Sans l’intervention de l’État, la pauvreté et les inégalités se seraient aggravées en 2022 (Banque mondiale)

Les subventions publiques ont permis de stabiliser 22% du panier de consommation et d’éviter 5,9 points de pourcentage de plus dans le taux d’inflation. Cependant, ces aides tendent à profiter de manière disproportionnée aux ménages les plus riches, inhibant leur impact sur la pauvreté et la vulnérabilité.

Sans l’intervention de l’État, la pauvreté et les inégalités se seraient aggravées en 2022 (Banque mondiale)

Le 16 février 2023 à 13h54

Modifié 16 février 2023 à 16h29

Les subventions publiques ont permis de stabiliser 22% du panier de consommation et d’éviter 5,9 points de pourcentage de plus dans le taux d’inflation. Cependant, ces aides tendent à profiter de manière disproportionnée aux ménages les plus riches, inhibant leur impact sur la pauvreté et la vulnérabilité.

Bien que l’inflation ait érodé le pouvoir d’achat des citoyens, les pouvoirs publics ont tenté d’en réduire l’impact. Mais dans quelles proportions a-t-elle accentué la pauvreté et la vulnérabilité ? Et les mesures gouvernementales, notamment les subventions et aides, ont-elles réussi à préserver ce pouvoir d’achat et à limiter l’aggravation de la pauvreté ?

Autant de questions auxquelles la Banque mondiale apporte des éléments de réponse dans son dernier rapport de suivi de la situation économique au Maroc.

Dans une analyse des inégalités de l’inflation au Maroc, on apprend qu'une absence de subvention du gaz, du blé, du transport et du sucre aurait entraîné 5,9 points de pourcentage d’inflation supplémentaires en 2022. Le chiffre émane du ministère des Finances.

Cet effort substantiel de l’Etat comprend essentiellement : 42 MMDH de subventions explicites sur les prix (gaz, sucre et blé) ; 5 MMDH d’appui financier à l’ONEE ; et un soutien direct aux opérateurs de transport (estimé à 4,4 MMDH). Globalement, cela représente près de 3,5 % du PIB.

Cette subvention a effectivement protégé une part du panier de consommation global de la flambée des prix ; sans elle, le taux d’inflation global aurait certainement été sensiblement plus élevé, affirme la Banque mondiale. Selon ses estimations, cela a permis la stabilisation des prix pour 22% du panier de consommation.

Vers un ciblage des aides

Certes, ces subventions ont joué un rôle protecteur en contenant l’augmentation de la pauvreté et des inégalités induites par l’inflation, comme le confirment les simulations de la Banque mondiale. "Si le gouvernement avait décidé de ne pas augmenter l’allocation budgétaire aux subventions des prix pour répondre au choc, la pauvreté et l’inégalité auraient augmenté de 1,5 et 2,0 pp supplémentaires."

Cela dit, l’impact de cet effort gouvernemental aurait pu être plus important et encore plus efficace. La raison ? Les subventions aux prix tendent à profiter de manière disproportionnée aux ménages les plus riches, précise la Banque mondiale.

Pour cette dernière, le système actuel de subvention explicite des prix, qui inclut les produits alimentaires primaires (sucre et blé) et le GPL, est "progressif en termes d’incidence relative". Cela signifie que "la part des dépenses consacrée aux produits subventionnés est plus élevée pour les ménages les plus pauvres. Cependant, la plupart des ressources mobilisées par l’État pour les soutenir profitent aux plus riches".

En 2021, les ménages les plus aisés ont reçu en moyenne 1,9 fois le montant par habitant reçu par les plus pauvres.

Une prise de conscience existe sur cette problématique, dont la solution consiste à passer d’un système de subvention aux prix vers un ciblage des aides (RSU). Cette réforme actuellement engagée devrait aboutir entre 2023 et 2024 par la généralisation des allocations familiales, dans le cadre d’une réforme plus large du système de santé et de la protection sociale.

L’inflation impacte davantage les plus pauvres...

Par ailleurs, le rapport analyse l’impact de l’inflation sur les différentes couches sociales. Il conclut sans surprise que la hausse des prix affecte davantage les plus pauvres.

"Les ménages les plus pauvres ont souffert de manière disproportionnée de la récente poussée inflationniste, qui a été sensiblement plus élevée pour eux en raison du poids plus important des aliments dans leur panier de consommation", note la Banque mondiale.

Evidemment, les paniers de consommation des ménages pauvres et riches diffèrent sensiblement. Les plus pauvres sont plus exposés à l’inflation des prix de l’alimentation, dont la hausse a été remarquée en 2022, du logement et des services publics.

Les ménages plus aisés sont davantage touchés par la hausse des prix des transports et de la santé et biens divers, sachant que les prix des deux derniers postes n’ont pas augmenté l’année dernière.

... et le rural plus que l’urbain

Ainsi, selon les calculs de la Banque mondiale, l’inflation moyenne annuelle a été de 5,9% pour les plus pauvres, quand elle n’était que de 4,8% pour les plus riches. Cet écart d’inflation s’est creusé avec le temps (+2,1 points de pourcentage en octobre 2022).

En plus d’être confrontés à des prix plus élevés, les ménages les plus pauvres ne disposent pas de larges possibilités pour ajuster leurs comportements de consommation, car ils disposent de moins de ressources, notamment actifs, épargne ou soldes de précaution, ajoutent les économistes de la Banque mondiale.

Pour l’institution internationale, les zones rurales semblent connaître un taux d’inflation global plus élevé en 2022 par rapport aux centres urbains (6,1 contre 5,0%), contrairement aux années précédentes où l’inflation rurale était plus faible.

Accroissement de la pauvreté et de la vulnérabilité

Conclusion : la Banque mondiale estime que la pauvreté aurait pu augmenter de 2,1 points de pourcentage (pp) en 2022, passant de 3,4% à 5,5% en raison de la poussée inflationniste.

Les zones les plus touchées sont les zones rurales, où l’incidence de la pauvreté aurait pu augmenter de 6,7% à 10,6,% par rapport aux centres urbains.

De même, la vulnérabilité augmente à 14% (+3,6 pp). Les simulations montrent également que l’inflation a accru les inégalités, telles que mesurées par le coefficient de Gini (+0,1).

Les simulations montrent que si le gouvernement avait décidé de ne pas augmenter l’allocation budgétaire aux subventions des prix, la pauvreté et l’inégalité auraient augmenté de 1,5 et 2,0 pp supplémentaires.

La Banque mondiale note tout de même dans son rapport que "la pauvreté et les inégalités pourraient être mal mesurées, voire sous-estimées dans le cas du Maroc en 2022", en raison du manque de données précises.

Elle explique qu’"en l’absence d’enquêtes fréquentes auprès des ménages, les indicateurs de pauvreté et d’inégalité sont souvent mis à jour à l’aide des taux d’inflation généraux, principalement collectés dans les zones urbaines et calibrés sur la moyenne des paniers de consommation des ménages, ce qui conduit à une estimation inexacte de l’évolution du bien-être d’une année sur l’autre".

L'institution appelle donc le HCP à envisager d’étendre la collecte des prix aux zones rurales ou de calculer un autre indicateur de prix à haute fréquence permettant un meilleur suivi de la pauvreté (et de l’insécurité alimentaire), le dernier point étant essentiel pour les régimes de protection sociale adaptifs reposant sur des programmes pouvant être renforcés ou réduits en fonction des besoins.

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