Faut-il retirer la gestion du TGV à l’ONCF?

Le récent accident de train de l’ONCF, survenu le 16 octobre 2018 et ayant causé 7 morts et 126 blessés, relance le débat sur la capacité de l’Office à assurer une bonne gestion du TGV dont le lancement est prévu d’ici la fin de l’année. La grande vitesse ferroviaire exige un haut niveau de conformité pour garantir la sécurité des passagers et une qualité de service optimale. L'ONCF sera-t-il à la hauteur ? Faut-il envisager des alternatives ?

Faut-il retirer la gestion du TGV à l’ONCF?

Le 19 octobre 2018 à 13h44

Modifié 11 avril 2021 à 2h49

Le récent accident de train de l’ONCF, survenu le 16 octobre 2018 et ayant causé 7 morts et 126 blessés, relance le débat sur la capacité de l’Office à assurer une bonne gestion du TGV dont le lancement est prévu d’ici la fin de l’année. La grande vitesse ferroviaire exige un haut niveau de conformité pour garantir la sécurité des passagers et une qualité de service optimale. L'ONCF sera-t-il à la hauteur ? Faut-il envisager des alternatives ?

Le drame de Bouknadel n’est pas un cas isolé. L’ONCF a connu une série d’accidents de trains au cours des dernières années : février 2018 à Tanger, janvier 2018 à Casablanca, août 2014 à Zenata, septembre 1993 à Témara. Les circonstances diffèrent selon l’incident mais la responsabilité de l’Office ne peut être écartée dans tous ces cas.

La Cour des comptes a publié en avril 2017 un rapport accablant sur l’ONCF. Un nombre important de défaillances et de dysfonctionnements a été relevé: maintenance des infrastructures et du parc roulant, exécution des projets d’investissements dont certains relatifs à la sécurité…

>>Lire aussi: ONCF: Voici les innombrables défaillances relevées par la Cour des comptes en 2017

La mauvaise qualité de service est dénoncée presque quotidiennement par les passagers des trains, particulièrement ceux qui font la navette: retards réguliers des trains, saleté, problèmes de climatisation, voitures surchargées et passagers voyageant debout…

Avec toutes ces lacunes, l’ONCF s’est vu confier la mise en place et la gestion de la ligne à grande vitesse (LGV), dont l’ouverture est programmée pour fin 2018. Avec l’accident de Bouknadel, on ne sait pas si l’inauguration sera maintenue à cette échéance. Un confrère avait annoncé une visite d’Emmanuel Macron le 15 novembre à Tanger pour la cérémonie de lancement du TGV, mais la date n'est pas encore fixée.

Le chantier du TGV a connu un retard important

Le chantier de la LGV dure depuis 2007, date de signature du premier protocole d’accord. Les travaux n’ont démarré que 4 ans plus tard (fin septembre 2011). Le lancement du TGV, prévu initialement en 2015, a été reporté à plusieurs reprises. Rien que cette année, il a été annoncé pour le 1er trimestre, pour juin, pour le quatrième trimestre puis pour la fin d’année.

>>Lire aussi: La Ligne à Grande Vitesse (LGV) opérationnelle en juillet prochain?

En tous les cas, c’est la dernière ligne droite. La mise en service technique de la LGV a été opérée le 19 juin 2018 après des essais où le train avait atteint la vitesse commerciale (320 km/h) dans un premier temps puis le record africain (357 km/h) dans une seconde étape.

Mais après l’inauguration, l’ONCF sera-t-il en mesure d’assurer une bonne gestion du TGV? La question se pose après le drame de Bouknadel. Et elle mérite d’être posée compte tenu des dysfonctionnements relevés par la Cour des comptes et le ras-le-bol permanent des passagers contre la qualité de service de l’office.

Rappelons qu’en novembre 2017, pendant la période des tests du TGV, déjà un incident de manœuvre de la rame d’essai a causé son déraillement près de Larache.

La grande vitesse ferroviaire exige un haut niveau de conformité pour garantir la sécurité des passagers et une qualité de service optimale. Un TGV, c’est un peu la vitrine d’un pays, ce qu’il a de mieux à présenter aux citoyens et aux visiteurs. Si sa propreté et sa ponctualité ne sont pas assurées, c’est comme si le Maroc a dépensé 23 milliards de DH d’investissements pour rien. Idem pour la rigueur dans la sécurité, la maintenance, la planification.

Un TGV ce sont aussi des centaines de passagers par voyage qu’on déplace à 320 km/h. Le moindre incident technique, une maintenance programmée non réalisée dans les délais peut provoquer un accident beaucoup plus dramatique que celui de Bouknadel.

L'ONCF assure avoir adopté une nouvelle organisation et bien formé ses équipes

Répondant à une question de Médias24 en mai 2016, dans le cadre d’un colloque sur la grande vitesse ferroviaire, Mohamed Rabie Khlie, DG de l’ONCF avait assuré que le LGV assurera dès 2018 un train toutes les heures (15 départs quotidiens dans chaque sens) et des rames d’une capacité allant de 532 à 1.064 places.

Dans un communiqué daté de juillet 2018, l’office annonce avoir mis en place une nouvelle organisation opérationnelle. «L’élaboration des nouveaux référentiels et procédures nécessaires à l’exploitation de la LGV a été achevée, et plus de 600 collaborateurs ont été formés aux nouveaux métiers et techniques de la grande vitesse, à l’étranger d’une part, et au sein de l’Institut de Formation Ferroviaire (IFF) créé en partenariat avec la SNCF (Société nationale des chemins de fer français) à l’occasion de ce projet, d’autre part ».

«De même, outre les recrutements progressifs de profils ciblés, la préparation à l’exploitation a mobilisé un nombre important de cadres ONCF dans différents corps de métiers allant des études, de la conception, en passant par la réalisation des travaux, la conduite, la circulation, la vente, les services aux clients à bord et en gares, jusqu’au contrôle, sûreté des voyageurs et maintenance».

Confier la gestion et la maintenance à un privé?

Ces efforts permettront-ils à l’ONCF d’assurer une gestion du TGV diamétralement opposée à celle qu’il a toujours assurée dans le réseau traditionnel ? Les doutes sont permis, d’autant plus que même les grands opérateurs historiques de TGV n’échappent pas aux incidents.

Rien qu’en août 2018, un TGV de la SNCF a déraillé à Marseille, heureusement sans provoquer de dégâts humains. En 2015, lors des essais du TGV Est en Alsace, une rame d’essai de la SNCF a déraillé, causant la mort de 11 personnes. L’accident a donné lieu à des poursuites judiciaires contre l’opérateur public et ses employés.

Va-t-on vivre au Maroc des drames de TGV ? Ce dernier assurera-t-il un service de qualité ? Quelle solution pour réduire les risques? Changer le top management de l’ONCF ? Créer une filiale indépendante ? Confier l’exploitation et la maintenance à un opérateur privé ? Ces questions se posent désormais.

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