Etude. Les motifs de fierté et d’insatisfaction des Marocains du monde à l’égard du Maroc (CESE)

Entre facteurs de fierté et motifs d’insatisfaction, le Conseil économique, social et environnemental a sondé 5.000 Marocains du monde et formulé des recommandations pour répondre à leurs attentes.

Ahmed Reda Chami, président du Conseil économique, social et environnemental. (MAP)

Etude. Les motifs de fierté et d’insatisfaction des Marocains du monde à l’égard du Maroc (CESE)

Le 22 décembre 2022 à 9h43

Modifié 22 décembre 2022 à 16h38

Entre facteurs de fierté et motifs d’insatisfaction, le Conseil économique, social et environnemental a sondé 5.000 Marocains du monde et formulé des recommandations pour répondre à leurs attentes.

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a présenté son dernier avis sur les chances de renforcer le lien intergénérationnel entre les Marocains du monde (MDM) et le Maroc.

Le CESE a réalisé une enquête à travers un sondage en ligne en sept langues, ouvert aux Marocains du monde, qui a connu la participation de 5.000 répondants. Il a aussi procédé à des séances d’écoute auprès de spécialistes, d’institutions et d’acteurs gouvernementaux et non gouvernementaux.

Les réponses collectées ont permis au CESE d’établir des constats et de formuler des recommandations pour répondre aux problématiques existantes. Car les Marocains du monde témoignent de leurs liens forts avec le Maroc, qu’ils souhaitent renforcer, mais aussi des entraves qui les irritent, comme l’a expliqué Ahmed Reda Chami, président du CESE, lors d’une conférence de presse ce mercredi 21 décembre.

Près de 7 millions de Marocains à l’étranger

Membre du CESE et rapporteur de la commission ad hoc créée suite au discours royal du 20 août 2022, Fouad Benseddik a présenté les axes de travail de la commission. Ils visent, en premier lieu, à "mieux connaître les Marocains du monde : qui sont-ils ? Combien et où sont-ils ? Quelles sont leurs attentes ?" Entre autres interrogations... Bien que les chiffres varient en fonction des méthodes d’identification des Marocains du monde, Fouad Benseddik indique qu’ils sont au nombre de 7 millions, selon les estimations.

80% d’entre eux transfèrent régulièrement des ressources au Maroc et 3 millions séjournent au moins une fois par an au Maroc.

L’enquête a également permis de constater que leur intégration dans leurs pays d’accueil n’estompait pas leur relation avec le Maroc. "Au contraire, plus leur intégration est réussie dans les pays d’accueil, plus leur relation avec le Maroc est intense", assure Fouad Benseddik.

"A travers les données récoltées, nous avons tenté de répondre aux questions suivantes : comment mieux renforcer la protection des droits et la dignité des Marocains du monde ? Comment mieux soutenir et encourager leur contribution au développement du pays, avec un paradigme nouveau qui ne repose plus sur l’attente des transferts financiers vers les finances intérieures? L’idée est de rompre avec la vieille image des Marocains du monde en tant que sources de transfert, comme facteur d’équilibrer les comptes extérieurs, et de rompre également avec l’idée de l’immigration en tant qu’outil de régulation du chômage", explique Fouad Benseddik.

Enfin, le CESE s’est également interrogé sur les moyens à mettre en place pour co-construire des liens qui multiplient les succès des MDM. "On trouve des Marocains à la pointe dans plusieurs domaines. Comment contribuer à étendre, avec eux, le rayonnement du Maroc ?"

Entre facteurs de fierté et d’irritation

L’enquête a permis de répondre à ces interrogations, puisque sur les vingt-huit questions posées, huit étaient ouvertes. Les 5.000 répondants ont pu s’exprimer sur les facteurs de fierté d’une part, et les facteurs irritants d’autre part.

Concernant les motifs de satisfaction, Fouad Benseddik indique que la réponse qui revient le plus fréquemment est relative aux institutions. "Sa Majesté le Roi, les progrès réalisés par le Maroc depuis son intronisation, les positions du souverain sur la question du Sahara et sur le plan international, la défense de la marocanité du Sahara, l’amélioration des droits de la femme, la gestion de la crise du Covid, le développement du pays et l’amélioration des infrastructures", sont les réponses récurrentes des Marocains du monde.

Les valeurs sociétales, la convivialité, la gastronomie, le sens de la famille, la culture et l’accueil, en particulier l’opération Marhaba, sont aussi cités dans les réponses récoltées.

