Comment l’hôpital Ibn Rochd gère la reprise des activités médicales post-Covid

INTERVIEW. Pendant ces trois mois, l’hôpital Ibn Rochd a reçu les patients de la région Casablanca-Settat touchés par des formes aiguës du Covid-19. L’heure est désormais à la reprise des autres activités médicales, notamment les pathologies cliniques, explique à Médias24 Pr Mohammed Benghanem Gharbi, directeur de l’hôpital Ibn Rochd.

Comment l’hôpital Ibn Rochd gère la reprise des activités médicales post-Covid

Le 24 juin 2020 à 10h33

Modifié 10 avril 2021 à 22h43

INTERVIEW. Pendant ces trois mois, l’hôpital Ibn Rochd a reçu les patients de la région Casablanca-Settat touchés par des formes aiguës du Covid-19. L’heure est désormais à la reprise des autres activités médicales, notamment les pathologies cliniques, explique à Médias24 Pr Mohammed Benghanem Gharbi, directeur de l’hôpital Ibn Rochd.

Si la pression s’est quelque peu relâchée sur le personnel soignant, elle reste encore maintenue sur les équipes de réanimation et d’urgence non-Covid. Entre les patients atteints de maladies chroniques, dont l’état de santé s’est parfois considérablement dégradé pendant le confinement, et les accidentés de la route, à l’heure où le déconfinement se fait de plus en plus sentir, le personnel de l’hôpital reste très vigilant. Sans compter la crainte d’une éventuelle reprise de l’épidémie.

Dans cette interview, le Pr Mohammed Benghanem Gharbi, directeur de l’hôpital Ibn Rochd, nous fait le bilan de la prise en charge des patients Covid-19, dédiée aux cas sévères ou critiques, et nous présente la manière de l'hôpital gère la phase actuelle de reprise des autres activités médicales.

Médias24 : Combien de personnes atteintes du Covid-19 ont été traitées à l’hôpital Ibn Rochd, entre le début de l’épidémie au Maroc et le regroupement de tous les cas Covid-19 dans les centres de santé de Benslimane et Benguérir ?

Pr. Mohammed Benghanem : Nous avons reçu le premier patient atteint du Covid-19 le 5 mars. Jusqu’à l’ouverture des structures de Benslimane et Benguérir, le CHU Ibn Rochd a reçu 119 cas : 7 à l’hôpital mère-enfant et 112 à l’hôpital Ibn Rochd. Il faut toutefois préciser un point : l’hôpital Ibn Rochd a pris en charge les patients Covid-19 qui ont dû être placés en soins intensifs ou en réanimation, et pas les autres patients considérés comme bénins ou modérés.

Nous recevions en moyenne 8 patients par semaine, avec des pics fin mars, début avril, à 16 patients par semaine. Les séjours hospitaliers duraient en moyenne trois semaines.

Nous avons déployé, durant les trois derniers mois, 4 services de réanimation, 3 services de soins intensifs et une capacité litière de 76 lits pour les patients Covid-19 ayant développé des formes aiguës. La majorité de ces personnes présentaient des facteurs de risque, notamment l’âge élevé et certaines maladies chroniques, comme le diabète et l’hypertension artérielle.

Très rapidement, nous avons remarqué un autre facteur de risque qu’est l’obésité. Nous avons aussi reçu quelques personnes assez jeunes, âgées d’une quarantaine ou d’une cinquantaine d’années, et sans antécédents, mais la majorité a tout de même concerné des patients âgés et présentant des morbidités.

- Quelles sont les capacités opérationnelles de l’hôpital Ibn Rochd pour les patients atteints d’autres maladies, notamment en termes de personnel soignant et de lits de soins intensifs et réanimation ?

-Le CHU est composé de quatre établissements : le centre de chirurgie dentaire, l’hôpital du 20 Août 1953, l’hôpital mère-enfant et l’hôpital Ibn Rochd. L’hôpital Ibn Rochd concentre pratiquement les deux tiers de la capacité litière du CHU puisqu’il dépasse les 1.000 lits – 1.013 lits exactement (1.685 lits et 2.370 membres du personnel pour l’ensemble du CHU). A lui seul, il rassemble 33 spécialités (services cliniques).

L’hôpital n’a pas interrompu la prise en charge des patients non-Covid-19, mais nous avons dû redéployer nos capacités de réanimation et de soins intensifs puisque l’établissement a eu la responsabilité de tous les cas ayant nécessité une prise en charge en soins intensifs ou en réanimation, et de toute la région Casablanca-Settat. Le nombre de cas Covid-19 a ensuite commencé à baisser et nous avons pu rétablir nos capacités litières d’avant. Actuellement, nos trois services de réanimation fonctionnent et un seul est dédié pour le Covid-19 car la pandémie est toujours là. Nous devons donc absolument maintenir cette capacité.

