Interrogations autour de la reprise de 5 CHU par la CMR

| Le 7/11/2019 à 17:35

L'annonce de l'acquisition par la Caisse Marocaine des Retraites de 5 Centres hospitaliers universitaires met le département des Finances devant un dilemme inextricable : Veiller aux intérêts de la CMR ou de l'Etat ? Interrogations.

 

C’était annoncé par le ministre de l’Economie et des Finances. La reprise de 5 CHU est désormais confirmée par la CMR elle-même.

« La Caisse Marocaine des Retraites (CMR), en tant qu’investisseur institutionnel a signé pour le compte du Régime des Pensions Civiles (RPC), un Protocole d’Accord avec le Ministère de l’Economie, des Finances et de la Réforme de l’Administration portant sur l’acquisition de cinq (05) Centres Hospitaliers Universitaires assortie d’un Contrat de bail sur une longue durée », peut-on lire dans un communiqué diffusé par la caisse ce jeudi 7 novembre.

Une enveloppe de 4,6MMDH

Cette opération intervient dans le cadre de la mise en place, par l’État Marocain, des schémas de financements innovants consistant à transférer la propriété de certains actifs immobiliers tout en préservant leur usage à travers des contrats de bail à négocier avec les nouveaux acquéreurs. 

Dans le détail, le communiqué de la CMR précise que : « La réalisation de cette opération porte sur un montant global de 4,6 milliards de dirhams. Elle procurera, à la Caisse, des revenus locatifs sécurisés et, nettement, supérieurs aux rendements issus des placements réalisés sur les marchés monétaire et obligataire ».

Juge et partie

Toutefois, cette opération pose un certain nombre de questions. En effet, elle pose d’emblée la question du conflit d’intérêt car pour investir hors côte et bons du Trésor, la CMR a besoin d’une dérogation de la part du département des finances - plus précisément de l’Autorité de contrôle des assurances et de la prévoyance sociale (ACPAS)- qui est lui-même contrepartie dans cette opération.

En quelque sorte, le département des Finances se retrouverait en même temps juge et partie dans un deal qu’il aura lui-même initié.

Plus encore, cela peut remettre en question l’indépendance des décisions de gestion des caisses de retraites vis-à-vis de l’Etat et cela vaut d’autant plus pour la CMR qui est censée assurer elle-même la gestion des placements des réserves. Une gestion où elle prend en compte l’équation rendement/risque en pondérant ses placements sur le marché financier entre la bourse et les bons du Trésor.

Et ce même si pour la CMR, ce deal vient consacrer les nouvelles orientations stratégiques de la Caisse en matière d’investissement de ses Fonds de Réserves (FDR).

« En effet, depuis l’entrée en vigueur, en 2016, de la réforme paramétrique du RPC, il était nécessaire de réviser la stratégie d’investissement de ce régime de pension à travers plus de diversification des portefeuilles et la recherche de meilleurs rendements pour ses placements », argue la caisse dans son communiqué.

Effet d'éviction ?

En fait, plus que de poser des questions, cette opération risque d’éloigner le gouvernement d’une certaine orthodoxie souhaitée dans la gestion des finances de l’Etat qui par ailleurs se targue d’éviter tout effet d’éviction envers le privé qui pour sa part se plaint de la rareté des opportunités d’investissements avec des rendements intéressants.

Aussi, l’argument des revenus plus attractifs pour la CMR peut être retoqué par la possibilité de conditions plus avantageuses pour l’Etat si la cession des CHU était effectuée dans un cadre plus ouvert avec un marché qui accepterait peut-être des rendements inférieurs à ceux que la caisse de retraite se verra offrir. Pire, cela voudrait dire que l’on renfloue les caisses de la CMR en surpayant le loyer. En d'autres termes, puisque le rendement est garanti et supérieur à ceux des marchés monétaires et obligataires (ce qui est confirmé par le communiqué de la CMR), pourquoi ne pas avoir fait appel au marché dans les conditions normales de concurrence.

Dilemme inextricable

A contrario, si l’objectif est de renflouer les caisses de l’Etat en forçant la main de la CMR, cette dernière se verrait cantonnée au rôle de cache misère du déficit.
In fine, cette opération risque de mettre le département de Benchaaboun devant un dilemme inextricable : veiller aux intérêts de la CMR ou de l’Etat ? Ceci en concédant que dans des pays développés, le recours aux PPP et aux financements innovants pour soulager le budget de l'Etat, est une opération banale.  

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