Comment le Festival Mawazine a ressuscité Oum Kalthoum avec un hologramme, le temps d'une soirée inoubliable

Après s’être produite au théâtre Mohammed V en mars 1968, l’Astre de l’Orient est revenue dimanche 23 juin 2024 sous forme d’hologramme pour un spectacle au même endroit qui a affiché complet. L’occasion d’interroger le fondateur de la société de spectacles New Dimension Production (NDP) qui nous explique les ressorts et les coûts de cet exploit technologique qui devrait se banaliser à l’avenir. Notons que le Festival a programmé une deuxième soirée Oum Kalthoum ce mardi 25 juin 2024.

Comment le Festival Mawazine a ressuscité Oum Kalthoum avec un hologramme, le temps d'une soirée inoubliable

Le 24 juin 2024 à 19h36

Modifié 25 juin 2024 à 7h04

Après s’être produite au théâtre Mohammed V en mars 1968, l’Astre de l’Orient est revenue dimanche 23 juin 2024 sous forme d’hologramme pour un spectacle au même endroit qui a affiché complet. L’occasion d’interroger le fondateur de la société de spectacles New Dimension Production (NDP) qui nous explique les ressorts et les coûts de cet exploit technologique qui devrait se banaliser à l’avenir. Notons que le Festival a programmé une deuxième soirée Oum Kalthoum ce mardi 25 juin 2024.

Dimanche soir 23 juin 2024. Une foule de tous âges se presse au Théâtre National Mohammed V. Dès que l'hologramme de la divine Oum Kalthoum commence à chanter, le public est saisi par la grâce et l'émotion.

Les heureux spectateurs savourent chaque instant et se permettent même l'impensable: chanter de concert avec la star des stars, Es Sett comme on la désignait en Egypte.

L'émotion fut indicible et le public unanime, avait du mal à cacher son émotion.

Entouré d'un orchestre en chair et en os qui ne jouait pas en play-back, l'hologramme d'Oum Kalthoum s'est retourné parfois vers les musiciens, ce qui accentuait la vraisemblance.

Telle dame pleurait en chantant avec la mère de toutes les stars, une autre lui demandait de lui chanter sa chanson préférée; et tout ce beau monde chantait en chœur, dans un spectacle fait de quelques uns des immortels succès, dans une version raccourcie.

Le tout aura duré une heure trente inoubliables. Une éternité.

Tournée mondiale posthume de la célèbre chanteuse égyptienne, développement des spectacles numériques, accueil enthousiaste du public marocain, équipements nécessaires, coût et rentabilité du spectacle, généralisation et avenir de ce type de spectacle, le fondateur et producteur exécutif de la société émiratie NDP Hasan Hani, revient pour Médias24 sur toutes les questions relatives au développement de cette technologie d’avenir.

Hasan Hani

Medias24 : Quelle est la vocation de votre société ?

Hasan Hani: Née en 2006, la société New Dimension Production est spécialisée dans la création de contenu et les spectacles d'hologrammes dont nous avons organisé plus de 40 éditions.

Ainsi, la ville de Rabat est la 44ème destination inscrite à notre agenda et ce n'est pas fini car nous travaillons sur d'autres idées et destinations.

Pour vous donner un exemple, nous allons bientôt commencer à introduire des collaborations entre des artistes du passé et des artistes du présent car nous considérons que cette forme de divertissement n'a pas de limites.

-Quels sont les autres pays où vous avez organisé ce spectacle ?

-C’est une tournée régionale qui a commencé au Moyen-Orient à savoir en Arabie saoudite, aux Émirats arabes unis, en Jordanie, au Caire, au Koweït, en Irak et aujourd’hui au Maroc.

Nous avons également organisé un spectacle similaire en Afrique du Sud, en France, et nous prévoyons de faire une tournée internationale, aux États-Unis et dans plusieurs pays d'Europe.

-Ce show a été fait sur mesure pour Rabat ou c'est le même qu'ailleurs ?

-C'est un spectacle similaire, mais la nouveauté est qu’une chanson supplémentaire a été diffusée à la fin du premier concert numérique de la grande Es Sett (la Dame).

-Quels ont été les premiers retours des spectateurs ?

-Vraiment incroyables. Honnêtement, en tant que société de production, nous avons été surpris et avons beaucoup apprécié le public marocain qui était impliqué dans le spectacle et qui n’est pas venu par hasard ou simple curiosité.

Les spectateurs sont venus parce qu'ils aimaient ou plutôt adorent la musique de cette grande artiste.

De plus, le fait qu’elle se soit déjà produite sur la même scène a eu un impact émotionnel très important et émouvant.

Du coup, nous allons certainement renouveler l'expérience dans d’autres villes du Maroc.

-Certains avancent que ce show est juste une vidéo avec un rétroprojecteur ?

-Il s'agit en réalité d'une illusion d'optique qui vise à créer un effet holographique.

Pour cela, nous avons utilisé un matériau spécial sur scène pour éclairer la projection qui peut se faire sous différents angles en fonction de la morphologie du théâtre.

En effet, techniquement, chaque théâtre a sa propre configuration, mais en général, il s'agit d'un mélange entre un matériau spécial et un certain projecteur utilisé sur scène.

-Cela coûte cher ?

-D'une manière générale, oui mais l'organisation de l'événement n'est pas la partie la plus coûteuse.

Ce qui coûte vraiment cher, c'est de construire le spectacle qui nécessite un budget plus élevé que l'organisation de l'événement.

-Quelle a été la technologie et les équipements utilisés?

-D'une manière générale, la technologie des hologrammes est aujourd'hui considérée comme étant à un stade précoce de développement.

