Hamid Addou: “L'Open sky doit cibler les destinations touristiques, Casa doit être le hub de la RAM”

Douze ans après la signature de l’accord de l’Open sky qui a provoqué un afflux des compagnies lowcost au Maroc, la RAM s’estime de plus en plus menacée. Selon son président, le transporteur public ne pourra se développer sans "son" hub de Casablanca. C'est selon lui le cas de l’écrasante majorité des compagnies régulières mondiales. Cela pourrait se faire tout en maintenant le soutien au développement des lowcost, sur les destinations touristiques, mais en dehors du hub.

Hamid Addou: “L'Open sky doit cibler les destinations touristiques, Casa doit être le hub de la RAM”

Le 13 mars 2018 à 17h12

Modifié 13 mars 2018 à 17h12

Douze ans après la signature de l’accord de l’Open sky qui a provoqué un afflux des compagnies lowcost au Maroc, la RAM s’estime de plus en plus menacée. Selon son président, le transporteur public ne pourra se développer sans "son" hub de Casablanca. C'est selon lui le cas de l’écrasante majorité des compagnies régulières mondiales. Cela pourrait se faire tout en maintenant le soutien au développement des lowcost, sur les destinations touristiques, mais en dehors du hub.

Si l’ouverture croissante de nouvelles lignes aériennes par des compagnies étrangères lowcost est incontestablement une bonne nouvelle signant l’attractivité touristique du Maroc, il n’en demeure pas moins que pour l’unique opérateur aérien du pays, un afflux incontrôlé peut nuire à ses intérêts.

Rappelons que c’est la libéralisation du ciel marocain (accord de l’Open sky en 2006), autrefois quasi-monopole de la RAM, qui a été à l’origine de l’arrivée de nombreux nouveaux opérateurs au Maroc.

Joint par Médias24, le président de la RAM s’inquiète de plus en plus de la menace de cette nouvelle concurrence qui s’installe partout et surtout à l’aéroport Mohamed V de Casablanca.

Sans le hub de Casablanca, la RAM pourrait mettre la clé sous la porte

Notre interlocuteur pense, à titre personnel, que le Maroc devrait s’inspirer de la Tunisie qui vient d’intégrer l’Open Sky en décembre 2017 mais qui a choisi de protéger sa compagnie nationale en retirant le hub international de Tunis de cet accord.

"L’Open sky a été une excellente nouvelle pour notre tourisme. Il a permis de stimuler les arrivées, de manière très conséquente et au-delà des capacités intrinsèques de RAM.

"Néanmoins, force est de constater que cet accord a aussi détruit de la valeur sur des destinations moins touristiques (Casablanca), en attaquant RAM de manière frontale sur les routes que nous avions mis des décennies à développer.

"Le résultat est sans appel: des pertes sèches pour la RAM et un focus des lowcost sur Casa et Marrakech au détriment de toutes les autres destinations touristiques, très peu desservies (Ouarzazate, Essaouira, Errachidia, Fès, Tanger, Agadir, Al Hoceima…).

"La Tunisie a opté pour un Open sky ciblé et concentré sur les destinations touristiques, en excluant leur hub de Tunis. Pour eux, l’accord signé doit servir uniquement à stimuler les routes point par point, c'est-à-dire entre les villes européennes et leurs destinations touristiques.

"En procédant comme nos voisins, la RAM aurait ainsi pu se développer sur Casa et évoluer vers une masse critique, en termes de nombre d’avions, lui permettant de résister à une concurrence de plus en plus rude. Cela se serait aussi réalisé tout en focalisant le développement des routes lowcost sur les destinations touristiques, priorité nationale", explique le président.

Pour notre interlocuteur, un développement du hub via la compagnie nationale, n’est donc pas antinomique avec un Open sky "réfléchi", il est complémentaire et au bénéfice exclusif du tourisme.

"CDG pour Air France, Heathrow pour British, Dubaï pour Emirates, Madrid pour Iberia… sont autant d’exemples où le hub a été développé (et protégé) pour la compagnie nationale, d’autres aéroports "touristiques" étant dédiés aux lowcost et au développement du tourisme.

"Il est quasiment impossible pour une compagnie étrangère d’obtenir des slots à l’aéroport parisien de CDG, car Air France est protégée sur ce hub international. A Heathrow (Londres), la seule manière de le faire est de racheter une compagnie aérienne pour récupérer les slots qu’elle possède.

"Cela permet donc d’encourager les compagnies nationales, un des éléments de souveraineté d’un pays", précise notre interlocuteur.

Il est vrai que suite aux attentats de 2015 et à la baisse brutale des connexions aériennes sur le Maroc, la majorité des compagnies lowcost ont réduit fortement les fréquences sur les destinations touristiques. Casablanca s’est maintenue grâce à la compagnie nationale.

"Heureusement que RAM est bien présente à Casa, car avec le départ des lowcost après chaque crise économique ou acte terroriste, Casa ne serait plus desservie. Cela deviendrait un problème bien plus grand que les arrivées de touristes…. Pourquoi détruire la RAM à Casablanca sachant qu’elle y réalise plus de 50% de son chiffre d’affaires ?", s’interroge une autre source liée de près aux secteurs du tourisme et de l’aérien.

Compagnies nationales ayant périclité à cause d’un Open sky incontrôlé

Diverses expériences étrangères en matière d’Open sky donnent des enseignements intéressants, notamment plusieurs exemples de compagnies nationales dont l’activité a périclité à cause d’une ouverture incontrôlée.

"Quand la Belgique a ouvert brutalement l’aéroport de Bruxelles à l’Open sky, sa compagnie nationale Sabena a fait faillite. Idem pour Swissair qui a déposé le bilan avant d’être rachetée.

"Le transporteur public belge a dû changer de nom et n’a pu redémarrer son activité qu’après avoir pris des mesures de protection que l’Union européenne a validées.

"La compagnie italienne Alitalia est actuellement en quasi-faillite à cause de la concurrence féroce des lowcost qu’elle doit gérer sur le hub de Milan mais a contrario, l’activité aérienne de Lufthansa est florissante car cette compagnie allemande a protégé le hub international de Frankfurt.

"Il s’agit donc de trouver la bonne alchimie entre l’implantation des lowcost sur les destinations touristiques, et la préservation des intérêts des compagnies nationales.

"Au Maroc, la RAM n’a donc d’autre choix que de jouer le hub de la capitale économique, afin d’entamer un développement rapide de sa flotte, à même de mieux couvrir les destinations long courrier, les continents africains, américains et asiatiques et, de ce fait, de développer les connexions via son hub. C’est d’ailleurs le modèle actuel de toutes les grandes compagnies nationales comme Turkish, Air France, Iberia, Emirates, Qatar….

"Quant au tourisme, son développement passera par l’identification des destinations touristiques à grand potentiel et l’accompagnement des compagnies aériennes, RAM ou étrangères, en point à point, indépendamment de Casablanca et de la gestion des slots", conclut Addou.

 

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