Le financement extérieur jugé indispensable pour juguler la hausse des taux domestiques (AGR)

| Le 23/5/2022 à 18:04
La hausse des taux obligataires se poursuit. Cette hausse n’est pas conduite par une détérioration de la situation budgétaire mais par des anticipations du marché de dépenses supplémentaires de l’Etat dans un climat de forte inflation durable. Un financement extérieur serait une option pour soulager les pressions sur les taux domestiques, même si les conditions de financement à l’international se sont durcies. D’autant plus que le Trésor devrait faire face à une tombée de 1 milliard de dollar en décembre prochain.

Dans son document ‘Hebdo Taux’ publié le 20 mai, la société de recherche Attijari Global Research « AGR » est revenue sur la hausse continue des taux sur le marché obligataire au courant de la semaine du 13 au 19 mai.

Il est à rappeler que le Maroc évolue dans une conjoncture inflationniste depuis la fin de l’année 2021. Avec l’éclatement de la guerre en Ukraine, la situation s’est fortement détériorée. Néanmoins, la société de recherche note que le système bancaire demeure stable « soutenu par les actions proactives de la Banque Centrale à travers ses injections hebdomadaires et une politique monétaire accommodante depuis 2020 ». Cette situation perdure malgré une détérioration continue du pouvoir d’achat des ménages, minés par la hausse généralisée des prix. L’inflation à fin avril atteignait 5,9% contre 5,3% un mois auparavant.

Dans ce contexte, une hausse des taux obligataires est observée. AGR précise que « la tendance haussière des Taux sur le marché obligataire se poursuit cette semaine avec une appréciation du rendement de la maturité 2 ans de plus de 5 PBS, portant ainsi le cumul de la hausse depuis le début de l’année 2022 à 20 PBS ». Néanmoins, il faut préciser que cette hausse n’est pas induite pas des pressions observées sur les finances publiques.

Le marché anticipation des dépenses supplémentaires de l’Etat cette année

A y regarder de près, les finances publiques à fin avril se portent globalement bien, avec des recettes qui progressent nettement mieux que les dépenses et que les prévisions par rapport à la même période l’an dernier.

Contacté sur le sujet, un analyste de la place explique : « Aujourd’hui, il faut rappeler que l'on n'observe pas de pressions significatives sur les finances publiques. Le déficit budgétaire demeure assez maîtrisé, malgré la forte hausse des dépenses de compensation qui sont en grande partie compensées par la hausse des recettes fiscales ». A fin avril, les recettes de l’IS ont progressé de 74% par rapport à la même période en 2021, soit un ajout en valeur de 10 MMDH.

« Ce qu’il se passe sur le marché, c’est qu’il y a en réalité des anticipations de dépenses supplémentaires d’ici la fin de l’année. Aujourd’hui, le cours du gaz butane fait que l’on va dépasser de très loin les objectifs prévus dans la LF 2022 qui tablait sur 450$ la tonne. Sur le marché international, en moyenne et en YTD, nous sommes à plus de 900$ » explique notre interlocuteur. A ce titre, la charge de compensation à fin avril seulement a augmenté de 103,5% à 12,4 MMDH contre un objectif de 17 MMDH dans la LF 2022. Désormais, la question est de savoir si le Trésor pourra maîtriser son déficit budgétaire. En soi, il dispose de plusieurs leviers, notamment les financements innovants comme cela a été fait en 2021 et l’investissement.

Malgré les signaux positifs envoyés par l’Etat sur la gestion du déficit budgétaire, il y a de la tension sur les taux. In fine, l’inflation gagne les esprits. « Aujourd’hui on remarque une hausse des taux de rendement obligataire liés à une hausse naturelle de l’inflation. Malgré le fait que BAM maintienne son taux directeur inchangé, on voit une hausse des taux sur la partie courte qui est liée à la politique monétaire » explique notre source. Sur la partie moyenne et longue, plus corrélée aux finances publiques, des tensions haussières sont également observées, or, comme rappelé précédemment, les signaux budgétaires sont globalement bons.

La hausse actuelle vient donc des anticipations inflationnistes durables de la part des investisseurs, à la recherche de rémunération de leur épargne à des niveaux supérieurs à l’inflation, et non d’une crainte sur les conditions budgétaires.

