Informel : L’accès au foncier industriel, un frein au passage à la formalité ?

Selon plusieurs industriels, ce qui pousse beaucoup de TPE ou de PME à s’installer dans des caves, c’est l’absence de foncier industriel adapté. Une thèse que réfutent les principaux aménageurs de zones d’activités du pays, qui pensent que cet alibi ne tient pas la route. Ces aménageurs affirment qu’ils ont des zones dédiées aux TPE et PME, mais que la demande n’est pas là.

Informel : L’accès au foncier industriel, un frein au passage à la formalité ?

Le 14 février 2021 à 18h37

Modifié 11 avril 2021 à 2h50

Selon plusieurs industriels, ce qui pousse beaucoup de TPE ou de PME à s’installer dans des caves, c’est l’absence de foncier industriel adapté. Une thèse que réfutent les principaux aménageurs de zones d’activités du pays, qui pensent que cet alibi ne tient pas la route. Ces aménageurs affirment qu’ils ont des zones dédiées aux TPE et PME, mais que la demande n’est pas là.

C’est un des points soulevés par plusieurs industriels du textile, qui nous expliquent que si l’économie souterraine persiste, c’est en raison notamment de l’absence d’un foncier industriel accessible à ces petites entreprises et proche des bassins d’emplois.

Le foncier n’est pas, selon eux, le seul point qui freine le passage à la formalité, mais il fait partie des causes qui poussent des entrepreneurs qui ont des projets souvent viables à s’installer dans des caves "mortelles" dans des quartiers résidentiels. Pour une question de coût, mais aussi d’absence de contraintes de transport pour leurs employés.

Contacté par Medias24, un développeur de zones industrielles au Maric réfute cette thèse.

Le foncier est là, mais la demande est quasi absente

"Cela fait 25 ans que je suis dans ce domaine. Et je peux vous assurer que l’accès au foncier industriel pour les TPE et PME ne se pose plus aujourd’hui. Dans pratiquement toutes les zones que nous aménageons, il y a des lots qui sont dédiés à la TPE et à la PME, mais la demande n’est pas là", nous explique-t-il.

Tanger, où le drame de la cave à textile s’est produit cette semaine, c'est surtout l'Agence spéciale Tanger Med (TMSA) qui développe les zones d'activité. Mais si TMSA est connu essentiellement pour ses zones TFZ et Tanger Automotive City, qui sont des zones dédiées à l’export, une source au sein de l’institution nous affirme que la région dispose d’une zone dédiée pour la TPE et la PME, proche de Tétouan, à des conditions très accessibles. "Mais depuis son ouverture, cette zone a malheureusement du mal à être remplie, faute de demande", nous affirme notre source.

Même constat soulevé par notre développeur, qui pointe également ce problème de demande dans les autres régions du Royaume. Un problème de demande dont les causes sont diverses. L’une des principales est l’accès au financement.

"A Kénitra, à côté de la zone d’accélération industrielle, il y a une zone dédiée à la TPE et la PME, car les équipementiers ont besoin de petits sous-traitants pour certaines tâches, mais ils n’en trouvent pas. L’opportunité est là surtout pour des activités de maintenance, de commodités, de recyclage… A Meknès, il y a également des lots dédiés aux TPE et PME. Idem à Oujda, Berkane, à Nador, Hoceima ou à Boujdour. Le problème, c’est que ces TPE et PME n’ont pas de dossiers bancables et n’arrivent pas à mobiliser les financements pour acheter les terrains et construire les usines", explique notre source.

Cette dernière note toutefois une exception dans le secteur de l’agro-alimentaire et dans les zones qui y sont dédiées à Meknès, à Berkane et au Souss. Des agropoles où beaucoup de PME et de TPE se sont installées, car la demande était là et l’offre de terrains accessibles dans des zones aménagées et disposant de toutes les commodités est venue y répondre.

