Presse écrite: Comment la Cour des comptes analyse les aides accordées au secteur

Les auditeurs de l’institution dirigée par Driss Jettou ont passé en revue le système de subventions octroyées par le ministère de la Communication au secteur de la presse. Voici ce qu’il en ressort.  

Presse écrite: Comment la Cour des comptes analyse les aides accordées au secteur

Le 2 septembre 2018 à 10h39

Modifié 11 avril 2021 à 2h48

Les auditeurs de l’institution dirigée par Driss Jettou ont passé en revue le système de subventions octroyées par le ministère de la Communication au secteur de la presse. Voici ce qu’il en ressort.  

La presse marocaine traverse une transition interminable. C'est le cas d'ailleurs un peu partout dans le monde.

Les deux vrais problèmes, si on devait les désigner, sont les suivants:

1-l'ancien modèle économique se meurt et il n'y a pas de modèle économique alternatif. La survie de la presse ne réside pas dans les aides publiques directes à des titres. Elle réside dans le modèle économique viable qui doit prendre forme sur le marché.

Hormis l'aide financière directe accordée à des journaux, la presse marocaine a d'abord vécu de deux types de ressources: le marché lecteurs et le marché publicitaire.

Le premier est rudement concurrencé par la transformation digitale qui rend la lecture gratuite, sauf exceptions.

Le second devient un champ de ruines car contrairement aux apparences, la publicité ne migre pas vers la presse marocaine en ligne. Elle migre vers l'étranger, vers Facebook et Google.

Les deux ressources essentielles de la presse marocaine sont en train de s'évaporer d'année en année, ne laissant que des miettes aux titres de presse (imprimée ou en ligne).

2-le secteur évolue très loin des règles du marché.

La Cour des comptes n'est pas allée jusqu'à faire ce diagnostic et c'est normal, car ce n'est pas son rôle. C'est le rôle du ministère de la Communication, qui ne dispose d'aucune stratégie ou vision pour le secteur et cela est vrai depuis de nombreuses années. L'institution a épinglé, à raison, le ministère sur ce point d'absence de stratégie, et la réponse de ce département, qui figure dans le rapport, n'est pas convaincante.

Le rapport annuel au titre des années 2016 et 2017 de la Cour des comptes consacre donc et c'est une première, un chapitre à l'analyse des aides à la presse.

Selon l’institution dirigée par Driss Jettou, il existe, à fin 2016, 243 titres de presse écrite dont 15 titres partisans, 59 titres régionaux et 169 supports indépendants. 

Elle ajoute «que ce secteur compte 500 sites d’information électronique recensés». 

Pour la Cour des comptes qui s’essaie à une analyse du secteur, la presse écrite fait face à des défis liés principalement à :

- Une baisse du volume de la diffusion des titres de presse passant de plus de 99 millions d’exemplaires en 2009 à 89 millions d’exemplaires en 2014; soit une baisse de plus de 10%. Selon les chiffres OJD, cette baisse s'est poursuivie et l'érosion semble inexorable. C'est une baisse mécanique, qui touche tout l'écosystème, et qui crée un cercle vicieux: moins d'imprimeries, moins de lecteurs, moins de points de distribution, moins de ventes, moins de publicité...

- Un glissement du lectorat vers les "médias électroniques" [en fait, la presse en ligne], bénéficiant ainsi du développement des nouvelles technologies de l’information. 

- "Une baisse de la part du marché en termes de recettes publicitaires au profit d’autres médias tels que la radio et l’affichage". 

"Le chiffre d’affaires publicitaire global de la presse écrite a enregistré une régression entre 2014 et 2015 passant de 981 millions DH à 973 millions DH, alors qu’il a connu une évolution notable pour la presse électronique passant de 34 millions DH à 49 millions DH sur la même période, soit une évolution de 44%", écrit la Cour des comptes. 

