Kamal Lazrak: comment j'ai réalisé “Les meutes”, grand prix du jury au FIFM

Au lendemain de la réception du prix du jury pour son film "Les meutes", Kamal Lazrak s’est envolé pour Djeddah où il a participé à la 3e édition du Red Sea Festival. Désormais courtisé à l’international, le jeune réalisateur marocain revient pour Médias24 sur la genèse de son film et sa méthode de travail, avec des acteurs non professionnels, qu’il compte rééditer pour sa prochaine production.

Kamal Lazrak: comment j'ai réalisé “Les meutes”, grand prix du jury au FIFM

Le 8 décembre 2023 à 14h30

Modifié 8 décembre 2023 à 15h21

Au lendemain de la réception du prix du jury pour son film "Les meutes", Kamal Lazrak s’est envolé pour Djeddah où il a participé à la 3e édition du Red Sea Festival. Désormais courtisé à l’international, le jeune réalisateur marocain revient pour Médias24 sur la genèse de son film et sa méthode de travail, avec des acteurs non professionnels, qu’il compte rééditer pour sa prochaine production.

Kamal Lazrak, réalisateur du film "Les meutes", grand prix du jury au FIFM

Médias24 : Quelle est la raison de votre présence au Festival cinématographique de Djeddah ? Récolter un autre prix pour Les meutes ?

Kamal Lazrak : Non, car comme sa première sortie dans le monde arabe a eu lieu à Marrakech, mon film ne pouvait pas faire partie de ceux qui ont participé à la compétition de Djaddah, mais il a quand même été sélectionné dans la catégorie "Coup de cœur" du festival.

De plus, sachant que les organisateurs du Red Sea Festival nous ont accompagnés au niveau de la production et de la post-production du film, où nous avons participé à l'équivalent des Ateliers de l'Atlas, nous nous devions d'être présents pour présenter notre film lors de deux projections.

- Un petit mot sur le prix que vous avez obtenu au festival de Marrakech...

- Très fier, surtout que la toute première fois où nous avons présenté le scénario à des professionnels se déroulait dans le cadre des Ateliers de l'Atlas. Du coup, revenir pour sa grande première à Marrakech et obtenir en plus le prix du jury a constitué la cerise sur le gâteau.

- Des souvenirs marquants ou des anecdotes sur votre tournage ?

- J'ai fait le choix de tourner de nuit dans l'ordre chronologique du scénario afin que les acteurs qui sont des non-professionnels puissent vivre pleinement l'histoire.

Sachant que les tournages nocturnes se terminaient souvent à 6 heures du matin et qu'ils étaient très fatigants, je me suis servi de cette fatigue naturelle pour faire en sorte qu'elle soit visible dans le jeu des acteurs.

C'est d’ailleurs ce qui s'est passé à la fin du tournage car avec le manque de sommeil accumulé, il y a eu une forme d'ivresse qui leur a permis d'une certaine manière de lâcher prise.

De plus, nous avons laissé place aux "accidents" et à l'imprévu pour essayer de donner une touche supplémentaire d'authenticité au contenu du film.

Parfois, cela n'allait pas du tout dans le sens du film et nous avons dû refaire les prises mais d'autres fois, ça a apporté un cachet imprévu qui s’inscrivait dans les propos que l'on voulait tenir.

Cette méthode est très intéressante car on se rend compte que la fatigue des acteurs qui n’est pas feinte a créé une certaine tension qui est largement visible à l'écran.

- Un rapport avec la méthode de l'Actors Studio ?

- L'Actors Studio fait ça, mais d'une manière plus travaillée, alors que nous avons opté pour un rendu bien plus brut et spontané avec des acteurs qui sont vraiment entrés dans la peau des personnages.

Et je me dois de préciser qu'ils ont d’ailleurs eu beaucoup de mal à en sortir à la fin du tournage.

- Pourquoi avoir choisi cette thématique anxiogène, avec un univers plutôt sombre ?

- En fait, l'univers de ce film est le prolongement de celui de mon précédent court métrage Moul Lkelb (le propriétaire du chien), qui baignait dans les combats de chiens et se passait également la nuit à Casablanca.

Quand j'ai décidé ensuite de réaliser le long métrage Les meutes, j'avais déjà fait beaucoup de repérages et j'avais rencontré beaucoup d'acteurs non professionnels qui venaient de ces milieux.

Ce travail de préparation qui se déroule entre le coucher du soleil et l'aube, a par conséquent beaucoup nourri l'écriture de mon film qui a repris le même dispositif que celui de Moul Lkelb.

Le prolongement de mon précédent travail que j'ai choisi de développer dans un long-métrage a en effet permis de lui donner un caractère d’urgence et une tension dramatique palpable.

