Les opérateurs du tourisme réclament une réouverture des frontières

Au lendemain de fêtes de fin d’année au bilan catastrophique et en l’absence de réouverture rapide des frontières pour préparer la saison estivale, le secteur ne devrait pas retrouver son niveau d’activité de 2019 avant 2025.

Les opérateurs du tourisme réclament une réouverture des frontières

Le 3 janvier 2022 à 19h08

Modifié 4 janvier 2022 à 18h12

Au lendemain de fêtes de fin d’année au bilan catastrophique et en l’absence de réouverture rapide des frontières pour préparer la saison estivale, le secteur ne devrait pas retrouver son niveau d’activité de 2019 avant 2025.

Plus le temps passe, et

- plus les alertes lancées par les professionnels du tourisme deviennent moins audibles en raison d'un effet de lassitude.

- plus le secteur aura du mal à se relever. Lorsqu'une entreprise est mise en sommeil, elle ne redémarre pas d'un claquement de doigts. Lorsqu'elle ferme ses portes, c'est pire.

- plus la facture sera élevée pour l'économie nationale.

Ceci n'est pas le énième article avec un catalogue de lamentations et de griefs. Il s'agit plutôt du énième article qui tente de décrire une réalité difficile. L'information doit circuler. Le tourisme, l'artisanat, les transports sont les secteurs qui ont payé le plus lourd tribut à la pandémie.

En 2020, l’instauration d’un couvre-feu national durant la période des fêtes de fin d’année avait dissuadé une grande majorité des touristes étrangers d’opter pour la destination Maroc. En 2021,  la fermeture des frontières internationales décrétée début décembre jusqu'à la fin du mois écoulé les en a tout simplement empêchés.

Très mal vécue par la profession, cette restriction de circulation valable au moins jusqu’au 31 janvier prochain a non seulement ruiné la saison hivernale, mais elle a aussi et surtout impacté les prochaines saisons touristiques, avec un nouveau report du retour à une activité normale.

Une lenteur de réaction inexpliquée de la part des autorités 

S’il est trop tôt pour procéder à un bilan de l’activité touristique durant la haute saison des fêtes de fin d’année, un grand professionnel affirme que ce bilan ne changera rien, car les acteurs du tourisme, confrontés aux saisies en cours, sont en train de périr.

"La ministre s’est certes engagée à respecter les 10 recommandations récentes de la CNT comme l’arrêt des procédures de saisie. Mais il n’en demeure pas moins que l’on ne voit rien venir sur le terrain", avance notre source.

"Les entrepreneurs, qui ont hypothéqué jusqu'à leurs propres logements pour perfuser leur activité en injectant des liquidités, reçoivent toujours des relances d’huissiers envoyés par des organismes de crédit. Sachant que ces crédits ont servi à rémunérer des centaines de milliers d’employés, il est donc illusoire, voire indécent d'établir le bilan du nouvel an qui ne va absolument rien changer à leur situation financière", poursuit, dépité, cet hôtelier.

"On le sait, l’urgence est de sauvegarder un maximum d’emplois en prorogeant le versement de l’allocation CNSS de septembre à décembre. Mais dans ce cas, la profession ne comprend pas pourquoi il faut autant de temps à l’État pour appliquer des mesures qui figuraient déjà dans le contrat-programme signé en août 2020", dénonce-t-il.

Sans remettre en cause la bonne volonté du gouvernement "qui pense bien faire", même si c'est au détriment de la survie du tourisme, notre interlocuteur pense qu'il est difficile de faire confiance à la nouvelle équipe gouvernementale dont une partie était déjà aux affaires en 2020.

Quelle date pour concrétiser les promesses gouvernementales ?

Concernant une éventuelle reprise en 2022, notre hôtelier pense que tout dépendra des décisions à venir des autorités de tutelle, mais que "la saison hivernale est d’ores et déjà morte et enterrée".

"Malgré l’apparition d’un nouveau variant, la demande internationale de voyages est plus que présente, et le trafic aérien international ne cesse d’augmenter par rapport à l’année dernière mais, malheureusement, côté marocain, on ne prend toujours pas les mesures qui s’imposent pour faire redémarrer la machine."