Ces différentes remarques sur le marché publicitaire ne sont pas assez précises. En fait, et en valeur absolue, les investissements publicitaires de la presse écrite s'évaporent vers les GAFA et en particulier Facebook et Google. L'évolution qualifiée de "notable" de la publicité dans la presse en ligne est au contraire extrêmement modeste, pour ne pas dire insignifiante. La vraie problématique, c'est que lorsque 100 DH quittent la presse imprimée, seuls 15 DH au maximum arrivent dans les presses digitales. Le reste va vers les Gafa ou les sites de petites annonces etc..

Pas de stratégie et une étude inachevée sans explications

Les magistrats de la Cour reprochent au ministère de la Communication, l’absence d’études sur le secteur car «la définition d’une stratégie adaptée au contexte, en perpétuel changement, du secteur de la presse écrite et électronique» ne peut se faire qu’après la réalisation «d’un état des lieux et un diagnostic afin d’appréhender les difficultés que traverse le secteur de la presse et de comprendre le comportement et les attentes du lectorat».

Une mission qui relève du département de la Communication qui a tenté de l'effectuer en 2009 en lançant un appel d’offres dont l’objet est la réalisation d’une étude sur le développement du secteur de la presse écrite. 

«Cette étude a été confiée au cabinet KPMG pour un montant global de 5 millions DH et se décline en 4 missions : Or, la Cour des comptes a constaté, en date du 31/12/2016, que seule la mission 1 a été réceptionnée en date du 05/05/2010 et payée le 02/11/2010 pour un montant de 345 000 DH. La mission 2 n’a pas abouti à des conclusions concrètes, et les missions 3 et 4 n’ont pas été réalisées», assure la Cour des comptes qui signale que le reliquat des crédits a été annulé en 2013. Aucune explication n’a été fournie par le ministère sur les raisons du non achèvement de cette étude. 

Sur ce volet, le ministère de la Communication explique dans sa réponse à la Cour que l'étude "n’a pas pu aboutir pour des raisons techniques, et seule la mission n° 1 a été réceptionnée en date du 05/05/2010. Quant à la mission n° 2 elle a été livrée mais pas validée, pour non-conformité aux conditions requises". 

Pour sa défense, le département dirigé par Mustapha El Khalfi jusqu'en octobre 2016, avance que plusieurs journées d’étude ont été organisées, notamment après l’entrée en scène de la presse électronique, ayant fait l’objet d’un livre blanc en 2013. Il brandit la réalisation en 2016 d'une étude sectorielle par la Fédération marocaine des éditeurs de journaux, avec le soutien et l’accompagnement du ministère de la Communication. 

Le département ajoute qu'il envisage la réalisation de quatre études concernant les domaines suivants :

- La distribution de la presse papier ; 

- Le modèle économique de l’entreprise de presse papier et électronique ; 

- L’éthique et la déontologie journalistiques ; 

- Les ressources humaines employées par le secteur de la presse écrite. 

Et il a promis à la Cour l'organisation en mai 2018 de la troisième journée d’étude sur la presse numérique. A noter qu'à fin août 2018, cette journée n'a pas eu lieu. 

La Cour des comptes note l’absence d’un document déclinant la stratégie du ministère chargé de la communication sur la période 2005-2016, retraçant sa vision relative au secteur de la presse sur une longue durée ainsi que les objectifs, détaillés en projets individualisés par axe stratégique sur un échéancier bien défini. 

L’institution estime que le département de la communication devait doter le secteur d’une stratégie avec des indicateurs chiffrés qui assurent un suivi permanent et permettant de prendre les mesures correctives adéquates au temps opportun afin de réaliser les objectifs fixés. 

Un point de vue que ne partage pas le département de la Communication qui estime que "l'absence d’un document portant entièrement et exclusivement sur la stratégie du ministère pour la période 2005-2016"  ne veut pas dire qu'il y a "absence de stratégie". Il avance "une véritable stratégie mise en place pour la période 2012-2016, de laquelle ont découlé 5 enjeux, et 7 outils pour sa mise en œuvre, et des objectifs ont été fixés, assortis d’indicateurs bien précis". Et d'ajouter, "la même démarche a été adoptée pour la période 2017-2021, avec une stratégie qui repose sur une vision ambitieuse de consolider la liberté et l’indépendance de la presse et le renforcement de ses infrastructures". 

