Boissons et cigarettes: le marquage fiscal coûtera moins cher dès 2020

Pour le renouvellement du contrat de marquage fiscal des produits soumis à la TIC (hors carburants), la Douane exige une baisse des prix, un transfert de technologie et la production des vignettes localement… Des avancées qui permettront à l’Etat, aux opérateurs et aux consommateurs de sortir gagnants.

Boissons et cigarettes: le marquage fiscal coûtera moins cher dès 2020

Le 19 juillet 2019 à 16h11

Modifié 11 avril 2021 à 2h43

Pour le renouvellement du contrat de marquage fiscal des produits soumis à la TIC (hors carburants), la Douane exige une baisse des prix, un transfert de technologie et la production des vignettes localement… Des avancées qui permettront à l’Etat, aux opérateurs et aux consommateurs de sortir gagnants.

Le Système Automatisé de Marquage Intégré en Douane (SAMID) boucle ses dix ans en 2019. Cette date marque aussi la fin du contrat qui lie l’Administration des douanes et impôts indirects (ADII) à son prestataire, le Suisse Sicpa qui a remporté ce marché en 2010.

Ce système, plus connu sous l’appellation de marquage fiscal, permet à l’administration de contrôler la production et l’importation des boissons alcoolisées et non alcoolisées et du tabac manufacturé, soumis à la taxe intérieure de consommation (TIC). Il permet aussi de différencier visuellement des produits authentiques et légaux des produits contrefaits ou de contrebande.

L’enjeu est majeur car, à travers ce système, la Douane connaît en temps réel et à distance, l’assiette imposable.

Son introduction en 2010 était une première qui ne s’est pas faite sans remous.

« En 2009, l’administration de la Douane a relancé le débat sur le marquage fiscal et proposé sa centralisation auprès d'elle et l’utilisation d'un seul type de marquage pour tous les produits concernés par la TIC. L’appel d’offres lancé, à l’époque, exigeait donc un marquage généralisé à travers une seule solution pour tous les types de produits concernés. Ce système devait être non intrusif. En d’autres termes, il fallait qu’il soit installé chez le producteur sans perturber son activité normale, tout en permettant à la Douane un accès et un contrôle à distance de l’assiette fiscale », nous explique une source autorisée auprès de la Douane.

Seuls deux opérateurs avaient répondu à l’appel : Inexto et Sicpa.

C’est l’opérateur suisse Sicpa qui revendique la position de leader mondial en matière de solutions et services d’authentification, d’identification et de traçabilité sécurisés, qui a remporté le marché pour une durée de 5 ans reconductible une fois, « car il avait l’offre la plus complète », nous dit-on.

Cela dit, les opérateurs concernés par le marquage fiscal se sont tous insurgés contre les prix pratiqués qu’ils jugeaient trop élevés. Un bras de fer a opposé les opérateurs à Sicpa et à la Douane qui s’est soldé en 2014 par une révision des prix à la baisse.

« Lors de la reconduction du contrat en 2014, une baisse d’environ 20% des prix a été consentie, en plus de l’implémentation de nouvelles technologies », nous assure une source à la Douane.

Après révision des prix, Sicpa réalisait selon nos calculs un chiffre d’affaires annuel moyen de 430 MDH.

Des prix encore plus bas

Ainsi, quand la Douane a lancé en juin dernier un nouvel appel à la concurrence pour la sélection du prochain prestataire qui perpétuera le système de marquage fiscal, la question du prix est la première qui concentre les débats.

« Dans l’absolu, chaque opérateur ou consommateur est dans le droit d’exiger une baisse des prix… Cela dit, pour le cas du marquage fiscal qui existait sous une forme différente avant l'arrivée de Sicpa, les prix payés après 2010 ne sont pas forcément plus chers que ce qu’ils payaient avant », commente notre source la Douane.

« Néanmoins, le débat des prix reste légitime, et la Douane a pour mission d'assurer les prix les plus bas, donc nous avons inclus dans ce nouveau cahier des charges, une obligation de baisse des prix », nous confie notre source.

Cette obligation de baisse des prix s’est manifestée par la fixation d’un prix maximum, mentionné dans le cahier de charges plus bas de 10% que les tarifs actuels.

Médias24 a réussi à obtenir les tarifs maximums proposés par l’ADII pour chaque type de produits :

Les producteurs et importateurs de ces produits, obnubilés par le coût du marquage fiscal, sont désormais assurés de payer un tarif moindre que celui cité dans ce tableau.

« C’est une avancée importante. La Douane a eu le mérite d’intégrer dans le nouveau cahier des charges une garantie de baisse des prix. Les prix actuels sont hors contexte, donc les opérateurs sont perdants, l’Etat et le consommateur également… », nous confie un opérateur dont les produits sont concernés par le marquage fiscal.

Il est vrai que les opérateurs ne sont pas tous égaux face au coût du marquage fiscal car pour une même prestation, le tarif varie d’un secteur à un autre comme on peut le constater au niveau du tableau ci-dessus. Cela dit, la baisse bénéficiera à tout le monde.

Selon nos calculs, pour 10% en moins, les opérateurs, tous secteurs confondus, économiseraient environ 43 MDH par an, en prenant en compte les quantités vendues historiquement.

C’est une économie annuelle d’au moins 4,96 MDH pour les producteurs/importateurs de bières par exemple. Elle est de 27,6 MDH pour les opérateurs de tabacs.

Pourquoi cette distinction par type de produits ? « L'application de tarifs différents en fonction des produits émane d'un choix de la Douane qui tient compte du produit, l’usage de consommation et du prix », nous explique-t-on auprès de l’ADII.

