Lorsque Benkirane traite le PAM de parti “satanique”

Les législatives de 2016 seront un choc frontal entre le PJD et le PAM et entre deux hommes, Abdelilah Benkirane et Ilyas Elomari. Verbatim et commentaire du dernier discours de Benkirane.

Lorsque Benkirane traite le PAM de parti “satanique”

Le 23 février 2016 à 13h50

Modifié 23 février 2016 à 13h50

Les législatives de 2016 seront un choc frontal entre le PJD et le PAM et entre deux hommes, Abdelilah Benkirane et Ilyas Elomari. Verbatim et commentaire du dernier discours de Benkirane.

Tandis que le  premier reste volubile et n’hésite pas à prendre la parole en public, puis à faire diffuser les vidéos, le second reste peu disert. Le célèbre communicateur français Jacques Séguéla conseillait à ses clients de la politique de ne jamais partir trop tôt avant les élections. L’avenir nous dira qui a tort et qui a raison.

Samedi 20 février, devant le comité central de la jeunesse de son parti, Benkirane a donné une longue conférence d’une heure trente environ (vidéo ci-dessous), dont le tiers a été consacré grosso modo à l’islam et au référentiel islamique du PJD et le reste à la passion de Benkirane, la politique.

>Sur l’Islam:

“C’est notre référentiel“. Le chef du PJD a souvent recours à l’argument religieux comme source de morale et de mobilisation. “Réformer est le projet des prophètes“, dit-il. “Notre référentiel islamique est le fondement de notre action“.

Il cite comme source Abdelkebir Alaoui Mdaghri, le critiquable ex-ministre des Affaires islamiques, pour affirmer qu’en 2003, après les attentats du 16 mai, “on voulait dissoudre le PJD et également, on a proposé d’assécher les sources de l’islam et de fermer Dar Al Hadit Al Hassania“.

En ce qui concerne la dissolution du PJD, il explique que c’est le Roi Mohammed VI qui s’est opposé à cette proposition. Mais pour ce qui est de “l’assèchement des sources de l’Islam“, il est impossible de croire, dans un pays qui s’appelle le Maroc et où le Roi est Amir Al Mouminine, que quelqu’un ait pu en faire la proposition.

>Sur la politique:

-Le PAM est une “terrible créature politique“. Il n'est pas comme les partis de l’administration qui l’ont précédé. Du coup, ces derniers partis reçoivent quelque éloge: “ils étaient indispensables pour créer un équilibre au sein de la société, à travers les notables“. D’ailleurs, des partis comme l’UC et le RNI étaient des “Oulad Ennass [fils de bonne famille]. Dans les années 80 nous avions rendu visite à Osmane [alors président du RNI], qui nous avait bien reçus“.

-A partir de 2003, le projet “qu’on a voulu imposer au Maroc est le même projet que celui de Benali, le modèle tunisien, on voit comment il a fini“.

On voit également comment a fini Ennahdha. Car ce que Benkirane ne dit pas, c’est la suite. Le parti Ennahda, à référentiel islamique, a été également rejeté par les Tunisiens et a failli dans la gestion des affaires publiques.

>Sur le RNI:

“Les relations se sont gâtées avec Mezouar, lorsqu’il est devenu président du RNI. Il avait fait des déclarations agressives“. Puis il est rentré au gouvernement et les relations sont restées cordiales. “Sa dernière sortie [où il a pris ses distances à l’égard du PJD] est incompréhensible. La seule explication que je peux trouver est très déplaisante et dérangeante“. Il n’en dira pas plus. Il se contentera d’affirmer que “les camarades de Mezouar n’étaient pas prévenus de cette sortie à l’avance“.

>Sur le PAM:

Le “tahakkoum“ [volonté hégémonique de tout contrôler], a créé au Maroc une situation de tension. Le 20-février a eu le mérite de démasquer la réalité du PAM. Ce parti est aujourd’hui balloté par les vents, il en est à son 4e secrétaire général en quelques années. Ce sont les maîtres de la manœuvre, ils représentent un courant ou un lobby qui veut toujours tout contrôler. Politiquement, leur projet est fini. En 3 mois [d’ici les élections, si on exclut le ramadan et les vacances d’été], ils n’ont pas le temps de tout corriger avant les élections législatives. Le parti ne changera pas en si peu de temps, il est composé de gens venus pour se servir, des opportunistes“.

“Le projet du PAM est un danger pour le Maroc, Etat et peuple. Ce parti est convaincu que le peuple n’est pas mûr pour la démocratie. Quant à nous, nous reviendrons à l’opposition s’il le faut. La voie du PAM est satanique, le PAM est un tyran satanique, vomi par le peuple [en 2011].“

>Notre commentaire:

1-Les Français disent que ce qui est excessif est insignifiant.

2- Le PAM a réuni certainement des personnes contestables comme tous les partis. Mais il réunit également des personnalités de valeur, intègres et qui portent un projet complètement antagoniste à celui du PJD sur le plan des libertés individuelles et de la relation à la modernité.

3. Les échecs du gouvernement ne sont pas seulement ceux du chômage ou de l’enseignement, comme l’avance M. Benkirane. Il y a dans le gouvernement une absence de vision dans des secteurs importants et stratégiques comme les médias, mais également le tourisme [le chef du gouvernement n’est pas sensible à l’égard de ce secteur], la parité, la condition de la femme, les libertés individuelles [cf. projet de révision du code pénal], et d’autres secteurs…

4. Benkirane a dominé, par défaut, la scène politique après 2011. Maintenant, les partis se reconstruisent, reprennent la parole, et c’est leur droit. Il doit l’accepter.

5. Certains ministres emblématiques du PJD sont aveuglés par l’idéologie: communication et justice, par exemple.

6. Benkirane commet l’erreur qu’il reproche à ses adversaires. Il les attaque sur des personnes ou sur des comportements réels ou supposés. Il ne critique pas leur projet. Pourtant, un projet PAM ou un projet RNI, modernistes sur le plan des libertés individuelles et avec une certaine expertise sur le plan de la gestion, méritent que l’on s’y intéresse.

7. Le référentiel islamique du PJD mérite d’être discuté. D’une part, l’islam n’est pas le monopole du PJD, loin de là. Ce qui est un monopole du PJD, c’est de prendre l’islam comme référence dans l’exercice de la politique.

On peut être musulman, ou respectueux de l'Islam, et s'opposer au projet islamiste. Ce n'est ni illégal, ni illégitime, ni inconcevable, ni satanique.

Enfin, il y a au Maroc un projet moderniste pertinent, qui s’oppose au projet de société du PJD. Ce projet est partiellement porté par le PAM. Il l’est également par l’UC, le RNI, l’USFP, la société civile. Ce projet a toute sa place.

Benkirane use régulièrement du mot “démocratie“ dans le débat politique: est-on réellement démocrate lorsqu’on a cette vision des libertés individuelles, du code pénal, de la parité, du droit des femmes à être protégées contre les violence?

Au final, l’électeur tranchera.

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