Pour le ministère, "les stratégies sont souvent éparpillées dans divers documents exposés devant les deux chambres du parlement à l’occasion de la présentation du budget". 

Pas d’évaluation des contrats-programmes 

La Cour des comptes s’intéresse également à l’évaluation des aides accordées au secteur par l’Etat. 

Le ministère de la Communication est lié depuis 2005 au secteur par deux contrats-programmes (2005-2009, 2014-2019) signés avec l’association professionnelle la plus représentative du secteur de la presse à savoir la Fédération marocaine des éditeurs de journaux(FMEJ) pour la mise à niveau du secteur. 

Ces contrats-programmes comprennent des subventions accordées aux organes de presse. A fin 2016, le rapport avance que 87 titres dont 7 appartenant à la presse électronique ont bénéficié des aides directes destinées à contribuer au financement de certaines dépenses. 

Entre 2005 à 2016, l’effort financier de l’Etat totalise près de 659 millions dirhams, assure le rapport. 

Les magistrats estiment que malgré l’importance des fonds mobilisés, « il y a lieu de noter que plusieurs titres ont connu des difficultés. Cela se manifeste par des contraintes d’ordre financier liées à des arriérés au titre des impôts (DGI) ou de la sécurité sociale (CNSS), du contentieux devant la justice, ainsi que la non régularité ou même l’arrêt de parution ». 

La Cour des comptes émet plusieurs remarques : 

- Faible articulation entre les objectifs visés dans les contrats-programmes et les actions financées par les aides. Les objectifs visent principalement, la modernisation des entreprises de presse ainsi que le développement d’un modèle économique viable. Or, il est constaté que les aides octroyées aux entreprises de presse financent généralement, des charges de fonctionnement.

- Les aides accordées financent des actions non prévues aux contrats programmes. 

- Mise en place tardive du contrat-programme 2014-2019. 

- La mise en application partielle et simultanée, pour la période 2013-2014, de deux contrats-programmes. Les parties contractantes ont signé en novembre 2009 un avenant visant la prorogation du contrat-programme 2005-2009 jusqu’à la conclusion du nouveau contrat-programme 2014-2019 qui n’est intervenue qu’en date du 31 juillet 2015. Entre-temps, un projet de contrat-programme 2013-2017 a été adopté en mars 2013.

- Absence de conventions individualisées avec les entreprises bénéficiaires de l’aide publique. 

- Non réalisation de plusieurs actions prévues par les deux contrats-programmes. Il s’agit notamment des actions portant sur l’organisation professionnelle de la Presse, la signature de la convention de mise à niveau des entreprises de presse écrite, la formation professionnelle et le développement des compétences, l’adoption du règlement intérieur et du code déontologique des membres de la commission paritaire.

- En plus des engagements non encore réalisés du ministère chargé de la Communication tels que l’adoption d’un cadre légal de la commission paritaire et l’élaboration d’une loi sur la publicité et les modalités de répartition des annonces légales, judiciaires et administratives. 

- Absence de l’évaluation de l’exécution du contrat-programme. Depuis l’entrée en vigueur du premier contrat-programme en 2005, aucune évaluation n’a été réalisée par le ministère de la Communication. 

- Non mise en place de structures prévues par les contrats-programmes. Il s’agit en particulier de la mise en place de la commission de diffusion de la presse chargée de l’étude des moyens d’amélioration des conditions de diffusion de la presse, et de la commission de la fiscalité chargée d’étudier les questions et mesures relatives aux aspects fiscaux du secteur de la presse.

Le ministère a tenté de répondre aux remarques par les éléments suivants  :

- Les aides octroyées financent une partie des charges de production, comme prévu par le contrat-programme (40 % pour les entreprises de presse nationales- jusqu'à 60% pour la presse régionale et électronique). Les cas d’affectation de l’aide pour le paiement des arriérés en matière d'impôts et de CNSS, sont exceptionnels, mais tolérés car sans cette initiative, plusieurs titres seraient privés du numéro de la commission paritaire. En absence de cette souplesse, un arrêt d’activité serait quasi inévitable, ce qui est contraire à l’objectif final des contrats-programmes.