- L’activité hospitalière est-elle revenue à la normale ? Les patients sont-ils de retour ? Observez-vous une hausse des consultations froides et des opérations chirurgicales ?

-C’est vrai que les patients ont été nombreux, pendant ce confinement, à penser que leurs problèmes de santé pouvaient attendre. Nous avons observé une baisse de l’ordre de 30% à 40% des consultations et des arrivées aux urgences, notamment entre mars et avril.

Ceci dit, les équipes médicales de l’hôpital Ibn Rochd ont continué à accueillir les patients dont les médecins estimaient qu’ils devaient absolument maintenir le suivi de leur état de santé. Par exemple, le service oncologie n’a pas été interrompu ; les traitements pour les cancers ne doivent absolument pas être suspendus ou reportés.

En tant que néphrologue, j’ai continué à recevoir les patients dont j’estimais que les consultations ne pouvaient pas attendre.

Après mars et avril, vers mai, il y a eu une remontée de l'activité, qui n’est pas complètement revenue au niveau antérieur ou comparable à 2019, mais nous sommes pour l’heure à plus de 70% de l’affluence, que ce soit au niveau des consultations froides et des demandes d’hospitalisation. 

- La pression s’est-elle relâchée sur les équipes médicales et le personnel soignant ?

-Oui et non. Oui dans le sens où la pression globale de la pandémie sur les hôpitaux et le personnel a baissé, d’autant que le nombre de cas graves continue de baisser. Nous ne sommes plus à des niveaux de mars ou avril.

Et non dans la sens où la pression reste très importante sur les équipes de réanimation et d’urgence non-Covid, et sur le laboratoire qui réalise les tests PCR (plus d’un millier de tests par jour au niveau de l’hôpital).

La pression remonte également concernant les pathologies autres que le Covid-19, dont les équipes ont continué de travailler non-stop. Il y a tout de même des systèmes de roulement qui permettent aux équipes de souffler un peu, mais tant que le virus est là et l’état d’urgence sanitaire en vigueur, la pression sera maintenue.

- Quelles mesures de précaution ont-elles été prises à l’hôpital Ibn Rochd pour pouvoir à nouveau accueillir les patients non-Covid-19 dans les conditions sanitaires qui s’imposent ?

-La pandémie de Covid-19 est toujours là et nous ne savons absolument pas comment elle va évaluer. Il nous faut donc rester extrêmement vigilants et toujours mobilisés.

Dans le cadre de la reprise des autres activités médicales, des conditions de suivi ont été mises en place dans chaque établissement de santé du CHU. Au niveau de l’hôpital Ibn Rochd, il y a une commission de suivi, de mesure et de prévention de la transmission du virus au sein de l’établissement.

Nous sommes orientés vers la régulation des flux : le principe de base, pour éviter la transmission, c’est de distancier toutes les personnes (personnel soignant, patients et accompagnants) au sein d’un même espace. Il faut maîtriser les risques de contact et, dans ce sens, réguler les flux, le nombre de personnes qui entrent…

Les médecins doivent quant à eux appliquer les recommandations des bonnes pratiques médicales : si un patient n’a besoin de venir consulter qu’une fois tous les trois mois dans le cadre de son traitement, il n’est pas utile de le faire venir une fois par mois. Il faut adapter ces bonnes pratiques. Cela nous permet de maîtriser le nombre de personnes qui arrivent.

Il y a aussi la maîtrise de la densité de population dans les espaces, à travers le contrôle des accès qui est assuré par les agents de sécurité, afin que seules les personnes qui doivent recevoir des soins puissent accéder à l’hôpital. Pour les visites familiales, elles se limitent à un créneau d’une heure par jour, par exemple entre 16 h et 17 h, et durent maximum 15 minutes avec une seule personne.

Enfin, il y a la mise en place des mesures barrières, obligatoires pour tout le monde : une personne qui ne porte pas de masque n’est pas autorisée à accéder à l’hôpital. Nous avons également mis des distributeurs de gels hydroalcooliques partout, dans tous les bâtiments de l’hôpital. Pour faire respecter la distanciation sociale, la signalisation au sol et sur les murs, déjà en place, va être renforcée dans le but de gérer les files d’attente et de réguler la circulation des personnes.

Le risque de contracter le virus à l’intérieur de l’hôpital est presque plus faible qu’à l’extérieur car les mesures sont extrêmement surveillées et appliquées par les membres du personnel et les patients.

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