Dans les régies de distribution, un mouvement qui risque de s’étendre

Initialement jugulé aux retraités de la Lydec (ex-RAD), un mouvement de contestation des employés des régies de distribution de l’eau et de l’électricité est en train de prendre de l’ampleur et s’installer dans la durée. Un mouvement quasiment passé sous silence parallèlement à la mise en place des Sociétés régionales multiservices qui prendront progressivement la place des régies et services concédés. Reportage. 

Dans les régies de distribution, un mouvement qui risque de s’étendre

Le 30 mai 2024 à 19h28

Modifié 31 mai 2024 à 15h29

Initialement jugulé aux retraités de la Lydec (ex-RAD), un mouvement de contestation des employés des régies de distribution de l’eau et de l’électricité est en train de prendre de l’ampleur et s’installer dans la durée. Un mouvement quasiment passé sous silence parallèlement à la mise en place des Sociétés régionales multiservices qui prendront progressivement la place des régies et services concédés. Reportage. 

Depuis quelques semaines, le voisinage du siège de la Lydec au 48, rue Mohamed Diouri à Casablanca, s’est habitué aux slogans du mouvement hebdomadaire des salariés de l’entreprise. Un mouvement de contestation qui se tient tous les mercredis à 17 heures dans une ruelle adjacente, comme a pu le suivre Médias24 dès le 22 mai dernier.

Mouvement bigarré

D’après ce que nous avons constaté lors des deux dernières manifestations, le scénario est le même.

Derrière un imposant cordon policier, quelques centaines de salariés de l’entreprise, jeunes et moins jeunes, essentiellement masculins, crient à tue-tête contre les "symboles de la corruption" de l’Association des œuvres sociales (AOS) des régies autonomes de distribution de l’eau et de l’électricité, ainsi que de la Caisse mutuelle de sécurité sociale (CMSS), dépendant de la Fédération marocaine des travailleurs de l’eau, de l’électricité et de l’assainissement, affiliée à l’Union marocaine du travail (UMT).

Brandissant les portraits de ceux qui, selon les manifestants, ont causé la faillite des deux organismes, ainsi que des banderoles résumant leurs revendications et des drapeaux de l’UMT, syndicat historique du secteur, les manifestants crient leur désaccord ainsi que leurs craintes pour leur avenir et celui des affiliés aux mutuelles.

Avec des slogans allant du registre revendicatif syndical classique, que de celui emprunté et mis au goût du jour des airs favoris du Mouvement du 20 février 2011, que du serment du Hirak du Rif ou encore les chants des supporters des clubs casablancais et des slogans religieux, les manifestants n’hésitent pas à soulever des problématiques liées à la mauvaise gestion et aux détournements de biens sociaux. Et la mobilisation ne semble pas faiblir.

Le mouvement a débuté depuis 2019 au moins, avec les réclamations de certains retraités de la Lydec (ex-RAD), revendiquant l’intégration des résultats du dialogue social de 2011 et 2019 à la base de calcul de leurs pensions. Il s’est élargi depuis avril dernier, englobant une partie significative des employés actifs de la Lydec.

En cause : la publication, le 1er avril dernier, d’une lettre circulaire du ministère de l’Intérieur constatant la défaillance de la gestion des deux institutions (AOS, CMSS) en plus de la Caisse mutuelle complémentaire d’action sociale (CMAS) dépendant de la Fédération syndicale.

La gestion des œuvres sociales retirée transitoirement

Cette missive de la tutelle est venue retirer la gestion de ces institutions aux représentants syndicaux, de manière transitoire, pour la placer sous la gestion de la Lydec pour ce qui est de l’Association des œuvres sociales et sous celle de la Redal (Veolia) pour ce qui est des caisses mutuelles ; respectivement les première et deuxième régies concédées les plus représentatives en nombre d’employés, conformément aux statuts du personnel des régies.

Selon au moins deux sources médicales conventionnées à la CMSS, consultées par Médias24, les remboursements des dossiers de soins ont connu une interruption d’au moins 15 mois. Selon une autre source rencontrée en marge de la manifestation du 29 mai à Casablanca, certains des employés de l’AOS ainsi que des mutuelles ne sont plus rémunérés.