A l’inverse, les motifs d’insatisfaction et de frustration les plus récurrents sont les suivants : l’insécurité éthique, la corruption, le clientélisme, l’extorsion, la malhonnêteté, les escroqueries, les spoliations, les difficultés avec les services publics et administratifs, le manque d’information et de transparence sur les procédures d’investissement, la complexité de l’environnement des affaires, l’insécurité sanitaire et l’hygiène publique, la lenteur des premiers secours, la mauvaise qualité de la prise en charge médicale ou encore l’insécurité et l’ordre public.

Les Marocains du monde citent également les incivilités, le manque de respect envers les femmes, le problème des gardiens de voitures, le manque de reconnaissance envers les MDM, le sentiment de discrimination par rapport aux touristes non marocains, l’agressivité de certains fonctionnaires et la qualité des services de transport, notamment l’aérien. En effet, selon Fouad Benseddik "la RAM a souvent été stigmatisée" dans les réponses, "mais aussi Air Arabia, en termes d’accueil, de prise en charge et de retards".

Recommandations

Ainsi, pour répondre aux attentes des Marocains du monde, le CESE recommande :

- l’amélioration, en coopération avec les ambassades, de l’offre des services culturels ;

- la mise en place d’une plateforme digitale unique : un guichet unique qui assure l’interopérabilité entre tous les intervenants de l’écosystème destiné aux MDM. "Les sites actuels des départements ministériels sont très peu accessibles, leurs données sont souvent archaïques, non régulièrement mises à jour et sans complémentarité. Ils présentent un intérêt opérationnel assez limité", souligne Fouad Benseddik ;

- l’amélioration de la visibilité du numéro vert dans le cadre de la lutte contre la corruption ;

- le renforcement de la protection et de l’assistance consulaire pour les Marocains en situation de vulnérabilité : on estime que les prisons européennes comptent 12.000 Marocains, soit la première nationalité dans les établissements pénitentiaires en Europe. "En France, les Marocains sont la deuxième nationalité dans les prisons, après les Algériens. La plupart du temps, ce sont des jeunes hommes qui sont arrêtés pour des délits. N’ayant pas de garantie, ils ne peuvent pas bénéficier d’aménagement de peine, ni de dispositif de réinsertion, etc. Ils ressortent de leurs séjours en prison en plus grande difficulté. Même chose pour les femmes marocaines qui font l’objet de maltraitances, entre les mains de réseaux de traite d’êtres humains et d’exploitation sexuelle, en faveur desquelles il convient de développer une politique active de protection", ajoute Fouad Benseddik ;

- engager le dialogue avec les pays d’accueil pour permettre aux Marocains, particulièrement ceux du troisième âge, lorsqu’ils le souhaitent, de revenir s’installer dans leur pays et de continuer à bénéficier des droits à la couverture médicale ;

- encourager les acteurs du secteur financier à développer des produits d’épargne pour les Marocains du monde et des produits d’assurance santé pour leurs familles, de façon à ce que les flux de transferts ne soient pas seulement destinés à de la consommation comme c’est le cas aujourd’hui ;

- ouvrir le fonds Mohammed VI pour l’investissement à la participation des MDM et faire en sorte que les actifs de ce fonds soient fléchés vers des activités à bénéfice social et à bénéfice environnemental tangibles ;

- améliorer la cohérence et éviter les redondances dans le réseau institutionnel en charge des Marocains du monde. Selon le CESE, le réseau actuel est "dysfonctionnel". "Toutes les institutions qui existent ont une nécessité, mais elles constituent une sorte de constellation sans articulation entre elles. La commission interministérielle se réunit de façon aléatoire. Il s’agit d’une sous-structure du gouvernement. L’idée est de la transformer en Haute commission, au minimum auprès du chef du gouvernement. Elle aurait une fonction d’orientation stratégique et d’évaluation des politiques publiques dédiées aux MDM" ;

- créer des Chambres de commerce du Maroc à l’étranger ;

- renforcer l’ensemble des mécanismes de participation politique, de façon à systématiser la prise en compte des points de vue, des attentes, des éléments de contribution des MDM à tous les niveaux ;

- doter le Maroc, et les pouvoirs publics marocains en particulier, d’un référentiel qui permette d’évaluer l’utilité sociale des associations à l’étranger, sur la base de critères objectifs qui mesurent la transparence de leur gouvernance, de leurs chiffres et de leur démocratie interne. "Sur cette base-là, celles qui seront reconnues pourront être accréditées et favorisées dans les partenariats, dans le cadre des politiques à l’étranger, de façon à renforcer la crédibilité des liens entre les pouvoirs publics marocains et les associations à l’étranger."

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