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A l'école, les difficultés des enfants handicapés renforcés par le protocole sanitaire

Le port du masque empêche les élèves sourds et muets de lire sur les lèvres des enseignants, et la distanciation sociale ne peut pas être toujours respectée, notamment lorsqu’il faut aider certains élèves à se déplacer d’un endroit à un autre.

A l'école, les difficultés des enfants handicapés renforcés par le protocole sanitaire

Le 24 novembre 2020 à 15h56

Modifié 11 avril 2021 à 2h49

Le port du masque empêche les élèves sourds et muets de lire sur les lèvres des enseignants, et la distanciation sociale ne peut pas être toujours respectée, notamment lorsqu’il faut aider certains élèves à se déplacer d’un endroit à un autre.

Aux difficultés auxquelles sont ordinairement confrontés les élèves en situation de handicap, s’en ajoutent désormais de nouvelles liées à la crise sanitaire et au protocole déployé dans les établissement scolaires.

Le port du masque a introduit dans le quotidien de certains enfants des difficultés auxquelles ils n’étaient pas exposés avant la crise sanitaire. Pour les élèves sourds et muets, impossible désormais de lire sur les lèvres de leurs enseignants, le masque recouvrant la totalité de la région buccale. La solution serait de faire porter aux professeurs des masques transparents, afin que ces élèves puissent suivre les mouvements des lèvres et de la bouche, mais il n’en existe pas sur le marché marocain. ''Certains sont fabriqués artisanalement, mais ce n’est vraiment pas l’idéal'', nous dit-on au sein de l’Association de l’enfance handicapée (AEH), à Agadir.

Des alternatives au port du masque encore timides

A Tétouan, l’Association Hanane pour la protection des enfants handicapés, constate également les conséquences de l’absence de masques transparents pour la scolarité des élèves sourds et muets en cette période de pandémie. ''Ils ont énormément de mal à suivre les cours. Ça leur est très, très difficile'', observe Souleymane Amrani, directeur de l’association joint par Médias24. Son association a initié tout récemment un projet de fabrication de masques transparents qui soient conformes aux normes médicales. Avec l’appui de l’ONG espagnole Manos Unidas, elle prévoit d’en fabriquer elle-même, dans les ateliers de confection hébergés dans son centre de formation professionnelle.

Pour l’instant, afin de pallier l’absence de masques transparents, le port de la visière s’est imposé dans plusieurs établissements scolaires accueillant des élèves sourds et muets, mais tous les professeurs n’en portent pas. ''Ce n’est pas à eux de se les procurer ; c’est au ministère de l’Éducation nationale de les leur fournir. Certains sont compréhensibles et les achètent eux-mêmes, mais ce n’est pas le cas de tous les enseignants'', précise l’AEH.

Autre alternative encore : les associations qui ont des partenariats avec certains établissements scolaires peuvent mettre à la disposition de ces élèves un interprète en langue des signes, mais là encore, c’est loin d’être le cas de tous les établissements. ''Par conséquent, les élèves qui ne peuvent bénéficier d’un interprète et dont les enseignants portent des masques normaux sont lésés. Cette compétence qu’ils ont de lire sur les lèvres n’est plus utilisée. Ils comprennent ce que l’enseignant écrit au tableau, mais pas ce qu’il dit. En fait, certains enfants sont là sans être là'', déplore-t-on au sein de l’Association de l’enfance handicapée.

Des élèves encore nombreux à suivre les cours à distance

Pour les élèves ayant un handicap moteur, c’est une autre difficulté qui se pose : celle du respect de la distanciation sociale. ''Si un enfant ou adolescent a besoin d’un tierce personne pour se déplacer, la distanciation sociale ne peut pas être respectée. On ne peut pas aider un enfant à s’installer sur une chaise, à monter dans un bus, à aller aux toilettes ou à monter des escaliers en étant à deux mètres de lui. Même lorsque ce sont les autres élèves qui aident, la distanciation sociale est impossible à respecter, surtout pour les élèves qui ont un handicap physique très lourd et qu’il faut parfois porter pour emprunter les escaliers par exemple'', explique l’Association de l’enfance handicapée. Elle rappelle au passage que ce sont parfois les élèves qui se déplacent d’une salle à l’autre, et pas les professeurs, notamment dans les collèges et les lycées.

Par conséquent, beaucoup de parents n’optent pas pour le modèle d’enseignement hybride, moitié présentiel, moitié distanciel, mais maintiennent l’enseignement entièrement à distance. Certains enfants, en raison de l’inadaptation des structures scolaires à leur handicap et aux besoins qu’il génère, et plus encore dans ce contexte sanitaire, ne sont donc pas retournés dans leurs établissements depuis le 20 mars, date de l’annonce du confinement.

Au risque de voir s’aggraver les difficultés scolaires de ces enfants, et le retard s’accumuler : ''Ce sont des enfants qui, déjà, en temps normal, ont besoin de beaucoup plus de temps que leurs camarades pour acquérir les compétences. A distance, leurs difficultés sont démultipliées. Il est fort probable que les redoublants seront nombreux à la fin de cette année scolaire.''

Joint par Médias24, Hicham Mouhdi, président de l’Association nationale spina-bifida et handicaps associés, partage le même constat : selon lui, ''la majorité'' des enfants suivis par son association, à hauteur de 300 répartis dans tout le Maroc, effectuent leurs cours entièrement à distance, car beaucoup présentent des handicaps moteurs. Le spina-bifida est en effet une malformation congénitale qui provoque un mauvais développement de la colonne vertébrale. L’association chapeaute actuellement un programme visant à leur fournir des tablettes pour qu’ils puissent suivre leurs cours ''presque'' comme s’ils étaient en présentiel. Un centre d’accueil virtuel est également en cours de création pour recueillir les remarques et observations des parents de ces enfants, notamment sur le front scolaire en cette conjoncture si particulière.

Hicham Mouhdi souligne toutefois les dispositions prises par certaines écoles publiques, à Casablanca principalement, pour faire en sorte que les cours dispensés aux enfants ayant un handicap moteur le soient sur les espaces situés au rez-de-chaussé. ''Sur ça, les écoles publiques ont fait beaucoup de progrès ces quatre dernières années. Les académies sont également plus à l’écoute des parents concernant les besoins de ces enfants. Nous en sommes très satisfaits.''

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