- Il a été légalement fait recours aux deux contrats-programmes 2005-2009 et 2013- 2017 pour la période 2013-2014, et il ne s’agit pas de contradiction ou de chevauchement. Le département brandit l'article 4 du contrat-programme 2005-2009 : « dans l’attente du parachèvement des mesures relatives au présent contrat-programme, il est possible en cas de nécessité d’appliquer les dispositions du précédent contrat-programme, pour la gestion des aides au titre de l’année 2013 par la commission paritaire qui a exécuté la subvention de 2012 ». Le ministère a veillé au strict respect de cette disposition et l'a maintenue jusqu’à la mise en application du contrat-programme 2014-2019 après à sa signature le 31/07/2014. 

- Pour l'absence des conventions individualisées avec les entreprises et les bénéficiaires de l’aide publique. Le ministère avance que le contrat-programme revêt un caractère contractuel et contraignant. Il précise les droits et engagements des différentes parties. Il appartient aux représentants du gouvernement et des éditeurs au sein de la commission paritaire de veiller à leur respect, chacun en ce qui le concerne.

- Quant à la non réalisation de plusieurs actions des contrats-programmes, le ministère rappelle la loi 90-13 portant création du Conseil national de la presse qui a été adoptée en 2016. 

- Le département de la Communication est en train d’élaborer un nouveau projet de décret, qui tend à réorganiser le domaine des annonces administratives et judiciaires et consolider les valeurs de la transparence et de l’équité, permettant ainsi à la presse électronique d’accéder au marché desdites annonces.

- Le ministère assure qu'ne évaluation de l’exécution du contrat-programme 2005-2009 a été réalisée par la Fédération marocaine des éditeurs de journaux en partenariat avec le ministère. Tout en étant conscient de l’importance de l’évaluation proprement dite à mi-parcours et à la fin de l’exécution des contrats-programmes, le ministère fait appel à plusieurs moyens à sa disposition pour une évaluation quoique partielle de la situation. 

- Quant à la l’absence d’indicateurs chiffrés dans les dispositions du contrat-programme, elle s’explique par le caractère précis et détaillé des aides accordées ainsi que par les objectifs fixés qui sont quantifiables et mesurables et donc vérifiables, assure le ministère de la Communication.

Procédure d’octroi des aides publiques à la presse

Par ailleurs, les magistrats se sont penchés sur la procédure de répartition des aides aux entreprises de presse. Ils expliquent que les contrats-programmes ont institué des commissions chargées de statuer sur les aides publiques en se basant sur un ensemble de critères.

Les opérateurs éligibles aux aides publiques sont ainsi classés par catégories selon le volume des tirages, le coût de production, la masse salariale et la fréquence de publication du journal (quotidien, hebdomadaire, mensuel et régional). Or, « ces bases de classification restent hétérogènes et ne permettent pas de classer un titre dans une même catégorie pour les critères relatifs au coût de production, volume des tirages et la masse salariale ».

En d’autres termes, un titre de presse classé en première catégorie selon le coût de production ne l’est pas selon le critère du volume de tirage ou celui de la masse salariale.

Pour la Cour, le critère relatif au volume des tirages est non fiable. La comparaison du volume des tirages et de celui des ventes a montré une grande différence entre ces deux indicateurs. En effet, les ventes représentent dans certains cas en moyenne 48%, 35% et 29% du total des tirages durant la période allant de 2010 à 2015. Les titres de presse ayant un volume de tirages élevé bénéficient des parts les plus importantes des aides.

Autre remarque, le critère portant sur le coût de production est ambigu. « Le coût de production retenu pour le calcul de l’aide publique n’est que l’addition du coût d’acquisition du papier et celui d’impression, alors que selon l’article 4 du contrat-programme, le coût de production comprend aussi le coût du transport et de la distribution, le coût de la formation des journalistes, la grille des salaires appliqués, le nombre de bureaux ouverts hors du siège social et le nombre de journalistes employés », laisse savoir la Cour des comptes.