Cela dit, ce n'est pas une thématique que je compte réutiliser pour mon prochain film qui sera assez différent.

- Est-il difficile de diriger des amateurs ?

- Ayant déjà réalisé deux courts métrages avec des non-professionnels, je crois avoir compris quelle méthode il a fallu mettre en place pour obtenir une spontanéité et une authenticité dans leur prestation cinématographique.

Elle consiste à leur laisser beaucoup de liberté et leur permettre de s'exprimer avec leurs propres mots sans imposer des dialogues trop précis.

Idem pour l'équipe technique qui s'est adaptée à eux, et pas le contraire comme dans les tournages classiques où il y a souvent des contraintes techniques qui peuvent être très lourdes et peuvent gâcher toute spontanéité chez les acteurs non professionnels.

En développant cette méthode de travail, je pense que nous avons réussi notre pari malgré les risques découlant du fait que nous avons tourné de nuit pendant 6 semaines et que la fatigue commençait à s'installer.

En réalité, le plus important est d’avoir réussi à créer, avant le tournage, une relation de confiance et d'amitié avec les deux acteurs principaux, qui les a poussés à s’impliquer et à se surpasser.

Ainsi, dès le début du tournage, nous n'avons rencontré aucun problème avec eux et bien au contraire,  ils ont développé un professionnalisme qui a impressionné toute l'équipe.

- Vous comptez rééditer l'expérience pour votre prochain film ?

- Absolument, avec un acteur non professionnel et avec le même dispositif, mais dans le cadre d’une histoire totalement différente qui sera plus lumineuse.

- Les Ateliers de l'Atlas sont-ils une fabrique à récompenses ?

- Au vu des résultats, c'est indéniable.

Je pense qu'il est d'autant plus important d'avoir ce genre d'atelier au Maroc que lorsque nous y avons participé, nous venions à peine de finir le scénario.

Lors de notre participation à ces ateliers, nous avions été très impressionnés par la qualité des consultants auxquels nous avions eu droit.

En effet, plusieurs scénaristes très expérimentés nous ont prodigué beaucoup de conseils, sans compter le fait que nous avons pu rencontrer des distributeurs et des exploitants qui avaient lu le projet et qui nous ont chacun donné son point de vue pour l’améliorer.

Ces consultants, au regard acéré et très pertinent ont indéniablement accéléré les choses en nous confortant dans certains choix et en nous permettant de nous remettre en question sur d'autres avec leurs critiques constructives.

Selon moi, l'importance des Ateliers de l’Atlas réside dans le fait qu’ils ont permis de mettre un coup de projecteur sur notre projet et d’intéresser des professionnels à notre scénario.

Par conséquent, il est très intéressant pour les réalisateurs et les producteurs de participer à ce genre d'événement qui donne un coup d'accélérateur à la production d’un film.

- Pensez-vous pouvoir rentabiliser votre film grâce aux prix reçus ?

- Certainement d'autant plus que notre film qui va sortir en salle en France a déjà été acheté par plusieurs pays en Europe, avec des sorties en Espagne, dans le monde arabe, et au Maroc à la fin du mois de janvier 2024.

De plus, comme la vie d'un film ne se limite pas aux sorties en salle, et que plusieurs télévisions comme Canal+ se sont positionnées pour le diffuser, nous devrions arriver à le rentabiliser même si cela prendra un peu plus de temps, car c'est un film d'auteur et pas commercial.

- Combien a coûté votre film ?

- Nous avons eu l’avance sur recettes au Maroc mais, sachant que c'est une coproduction internationale, nous avons également obtenu des financements en France, en Belgique, au Qatar et en Arabie saoudite, plusieurs petits guichets qu'il a fallu solliciter pour obtenir le budget nécessaire pour réaliser un film de qualité qui puisse ensuite s'exporter dans les grands festivals.

Au final, nous avons atteint un budget équivalent à un million d'euros, soit 11 millions de dirhams.

- La moisson de prix va faciliter le financement de vos prochains films ?

- C'est sûr, car ces prix nous donnent une certaine légitimité et une crédibilité, notamment celui récolté à Cannes dans la catégorie "Un certain regard", qui a créé une certaine attente pour notre prochain projet.

Partant de là, je pense qu'ils vont certainement nous permettre de gagner beaucoup de temps et de faciliter le financement de nos prochains films.

- Une idée du sujet de votre prochain film ?

- Tout à fait mais je suis au tout début du processus d'écriture.

Ce qui est sûr est que je vais partir du même dispositif, à savoir avec un acteur non professionnel, en me basant sur une expérience vécue que je vais essayer de transformer en fiction.

 

Ci-après, plusieurs photos du tournage fournies par le réalisateur :

 

 

 

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