Croissance: la vision (très) keynésienne des économistes d'Attijariwafa bank

Les économistes d'Attijariwafa bank font une lecture critique de la politique économique menée par l’Exécutif. Une politique jugée conservatrice, ne permettant pas une accélération du rythme de croissance. Ils recommandent ainsi plus d’audace et prônent une politique plus expansionniste, tout en assumant une éventuelle aggravation du déficit budgétaire et de l’endettement public.

Croissance: la vision (très) keynésienne des économistes d'Attijariwafa bank

Le 14 février 2019 à 12h22

Modifié 11 avril 2021 à 2h39

Les économistes d'Attijariwafa bank font une lecture critique de la politique économique menée par l’Exécutif. Une politique jugée conservatrice, ne permettant pas une accélération du rythme de croissance. Ils recommandent ainsi plus d’audace et prônent une politique plus expansionniste, tout en assumant une éventuelle aggravation du déficit budgétaire et de l’endettement public.

L'étude est produite par Attijari Global Research, la filiale recherche du groupe bancaire. 

Imprégnée d’un esprit de gauche, très keynésien, elle rappelle plus les positions du socialiste Ahmed Lahlimi que des banquiers en col blanc, souvent alignés sur la doctrine ultralibéral du FMI et de la Banque mondiale. 

Des institutions qui font de la stabilité macroéconomique et monétaire un impératif qui passe avant toute recherche d’un compromis social. 

>> Lire aussi : 

- Document. La lettre de Benchaâboun et Jouahri à Christine Lagarde

- Les engagements du Maroc vis-à-vis du FMI sont-ils tous pertinents ? 

Brossant un tableau des indicateurs économiques et des prévisions pour les deux prochaines années, les économistes du groupe Attijari se posent ainsi la question de savoir si l’accélération de la croissance ne devrait pas être le nouvel enjeu central de l’économie marocaine. 

Ils partent d’un constat simple, qui fait l’unanimité dans les cercles économiques et politiques: la décélération du rythme de croissance

Entre 2014 et 2018, la progression du PIB ressort à peine à 3,4%. Une tendance qui devra se poursuivre sur les deux prochaines années selon le consensus des marchés. Ce rythme est non seulement très lent pour un pays comme le Maroc, mais est inférieur à la croissance mondiale (3,5%) et est en deçà du rythme de croissance observé chez les pays émergents (4,5 à 5%). 

« Intrinsèquement, le Maroc pourrait aspirer à une croissance plus forte. Une étude de Bank Al-Maghrib a fait état d’une croissance potentielle d’environ 4%-4,6% durant la période 2000-2016 contre une réalisation moyenne de 3,9% », note le document de recherche.

« Nous pensons que le Maroc ne se suffirait pas de ce nouveau pallier de progression économique. Une croissance atone signifie sur le plan social une pression sur la courbe de chômage et une persistance des disparités qui pourraient peser sur le climat social », écrivent les économistes d’Attijari.

Et d’ajouter : « Sur le plan financier, une dynamique plus forte de croissance est requise pour accompagner les efforts réalisés en matière de l’amélioration de l’environnement des affaires pour l’attrait des IDE. De même, sur le registre de l’endettement public, une dilution de l’encours de la dette passe forcément par une croissance économique plus vigoureuse ».

Les économistes du groupe bancaire appellent donc l’exécutif à plus « d’audace économique » et à une politique économique « moins conservatrice ». Quitte à puiser dans le levier de la dette pour financer l’éventuel creusement du déficit que cet expansionnisme économique suppose.

Un avis qu’ils appuient par deux principaux arguments : 

1. Au Maroc, la dette ne représente pas un risque spécifique. Le défi des finances publiques relève davantage de l’accélération des recettes que de la maîtrise des dépenses. Sur ce dernier volet, l’exercice budgétaire promet d’être plus serré à l’avenir.

« Dans ce contexte, nous pensons qu’une politique plus expansionniste propice à une croissance plus forte constitue une piste sérieuse de réflexion », estiment les auteurs de l’étude.

2. L’encours actuel de la dette ne s’écarte pas de ses comparables. De même, la gestion active de cette dette et la baisse de son coût unitaire ont permis de contrebalancer la hausse de son stock. Le Trésor ne devrait éprouver donc aucune difficulté à réaliser de nouveaux tirages aussi bien sur le marché international qu’au niveau de son recours traditionnel local…

« A notre avis, l’endettement ne constituerait pas spécifiquement un frein pour une politique plus expansionniste et accélératrice à la croissance ».

Un changement de cap qui n’est pas à chercher dans la loi de finances 2019, qui selon les auteurs de l’étude, « fixe principalement comme priorité la préservation des acquis », et « écarte toute action de rupture ».

Cet avis sur les choix de politique économique du pays colle parfaitement aux critiques et recommandations émises par le Haut commissaire au Plan lors de sa dernière sortie médiatique. Une sortie où Lahlimi a appelé le gouvernement et la Banque centrale à lâcher le déficit budgétaire et l’inflation pour rompre avec les cycles lents de croissance. 

>> Lire à ce sujet : Voici ce que propose Lahlimi pour relancer la croissance

Un avis que partage également l’économiste de gauche et ex-ministre de l’alternance Said Saadi, mais qui a été vivement critiqué par l’économiste Youssef Saadani. 

Pour ce dernier, le déficit budgétaire et le niveau d’endettement actuel ne permettent pas une politique de soutien à la demande. Pour accélérer la croissance, l’économiste en chef de la CDG prône plutôt une politique économique centrée sur le soutien à l’offre et au secteur privé.

Un débat très instructif que viennent d’enrichir les économistes du groupe Attijariwafa bank par cette recherche au ton audacieux. Un exercice salutaire en ces temps de silence généralisé des élites.

>> Lire le débat Said Saadi-Youssef Saadani : Faut-il lâcher l’inflation et le déficit budgétaire pour booster la croissance ?

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