"A part les agropoles de Meknès, d’Agadir et de Berkane, nous constatons une très faible demande sur les lots industriels dédiés à la TPE et à la PME dans toutes les autres zones", ajoute le développeur.

"L’informel a besoin d’une stratégie intégrée, le foncier est un faux alibi"

"La problématique de l’informel ne se réduit pas à un problème de foncier. Il faut que l’Etat lance une politique intégrée pour l’informel qui comprend entre autres une composante foncière", précise-t-il.

Mais pour les industriels, c’est justement ce modèle de zones où l’entreprise est obligée d’acheter le terrain, de construire, avant de démarrer son activité qui freine l’investissement. Une de nos sources plaide ainsi pour un changement de modèle surtout pour les lots qui sont dédiés à la TPE et à la PME, avec des offres locatives accessibles.

Des alternatives existent notamment dans le locatif. Elles sont portées par la CFCIM qui agit en partenariat avec le ministère de l’Industrie, comme nous le confirme Mounir Benyahya, directeur des Parcs industriels de la Chambre française de commerce et de l’industrie.

"Effectivement, l’accès au foncier reste encore difficile pour les investisseurs au Maroc, surtout les PME, qui n’ont pas les ressources suffisantes pour l’acquisition de terrains, souvent trop chers, et de surfaces trop grandes. Des alternatives existent cependant. La CFCIM a par exemple, initié des projets en partenariat avec le ministère de l’Industrie, afin de proposer du foncier locatif aux investisseurs. Cette option leur permet de garder leurs capitaux pour les investir dans l’appareil productif et non pas dans le foncier. Les surfaces sont elles aussi adaptées aux PME, puisque des terrains de petite taille (à partir de 500 m²) sont proposés. Des bâtiments locatifs prêts à l’emploi sont également proposés, pour ceux qui ne souhaitent pas investir dans les murs", explique M. Benyahya. 

Des lots qui marchent bien, car loués à des prix très accessible (6 DH le m2). Mais cette location ne porte que sur le terrain, et la TPE ou la PME doit pouvoir avoir la capacité de construire son usine et l’équiper…

Mais ceci est un faux problème selon lui. Car location ou achat, l’indicateur qui montre que si l’investissement est bon ou pas, c’est le résultat final. Et le résultat des entreprises qui ont acheté dans des zones montre que le modèle d’achat et de construction ne pose aucun problème.

"A Kénitra comme dans d’autres zones, il y a des multinationales qui assurent que leurs usines marocaines sont les plus compétitives et les plus rentables du monde. Si c’est valable pour des étrangers, ça doit en principe être valable également pour des acteurs locaux. Ceci montre que le foncier, et l’offre développée jusque-là, n’est pas un frein au développement ou à l’investissement", estime notre développeur.

Au ministère de l’Industrie, une source nous affirme qu’il ne faut pas dévier le problème de l’informel sur le terrain du foncier. Car cela est un faux débat, nous dit notre source.

"L’informel a besoin d’une politique intégrée, qui agit sur plusieurs composantes : le fiscal, l'administration, la simplification des procédures, la digitalisation, mais aussi et surtout un changement dans la mentalité des entrepreneurs. Quand tout cela sera réglé, ces gens trouveront le foncier qu’ils veulent car l’offre est là, elle est diversifiée et est présente dans tout le territoire du Royaume. Sans parler des nouveaux projets qui sont lancés, soit par le ministère, par MedZ ou différents acteurs privés", confie notre source, qui nous donne l’exemple de la zone dédiée aux acteurs du secteur du cuir qui va régler définitivement le problème des tanneurs de Fès.

Notre source au ministère précise également que le développement de zones d’activités n’est pas une activité réservée exclusivement à l’Etat. "Les Communes et les Régions doivent s’impliquer également dans l’aménagement de zones d’activités. Elles connaissent mieux que quiconque la réalité territoriale et ont tous les moyens pour agir".

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