L'opérateur donne l'exemple du Sénégal, "pays qui n’a pas vacciné en masse sa population", et "qui a gardé ouvertes ses frontières internationales sans conséquences sanitaires graves".

"La vraie priorité est de savoir à quelle date cette politique publique de soutien au secteur sera concrétisée", insiste-t-il en pointant du doigt un vrai problème d’exécution sur le terrain d’actions qui ont pourtant reçu le soutien officiel du ministère de tutelle.

Mieux encore, l'opérateur plaide pour la réouverture des frontières "très vite pour laisser travailler les acteurs du secteur, à l’instar de leurs concurrents qui profitent de l’absence du Maroc de la carte mondiale des destinations touristiques".

"Aujourd’hui, 80% des pays de la planète ont gardé leurs frontières ouvertes en imposant à leurs visiteurs la présentation de certificats de double ou triple vaccination. En maintenant closes ses frontières, le Maroc ne fait que reporter de plusieurs années la reprise totale de notre activité", déplore-t-il.

Ainsi, la perspective d’un retour au niveau d’activité de l’année de référence 2019 s’éloigne de jour en jour, avec en prime des drames pour des personnes qui perdent tous leurs biens.

2022, l’année de la multiplication des saisies

Si rien n’est fait rapidement, 80% à 90% des acteurs (hôteliers, restaurateurs, transporteurs, agences de voyages…) ne pourront plus payer leurs dettes en 2022 et devront certainement mettre la clé sous la porte, au terme de longues procédures judiciaires dont le délai dépendra des tribunaux, alerte notre source. Pour cet hôtelier, 2022 sera l'année des saisies où l'on commencera à "compter les morts". Mais pas seulement.

"Les grands groupes internationaux pourraient être tentés de quitter le Maroc pour s’implanter dans d’autres destinations, qui leur feront perdre moins d’argent sur leurs investissements", avertit-il.

L’autre inquiétude de taille concerne un possible exil des cadres supérieurs du tourisme, qui ont nécessité de longues formations pour être en mesure de développer l’hôtellerie de luxe par exemple.

"Sachant que le secteur rebondit partout, ces compétences très sollicitées sont très nombreuses à quitter leur poste au Maroc pour une vie meilleure chez la concurrence", s’inquiète l’hôtelier. "Pour vous donner un exemple concret, plusieurs collaborateurs de haut niveau de grands hôtels de luxe à Marrakech, qui n’avaient pas été payés par leur employeurs, ont été débauchés par de grands groupes internationaux pour travailler dans des destinations touristiques comme Dubaï."

"Ce phénomène croissant concerne aussi bien des postes de directeurs que de grands cuisiniers", précise notre interlocuteur. D'après lui, cette catégorie de travailleurs n’acceptera certainement pas de vivre avec l'aide publique de 2.000 DH et ne devrait, par conséquent, pas tarder à céder aux sirènes des employeurs à l’étranger.

"Qu’ils soient issus du Moyen-Orient, des États-Unis ou d’Europe, les pays qui ont rouvert tôt leurs frontières internationales se rapprochent déjà des chiffres d’arrivées réalisés avant l’avènement de la crise. D'ailleurs, la plupart d’entre eux ont d’ores et déjà récupéré 80% de leur niveau de business de référence", affirme-t-il.

Pas de retour à la normale avant 2025

"Un challenge qui sera très difficile à atteindre rapidement pour le Maroc, quand on sait qu’il doit partir d’à peine 2 millions d’arrivées actuellement pour revenir au chiffre de 13 millions enregistré en 2019."

"L’Égypte et la Turquie, qui ont mis en place les premiers protocoles sanitaires d’entrée pour recevoir les étrangers, devraient retomber sur leurs pieds en 2023, alors que notre pays qui persiste à fermer ses frontières ne retrouvera son niveau de 2019 qu’en 2024 s’il les rouvre début 2022, voire 2025 s’il tarde", conclut notre source qui estime qu’entre la décision de rouvrir et le retour à la normale, il faut compter deux à trois ans.

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