« Le producteur inclut le coût du marquage dans son prix de vente. Ce coût allait être le même pour des produits différents avec des prix différents. Le prix d'une bouteille d'eau n'est pas le même que celui d'une bouteille de vin par exemple... Pour y remédier nous avons pensé un système de péréquation qui permet de résoudre cette problématique », ajoute notre source.

« Rien n'interdit au futur prestataire de proposer un prix unique, mais ce prix ne doit pas dépasser le plafond fixé dans le cahier des charges », précise-t-elle.

Une usine de vignettes et un centre d’excellence

Rien n’est donc figé pourvu que les prix restent en dessous des plafonds fixés. L’ADII compte sur le jeu de la concurrence pour faire baisser les prix davantage, d’autant plus qu’en plus de la garantie de la baisse, l’administration a relevé la barre de ses exigences.

Plusieurs nouveautés de taille sont contenues dans le nouveau cahier des charges.

Le futur prestataire doit créer de la valeur ajoutée localement. Il lui est donc demandé la production des marques fiscales au Maroc par la mise en place d’une usine dédiée.  Il doit « fournir pour chaque article un descriptif détaillé de l’investissement envisagé dans ce sens », peut-on lire sur le cahier des charges.

Pendant ces 10 dernières années, Sicpa n’a jamais réussi à produire localement les marques fiscales. Il les importait.

Le cahier des charges exige aussi du futur prestataire de faire du Maroc un hub pour l’Afrique. Il lui est également demandé d’installer un centre d’excellence pour développer les solutions futures.

Le nouveau contrat introduit aussi pour la première fois la notion de triple traçabilité. « Jusqu’à présent, il n'y avait que la douane qui pouvait contrôler le marquage. Dans le nouveau contrat, on a exigé du prestataire la mise en place d’un marquage visible pour le consommateur afin que ce dernier puisse vérifier l’authenticité du produit à travers une application. Les producteurs aussi auront la possibilité de lire certaines informations contenues dans les vignettes », nous explique notre source à la Douane.

« Sur le plan technique, nous exigeons du futur prestataire que la solution à implémenter soit basée sur une technologie récente (à l’état de l’art) y compris en ce qui concerne les appareils d’audit et de lecture des codes visibles et invisibles », ajoute-t-elle.

Des prix plus bas, une usine et un centre d’excellence en plus. Est-ce possible ? Si c’est le cas pourquoi donc n’a-t-on pas eu ces exigences, 10 ans plus tôt ?

« Il est bien sûr possible de concilier la baisse des prix avec les exigences de valeur ajoutée locale car nous sommes sur un secteur industriel. Dans l’apprentissage, nous avons compris que la traçabilité est un nouveau métier en émergence. Le futur prestataire peut capitaliser sur ces investissements pour une diversification vers de nouveaux secteurs, de nouveaux marchés… à condition d'utiliser des solutions différentes de celle implémentée pour le compte de la Douane », nous explique-t-on.

Ces changements majeurs dans le cahier des charges sont certes le résultat d’une courbe d’apprentissage légitime, mais ils sont également interprétés par les acteurs du marché comme une « correction de certaines incohérences ». 

Sicpa bousculé sur son marché

Si l’ADII n’a pas pu se prononcer sur l’attrait de ce marché lancé en juin, des sources nous ont assuré qu’au moins 13 acteurs ont retiré les dossiers.

Le retrait du dossier, mis gratuitement à la disposition des opérateurs intéressés, ne veut aucunement signifier qu’il sera obligatoirement suivi d’un dépôt de candidature. 

Il renseigne sur l’intérêt que le marché suscite. Selon des informations que nous n’avons pas pu confirmer auprès de la Douane, parmi les opérateurs qui ont manifesté leur intérêt il y aurait les Français Atos et Inexto, le Britannique DeLaRue, l'Allemand SAP, une société basée à Dubaï et même des opérateurs marocains. Et il y a bien évidemment Sicpa, l’actuel détenteur du marché.

Quelques jours seulement après le lancement de l’appel à concurrence, l’opérateur s’est fendu d’un communiqué ne laissant planer aucun doute sur son intention de postuler à nouveau pour ce marché, malgré toutes les nouvelles exigences de la Douane.

« Sicpa Maroc confirme avoir pris note de l'appel d'offres lancé par l'Administration des douanes et impôts indirects (ADII). (…) La société a à cœur de fournir les meilleures solutions dans ces domaines, faisant de l'innovation constante et d'une expérience industrielle forte des atouts majeurs pour répondre à ces défis importants », peut-on lire dans le communiqué qui cite les propos d'Eric Besson, Président de Sicpa Maroc, nommé à ce poste quelques mois auparavant.

« Nous aurons donc à cœur de proposer une solution qui réponde à ces nouveaux enjeux, tout en offrant un rapport coût/efficacité encore amélioré, forte du travail de nos chercheurs et ingénieurs, dont une grande partie sont désormais regroupés à Casablanca. Nous ne doutons pas enfin que nos années d'expérience au Maroc, notre connaissance du terrain ici et sur le continent, ne pourront que faciliter le déploiement efficace d'une solution renouvelée et renforcée », ajoute-t-il.

L’entreprise suisse ne compte donc pas lâcher ce marché, même si l’ADII promet moins de bénéfices et plus d’investissements engagés localement pour une durée de 5 ans non reconductible… Preuve, s’il en faut une, que c’est un secteur dont la rentabilité n’est pas à démontrer.

Cela dit, si la société Sicpa veut se maintenir en place, elle devra faire face à la concurrence et faire une proposition agressive. Selon les échos du marché, « le prix sera le facteur déterminant car les opérateurs sont presque tous égaux sur le plan de la technologie ». Certains acteurs veulent, par conséquent, faire du prix leur cheval de bataille et travaillent sur des propositions de tarifs de 50% moins cher que les prix pratiqués actuellement. 

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