Quand l'INDH devient un outil de manipulation électorale

Pour Mustapha El Mnasfi, chercheur associé au Centre Jacques Berque de Rabat, l’action sociale est exposée à un risque de récupération dans le cadre de la campagne électorale qui s’annonce. Voici son analyse à partir de données récoltées sur le terrain.

Quand l'INDH devient un outil de manipulation électorale

Le 17 avril 2015 à 10h33

Modifié 17 avril 2015 à 10h33

Pour Mustapha El Mnasfi, chercheur associé au Centre Jacques Berque de Rabat, l’action sociale est exposée à un risque de récupération dans le cadre de la campagne électorale qui s’annonce. Voici son analyse à partir de données récoltées sur le terrain.

Au Maroc, les présidents de communes siègent également dans les comités locaux de l'Initiative Nationale pour le Développement Humain (INDH). Une confusion des rôles qui ne sert pas la transparence électorale.

Médias 24 a contacté Mustapha El Mnasfi, chercheur associé au Centre Jacques Berque, qui nous livre son analyse à partir de données récoltées sur le terrain.

"Après le lancement de l'INDH, certains élus locaux ont créé des associations, qui représentent, pour eux, un réel trésor électoral" constate d'emblée notre source. En effet, à partir des témoignages et éléments qu'il a pu récolter dans les villes de Casablanca et Rabat, tant auprès des associatifs que des élus, Mustapha El Mnasfi a constaté que l'action associative est souvent manipulée à des fins électorales, en utilisant des fonds publics alloués à la lutte contre l'exclusion sociale.

Il convient tout d'abord de noter que le comité local de l'INDH est composé, entre autres, de membres représentants des élus des communes et des arrondissements urbains. Ce comité est chargé du pilotage des opérations rentrant dans le cadre de l'INDH, de la mise en œuvre des projets et actions au niveau local.

"La présidence de cet organe par les élus locaux donne la possibilité à ses derniers d'exploiter l'initiative en leur faveur, sachant que ce programme n'entre pas dans les politiques publiques locales et demeure sous la tutelle du ministère de l'intérieur" relève M. El Mnasfi.

Une récupération politique très répandue

Pour en savoir plus, Médias 24 a contacté un ancien responsable de division d'action sociale à Casablanca. Il nous a expliqué que, dans la pratique, la récupération politique est très répandue. "L'action sociale est la porte ouverte vers la politique" déclare-t-il d'emblée et ajoute que "certaines associations créées par des membres de partis politiques ou de leurs proches servent principalement à constituer une base d'électeurs."

Exploiter la lutte contre l'exclusion sociale à des fins électorales dépend, selon notre interlocuteur, du quartier cible et du comité local qui le parraine. "La nature du tissu associatif diffère selon le degré de précarité des zones couvertes. Par exemple, nous avons constaté que les membres de partis à référentiel religieux sont très présents dans les associations qui travaillent sur la lutte contre l'analphabétisme. C'est le cas également des centres sportifs d'arts martiaux, massivement présents dans les quartiers défavorisés" nous indique notre source.

L'instrumentalisation ne se fait pas uniquement à travers les associations créées par les membres de partis politiques ou de leurs proches. M. El Mnasfi a, à ce propos, constaté que l'octroi des subventions était parfois tributaire du soutien de l'association au programme électoral de l'élu membre du comité local. "Il s'agit de l'une des lacunes de l'INDH au niveau local. Le gouvernement doit mettre en place un dispositif de contrôle pour interdire toute politisation de l'initiative de la part de certains élus locaux" estime le chercheur, et se demande : "comment le gouvernement, en tant qu'organe chargé politiquement des élections, réagira-t-il face à l'exploitation de l'INDH par les chefs de communes pour orienter le choix des électeurs?"

Menaces à l’approche des élections communales

A l'approche des élections communales, ces pratiques seront sans doute multipliées. Mustapha El Mnasfi nous a déclaré : "à partir de l'ensemble des éléments que j'ai réussi à récolter, je pose l'hypothèse suivante : il est possible que le phénomène de récupération politique s'accélère à partir de juillet prochain, à l'approche du début de la campagne électorale."

Il est à noter au final que ces éléments ont été récoltés auprès d'associations basées à Casablanca et à Rabat. "Dans les zones rurales ou montagneuses, l'instrumentalisation de l'INDH à des fins politiques est sans doute plus importante, et ce en raison de la faible présence de la société civile, et du manque de contrôle dans ces régions" conclut M. El Mnasfi.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

A lire aussi


Communication financière

SMI: ÉTATS FINANCIERS SOCIAUX AU 31 DÉCEMBRE 2023

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.