigueur 9 mois après sa publication au Bulletin officiel.
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