Le rapport soulève aussi que « des entreprises de presse disposant de plusieurs titres de presse et bien qu’elles disposent de titres de presse qui ne sont pas éligibles aux aides publiques, elles communiquent un coût d’impression intégrant la globalité des charges fixes ».

Le rapport note aussi que les fonds reçus des entreprises de presse œuvrant pour le compte des partis politiques destinés à couvrir les dépenses de fonctionnement (acquisition du papier, impression etc.) ne sont pas pris en compte parmi les critères d’octroi des aides publiques.

La Cour estime aussi que les critères ne sont pas clairs pour des aides complémentaires ou exceptionnelles.

Sur ces reproches, le département de la Communication apporte plusieurs réponses : 

- Pour le ministère, les critères introduits par les contrats-programmes sont objectifs, concrets, mesurables, vérifiables et font l’objet d’un consensus entre le ministère et la Fédération marocaine des éditeurs de journaux et de la satisfaction des professionnels. Ils ont démontré une très grande efficacité dans une attribution juste et équitable et transparente des aides.

- Le premier critère pour l’octroi de la subvention est le niveau du tirage, qui est la preuve concrète et objective des dépenses engagées et de l’effort d’investissement de l’entreprise. Viennent en suite les autres critères essentiels, qui sont le coût de production, la masse salariale et le coût d’impression. Les montants des aides sont fixés après délibération de la commission et tiennent compte de plusieurs autres paramètres dont notamment le volume des ventes, la périodicité de publication, le coût de distribution et de transport et le nombre de pages. 

- La précision du coût de production peut être un peu complexe quand il s’agit d’entreprises ayant plus d’un titre, dans la mesure où il est difficile de désassocier ou décomposer la chaine de production par titre de presse, comme par exemple la masse salariale qui est retenue pour chaque titre, alors qu’il s’agit d’une seule masse pour tous les titres. Afin d’éviter cette situation dans l’avenir, le département de la Communication compte réduire le nombre d’organes de presse bénéficiaires par entreprise et fixer des plafonds.

- Malgré le risque que les partis politiques puissent affecter une part des subventions publiques dont ils sont bénéficiaires en tant que partis à leurs organes de presse, il serait difficile pour la commission actuellement de vérifier avec précision si cette part a été consacrée à des dépenses relevant de la production. Ainsi, le ministère veillera à demander dans le futur aux supports de la presse partisane de prouver par les moyens adéquats qu’ils ne bénéficient pas doublement de la subvention publique pour la même dépense.

- La demande de l’aide complémentaire doit répondre aux objectifs et conditions requises, qui sont clairs et bien définis. Elle ne dépend pas uniquement du fait d’être détenteur du numéro de la commission, malgré son importance. 

- Le Département avait proposé depuis 2013 un décret portant sur les conditions et les critères d’octroi des subventions. Cette proposition a été rejetée faute de soubassement juridique valable. Il a fallu attendre l’adoption de la loi 88.13 relative à la presse et à l’édition en août 2016 pour que ladite disposition soit prise en charge au niveau de l’article 7 de ce texte, qui fait de l’aide publique à la presse écrite une obligation de l’Etat. Dès lors, le ministère a élaboré un projet de décret conjointement signé par les ministres des Finances et de la Communication en fin de mandat, et qui fait actuellement l’objet d’une refonte en vue de le soumettre pour approbation.

Nombre limité de bénéficiaires

Pour les auditeurs, « certaines entreprises cumulent des aides en fonction du nombre des titres de presse ». En 2015, la part des aides de quatre sociétés est de l’ordre de 13,57 millions DH, soit 22% du total des émissions des aides directes.

« Ce constat est révélateur d’un risque de limitation des bénéficiaires des aides de l’Etat, sachant que le secteur de la presse compte plus de 488 titres de presse et 250 sites d’information à caractère général éligibles à l’octroi de ces aides », conclut le rapport.