D’après un des membres du mouvement que nous avons consulté, le montant actualisé des compléments de pensions de retraites à verser pour plus 1.400 retraités pourrait atteindre les deux milliards de dirhams.

La reprise en main, provisoire, est ainsi intervenue quelques jours après la tenue au siège central de l’UMT, sous la supervision de son secrétaire général, d’un conseil national exceptionnel de l’AOS reconduisant le bureau de celle-ci.

Un conseil "irrégulier" selon les manifestants, se présentant comme un courant réformateur, qui réclament en outre la poursuite judiciaire des responsables des institutions sociales concernées.

Pour eux, l’un des principaux responsables de la situation de défaillance pointée par la tutelle est le trio gérant les œuvres sociales et les mutuelles. Est le plus visé, le responsable de la Fédération syndicale, dominée depuis plus de 40 ans par la même personne, en retraite depuis 26 ans, qui elle-même gère l’Association des œuvres sociales dont dépendent plusieurs centres de loisirs et d’estivage et reconduit par le dernier conseil national. Il est par ailleurs trésorier de l’UMT au niveau central. Cette même personne, selon plusieurs sources médiatiques jointes par Médias24, a déjà été convoquée en 2019 par la BNPJ, sans suite, après une plainte déposée par l’un des membres du bureau de l’AOS.

30.000 affiliés dont 17.000 retraités

Selon des sources syndicales au niveau central de l’UMT, ce mouvement est lié à un conflit syndical puisqu’une nouvelle fédération, cette fois-ci sous la houlette de l’Union générale des travailleurs du Maroc (UGTM), a dernièrement vu le jour. Historiquement sous le contrôle exclusif de l’UMT depuis 1955, le secteur de l’électricité et de la distribution est ainsi un enjeu vital pour la centrale historique, nonobstant les défaillances de gestion dans les œuvres sociales et les mutuelles affiliées. Le mouvement, selon cette source, est en lien avec des mécontents des résultats du conseil national exceptionnel. Selon cette source, des discussions, négociations et médiations sont en cours entre les trois parties concernées, à savoir la direction centrale de l’UMT, les responsables des institutions sociales visées ainsi que les représentants du mouvement contestataire, afin de tenter de juguler la situation.

Les ressources de l’AOS sont essentiellement constituées de redevances versées par l’ensemble des régies, y compris les concessions représentant 1% de leur résultat net. Les revenus des mutuelles sont, eux, constitués de près de 10% des salaires et pensions brutes de près de 30.000 affiliés, en plus de 2,25% de cette même base pour les affiliés à la mutuelle complémentaire. Selon nos diverses sources, ce mouvement ne concerne pas uniquement les employés de la Lydec à Casablanca, malgré que le mouvement des retraités soit circonscrit à cette ville, mais bien l’ensemble des affiliés aux régimes de la CMSS et de la CMCAS.

Ces changements et mouvements interviennent en marge de la mise en place de la réforme du système de distribution de l’eau, de l’électricité et de l’assainissement prévus par l’entrée en service des Sociétés régionales multiservices.

Affaire à suivre.

Vous avez un projet immobilier en vue ? Yakeey & Médias24 vous aident à le concrétiser!

Si vous voulez que l'information se rapproche de vous

Suivez la chaîne Médias24 sur WhatsApp
© Médias24. Toute reproduction interdite, sous quelque forme que ce soit, sauf autorisation écrite de la Société des Nouveaux Médias. Ce contenu est protégé par la loi et notamment loi 88-13 relative à la presse et l’édition ainsi que les lois 66.19 et 2-00 relatives aux droits d’auteur et droits voisins.

A lire aussi


Communication financière

Attijariwafa bank: COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Médias24 est un journal économique marocain en ligne qui fournit des informations orientées business, marchés, data et analyses économiques. Retrouvez en direct et en temps réel, en photos et en vidéos, toute l’actualité économique, politique, sociale, et culturelle au Maroc avec Médias24

Notre journal s’engage à vous livrer une information précise, originale et sans parti-pris vis à vis des opérateurs.