Débat: Darija à la maltaise

La darija fait actuellement l’objet d’âpres débats entre détracteurs et partisans de son adoption. L’expérience de l’île de Malte mérite d’être étudiée. Malte a été un précurseur de l’utilisation de la darija et peut être une piste intéressante.

Débat: Darija à la maltaise

Le 23 novembre 2013 à 12h07

Modifié 23 novembre 2013 à 12h07

La darija fait actuellement l’objet d’âpres débats entre détracteurs et partisans de son adoption. L’expérience de l’île de Malte mérite d’être étudiée. Malte a été un précurseur de l’utilisation de la darija et peut être une piste intéressante.

A l’instar de la langue maltaise, le dialecte marocain appelé darija est la langue locale la plus parlée et est le fruit de plusieurs emprunts à l’arabe, berbère, français et l’espagnol. L’exemple de l’idiome maltais s’en rapproche et pose de bonnes questions car ce dialecte sémitique de type maghrébin a su évoluer tout en gardant les traits de l’arabe classique.

L’origine de cette langue sémitique est essentiellement d’origine tunisienne et cela s’explique par le fait que Malte a connu nombre d’occupations étrangères qui lui ont donné une culture polyglotte.

Le chemin a été long quand des esprits éclairés au milieu du XVIIè siècle ont souhaité faire de leur langue jusque là purement orale une langue littéraire. C’est en 1924 que va aboutir la création d’un alphabet, d’une grammaire et d’un orthographe et cela va provoquer un conflit linguistique avec les classes supérieures maltaises qui pratiquaient uniquement l’italien et ne voulaient pas entendre parler de ce dialecte.

Ce n’est donc qu’en 1934 que la «darija» maltaise est devenue langue officielle de l’archipel aux côtés de l’anglais mais le maltais a été en plus consacré seule langue nationale du pays.

Selon la constitution, «la langue maltaise est une composante essentielle de l’héritage national, ce qui distingue le peuple maltais de toutes les autres nations et donne à ses citoyens le meilleur moyen d’expression.»

Si elle s’est enrichie d’emprunts liés à son histoire, elle a conservé son identité européenne et il faut souligner que c’est le seul pays de l’Union européenne qui porte fièrement son identité sémitique. Malte constitue l’unique exemple de pays où une langue arabe a été transcrite à l’aide d’un alphabet basé sur l’alphabet latin.

Cette langue qui raconte 1.200 ans d’histoire, cohabite harmonieusement avec l’anglais et fait l’objet d’un enseignement obligatoire dans les écoles publiques et privées. L’originalité du maltais en fait un sujet d’études très prisé par les linguistes car c’est un véritable laboratoire pour comprendre comment des langues peuvent évoluer et s’enrichir au contact des apports arabes, italiens, anglais, français...

Nombre de pays qui ont eu une langue savante sont tôt ou tard passés à une langue plus praticable. L’exemple le plus emblématique est celui du latin qui a disparu d’Europe hormis de certaines églises. Il ne s’agit surtout pas de prétendre que l’arabe classique est une langue morte mais l’argument de sa monopolisation du champ linguistique marocain est souvent d’ordre politique ou religieux. La langue maltaise a su utiliser la «fus’ha» en optant pour une langue vivante qui se renouvelle en regroupant toutes ses influences linguistiques du passé.

Dès 1863, une œuvre littéraire signée de Giuseppe Folliero montrait que les maltais «jonglaient» allègrement et sans complexes avec leurs langues. Le titre de son livre donne un aperçu linguistique de cette langue  car il emprunte des termes arabes et européens : «Elvira jew imhabba ta tirann» (Elvira et l’amour des tyrans).

La diversité des langues que les Maltais ont rencontrée au cours de leur histoire aurait pu faire d’eux des bilingues, trilingues, etc mais ils ont préféré croire que cette richesse pouvait leur poser des problèmes d’acquisition du savoir. Ils ont donc opté pour l’adoption d’une langue simple que tous comprennent sans difficultés et qui leur permet de poursuivre leurs études dans leur langue maternelle.

Ils n’ont pas inventé une nouvelle langue ni rejeté leurs origines diverses mais se sont contentés d’adopter officiellement la langue dialectale de tous les jours.

Au Maroc, les gouvernements successifs ont toujours considéré que l’arabe classique devait garder sa prééminence éducative et c’est pourquoi la diversité linguistique n’a jamais été prise en compte. Il est patent qu’il a fallu attendre la constitution de 2011 pour que l’amazigh soit consacré comme langue nationale.

Cela tient sans doute au caractère sacré de la langue du coran  même si au final cet idiome n’est la langue maternelle de personne, pas même des intellectuels marocains.

Les publicitaires qui n’hésitent plus  à inscrire leurs slogans en darija écrits parfois en lettres latines comme les maltais seraient ils plus au fait des attentes des citoyens et des dynamiques culturelles à l’œuvre?

 


 

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