En plus de cet état de fait, la Cour note que « la commission paritaire a procédé à l’augmentation du soutien accordé en 2012 au profit de certains titres suite aux demandes de révision reçues de ces derniers, sans que cela ne soit prévu dans le contrat-programme et ne fasse l’objet d’un avenant ».

Sur ce point, le département de la Communication affirme que les demandes d’aides multiples sont légales du point de vue réglementaire, du moment que les titres remplissant les conditions nécessaires ont le droit de bénéficier de l’aide. Cela dit, le ministère tend à fixer un plafond pour le nombre de titres appartenant à la même entreprise pouvant bénéficier du soutien, et cela est susceptible de mettre fin à la situation de cumul dans l’avenir.

Fait grave, la Cour des comptes note que la commission paritaire a accordé le soutien à un titre qui a cessé de paraître en juillet 2009, alors que la commission a décidé en date du 26/10/2009 de lui accorder un soutien pour les 7 premiers mois de 2009 d’un montant de 600 000 dirhams.

Un autre problème dans la procédure d’octroi des aides, entache cette fois-ci la commission paritaire de la presse. « Il est noté que bien que le quorum ait été atteint lors des réunions de la commission paritaire, le principe de « la parité » faisait défaut. En effet, en raison de l’absence répétée des représentants des autorités gouvernementales, et même de leurs suppléants dans plusieurs cas, on note une prédominance des représentants de la FMEJ dans les réunions de la commission paritaire », explique la Cour dans son rapport.

Pour le ministère, le problème de parité ne se pose pas. "Les représentants des autorités gouvernementales assistent aux réunions de la commission et même en cas d’absence de l’un de ces membres, la décision au sein de la commission n’est prise qu’après délibération et écoute des différents avis", assure le département. En plus, les représentants du gouvernement expriment tous le point de vue de la politique publique, et le font entendre, et par conséquent l’absence d’un membre n’a aucune incidence sur les décisions, car elles ne sont pas prises par vote. 

En plus, il n’existe pas de mécanismes du règlement des cas de conflit d’intérêts des membres de la commission paritaire.

Les recommandations de la Cour

A la fin de son évaluation, la Cour a émis les recommandations suivantes : 

- Formaliser la stratégie du ministère en matière de soutien à la presse écrite et la décliner en plan d’actions détaillé à réaliser selon un échéancier précis ; 

- Veiller à la réalisation et au suivi des études lancées ; 

- Mettre en place un cadre conventionnel individuel entre le ministère et les entreprises de presse bénéficiaires du soutien public ; 

- Veiller à l’établissement du règlement de la commission paritaire et du code déontologique de ses membres ; 

- Réaliser les actions pour lesquelles le ministère s’est engagé à exécuter et n’inscrire dans les contrats-programmes que les actions qui ont fait l’objet d’études préalables, en concertation avec les partenaires impliqués dans leur exécution ; 

- Veiller à la mise en place d’un mécanisme d’évaluation des contrats-programmes permettant de mesurer le degré de réalisation des objectifs fixés et d’entreprendre les mesures correctives en temps opportun ; 

- Prendre en considération le chiffre d’affaires réalisé en tant que critère d’octroi de l’aide ; 

- Reconsidérer le mode de calcul de l’aide octroyée à la presse écrite en prenant en considération les critères de la performance, du chiffre d’affaires réalisé ainsi que les autres aides dont certaines entreprises de presse sont susceptibles de bénéficier notamment la presse partisane ;

- Veiller à ce que tout changement des dispositions du contrat-programme soit opéré au moyen d’un avenant ; 

- Veiller au respect de la parité dans les réunions de la commission paritaire ; 

- Veiller au respect des dispositions des contrats-programmes relatives aux modalités d’examen des demandes de soutien public ; 

- Veiller au respect des dispositions des contrats-programmes relatives à la commission technique et à l’établissement des décisions de nomination des membres de cette commission ainsi que les PV de ses réunions.

 

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