Dans ces conditions, le Trésor devrait réaliser une levée à l’international pour satisfaire une partie de son besoin de financement.

Une sortie internationale indispensable selon AGR

Dans son document ‘Budget Focus Mars 2022’, AGR expliquait déjà que l’orientation vers le financement extérieur est un levier pour remédier à cette légère pression observée. « En effet, la sortie à l’international permettrait au Trésor de financer son besoin de financement croissant sans pour autant induire de pressions importantes sur les liquidités domestiques » rappelait la société de recherche.

Dans son document Hebdo Taux, AGR rappelle que cette année, une tombée importante à l’international d’un milliard de dollars est attendue au mois de décembre prochain. Malgré des conditions qui demeurent moins favorables à l’international, une sortie du Trésor demeure « indispensable » cette année pour AGR et ce, de manière à juguler les pressions haussières sur les taux domestiques. La situation est en effet moins favorable du fait de l’environnement international et le resserrement global des politiques accommodantes (cessation des rachats d’actifs de la BCE et rehaussement du taux directeur de la FED, ndlr).

Cependant, si ce besoin de financement est satisfait via le marché local, une hausse éventuelle des taux domestiques pourrait être observée. Cette situation serait naturellement à éviter dans le sens où elle entraînerait une hausse naturelle des taux débiteurs et impacterait les ménages et les entreprises, ainsi que les taux obligataires qui pousseraient le Trésor à s’endetter de manière moins favorable.

Il est à rappeler que selon les objectifs de la loi de finances, un total de 40 MMDH devrait être levé sur le marché extérieur par le Trésor cette année. A fin avril, seulement 2,9 MMDH avaient été levés.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.
lire aussi
  • | Le 3/5/2024 à 16:28

    BTP : une bonne tenue du secteur attendue cette année

    Anticipée comme bonne par les professionnels du BTP, l’année 2024 devrait confirmer un bon trend dans les mois à venir. Au premier trimestre déjà, l’encours des crédits bancaires au secteur du BTP bondissait de 16% à 96,6 MMDH. Les ventes de ciment à fin avril, elles, progressaient de 3,5% par rapport à l’année précédente.
  • | Le 3/5/2024 à 9:08

    Forte reprise de la consommation de ciment en avril

    Le mois d’avril a connu un sursaut de consommation de ciment. Depuis le début de l’année, les ventes de ciment ont progressé de 3,5% à 4,1 MT.
  • | Le 2/5/2024 à 15:20

    En mars, l'encours des crédits progresse de 69 MMDH sur 12 mois glissants

    L'encours global des crédits en mars a progressé de près de 19 MMDH d'un mois sur l'autre. Les créances en souffrance progressent de 4,8 MMDH sur une année glissante. L'encours des crédits bancaires concernant la branche d'activité du BTP a fortement progressé de 16% à 96,6 MMDH au premier trimestre. Une hausse notable qui provient de la hausse des mises en chantiers des grands projets d'infrastructures.
  • | Le 2/5/2024 à 13:03

    La barre des 400 MMDH de cash en circulation a été franchie en mars (BAM)

    Le cash en circulation a atteint les 400 MMDH en mars 2024. En un mois, il a progressé de plus de 5 MMDH et de plus de 37 MMDH sur 12 mois glissants. Les dépôts bancaires progressent également en mars. En 12 mois, ils ont augmenté de près de 50 MMDH pour atteindre 1.177 MMDH.
  • | Le 2/5/2024 à 10:49

    Baisse de 5,1% des recettes touristiques à fin mars

    Les dépenses de voyages progressent bien plus fortement que les recettes à fin mars. Le solde de voyages recule de 17,6% à fin mars à 16 MMDH.
  • | Le 1/5/2024 à 16:30

    Inetum Maroc se renforce : “Il y a les talents, les conditions et la taille critique pour le faire” (PDG)

    Le géant des services numériques a annoncé vouloir tripler ses effecifs au Maroc d'ici 2027. Le PDG du groupe revient pour Médias24 sur les raisons de ce choix stratégique et sur l'évolution de l'activité du groupe depuis 20 ans d'implantation dans le royaume. Base offshore réputée dans l'Hexagone, le Maroc devient également de plus en plus attractif avec un marché local en fort développement. Entretien.