C'est un peu comme lors des débuts de la télévision qui étaient grands et comportaient de gros composants pour accueillir la technologie.

Depuis quatre ans, l'hologramme se développe de plus en plus et ce que nous utilisons actuellement comme outil est le plus proche possible pour créer une véritable illusion holographique.

Mais comme toutes les technologies s'améliorent avec le temps, je pense que dans les prochaines années, nous serons en mesure de créer des spectacles plus immersifs en termes d'hologramme.

Nous allons aussi essayer d'adapter cette technologie aux salles de cinéma mais bientôt, les théâtres seront automatiquement équipés de la technologie nécessaire pour créer ces images holographiques.

-Saviez-vous qu'Oum Kelthoum était à Rabat en mars 1968 ?

-Oui, d’ailleurs l'animateur a annoncé qu'elle s'était produite sur la même scène de ce théâtre.

-Pourquoi ne pas avoir utilisé les images de ses concerts au Maroc ?

-En fait, tout s'est fait à la dernière minute car nous étions surtout préoccupés par la réalisation de toute la partie technique qui requiert un travail important en fonction du lieu.

Sachant que le théâtre Mohammed V est très authentique et ancien, nous nous sommes donc concentrés sur la partie de l’adaptation qui est plus importante que la partie historique.

-Combien coûte un spectacle comme celui-ci ?

-En termes de temps, la création d'un contenu prend entre quatre et cinq mois et coûte en moyenne entre 200.000 et 300.000 dollars pour une artiste comme Oum Kalthoum.

Mais si vous décidez de créer un contenu pour quelqu'un comme Michael Jackson, le budget peut exploser parce que son spectacle, le timing nécessaire et ses exigences sont différentes.

Il est donc très difficile de vous donner un prix moyen pour construire un hologramme qui varie d'un artiste à l'autre.

-Ceci impose probablement des billets d'entrée chers ?

-Oui, parce qu'il faut complètement créer l'artiste décédé alors que dans le cadre d'un événement normal, l'artiste reçoit un cachet fixe pour voyager, venir dans le pays et se produire.

Mais dans le cas d'un hologramme, il faut créer le contenu qui représente cette personne. Et comme lorsque vous voulez créer un documentaire ou un film sur un personnage important, vous devez faire des recherches, vous devez suivre une formation et trouver les bons talents à utiliser.

Ensuite, vous construisez ce contenu à partir de rien qui finit par devenir l'artiste qui va se produire.

Donc, plus vous y consacrez de temps et plus vous soignez les détails, plus cela coûte cher pour se rapprocher de cette personne et de son identité.

Beaucoup de gens utilisent des techniques différentes en faisant appel à un sosie, par exemple. Ils trouvent quelqu'un qui ressemble à l'artiste et l'utilisent pour créer un hologramme.

Mais dans notre cas, nous ne le faisons pas car nous préférons miser sur l'authenticité d’autant plus que la réplique numérique de Oum Kelthoum était accompagnée de 18 vrais musiciens, dont la sommité mondiale le violoniste Mustapha Fahmi, qui jouaient comme si elle était présente.

Lorsque je veux créer une personne décédée, je dois créer son identité, sa personnalité.

Si je fais venir quelqu'un d'autre qui a un nom différent, un caractère différent, et qui lui ressemble, cela ne sert pas le bon objectif.

Dans notre cas, nous construisons ce que l'on appelle des répliques numériques. Il s'agit en fait d'un clone numérique de la personne, mais entièrement animé.

Nous pouvons par exemple l'animer, lui faire dire quelque chose qu'il n'a pas dit, ou le faire jouer ou chanter, comme nous l'avons fait dans notre spectacle.

-Est-ce un show rentable, gagnez-vous de l'argent ?

-Oui mais sur le long terme.

La première fois, ce n'est pas le cas mais à plus long terme, cela vaut la peine de s'y intéresser, car les spectacles d'hologrammes présentent des avantages.

Vous pouvez par exemple organiser le spectacle plusieurs fois par jour alors que vous ne pouvez pas demander à un véritable artiste de donner plusieurs concerts par jour pendant des semaines.

L'utilisation d'hologrammes présente donc certains avantages, mais je dirais que les théâtres ou les petites salles de spectacle ne sont pas encore prêts pour ce type d'utilisation à long terme.

Une fois que ce défi sera relevé, je pense que vous commencerez à voir de nombreux spectacles d'hologrammes dans le monde entier.

-Qui sont les promoteurs de ce spectacle, les descendants d'Oum Kelthoum ?

-Nous travaillons avec une société locale pour organiser un spectacle mais sa famille ne fait pas partie des organisateurs.

-Ce type de spectacle va-t-il se généraliser au Maroc ?

-Certainement car ce qui s'est passé hier en termes d’accueil du public est un très bon signe pour l’avenir.

Parce que, vous savez, avec chaque nouvelle technologie, il arrive que le public ne la reçoive pas ou qu'il mette du temps à la recevoir correctement.

Mais je pense que la journée d'hier a été un succès. C'était un très bon début.

Et il y a certainement d’autres d'artistes dans la file d'attente dont des artistes locaux.

-À part les artistes disparus, que pouvez-vous faire d’autre comme spectacle avec un hologramme ?

-Produire un artiste sur scène en partie en direct et en partie en hologramme.

Une autre option consiste à utiliser les hologrammes non pas pour créer un artiste, mais pour créer des effets visuels autour de lui.

Au lieu de se contenter d'utiliser des écrans LED et des lumières, quelqu'un qui se produit en direct a désormais la possibilité de créer un contenu plus attrayant et immersif sur scène autour de lui.

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