Tourisme : le paradoxe du mois de janvier et les explications des opérateurs

En janvier, le Maroc a réalisé une hausse de 10% de ses arrivées, avec 992.541 visiteurs contre 902.310 à la même période l'an dernier, et une baisse de 11% de ses recettes en devises, soit 7,71 MMDH contre 8,61 MMDH en janvier 2023. Selon une source officielle et plusieurs opérateurs et experts du secteur, cette situation paradoxale résulte de facteurs conjoncturels et structurels. Explications.

Tourisme : le paradoxe du mois de janvier et les explications des opérateurs

Le 5 mars 2024 à 18h42

Modifié 5 mars 2024 à 20h31

En janvier, le Maroc a réalisé une hausse de 10% de ses arrivées, avec 992.541 visiteurs contre 902.310 à la même période l'an dernier, et une baisse de 11% de ses recettes en devises, soit 7,71 MMDH contre 8,61 MMDH en janvier 2023. Selon une source officielle et plusieurs opérateurs et experts du secteur, cette situation paradoxale résulte de facteurs conjoncturels et structurels. Explications.

"Il est prématuré de s’alarmer sur les chiffres d’un seul mois, et il faudra attendre la publication de ceux de février pour y voir plus clair", temporise une source autorisée qui ne voit pas de raison de s’inquiéter, sachant que janvier a toujours été une période de basse saison. En attendant de connaître l'évolution de la situation dans les prochains mois, Médias24 a recueilli plusieurs analyses pour comprendre le paradoxe des chiffres de janvier.

"L’action de l’ONMT commence à porter ses fruits en termes d’arrivées"

En guise d’explication pour la hausse de 10% des arrivées et de 12% des nuitées dans la ville ocre, Abdellatif Abouricha, porte-parole du CRT de Marrakech, avance que le remarquable travail de promotion fourni par l'ONMT, la stabilité politique du Maroc et son climat ensoleillé toute l'année sont a l'origine de l'exceptionnelle augmentation des arrivées étrangères.

Et de citer le retour en force du marché allemand après une longue désaffection, grâce au renforcement du réseau aérien entre le Maroc et l’Allemagne, auquel il faut ajouter la signature de nombreux accords avec des prescripteurs allemands de voyage (tour-opérateurs...).

Tout en reconnaissant qu’il reste encore de la marge pour que cette clientèle intègre le top 5 des marchés émetteurs étrangers, Abouricha souligne que la présence d’une importante délégation marocaine d’acteurs publics et privés au salon du tourisme ITB de Berlin, qui se tient du 5 au 7 mars, ne manquera pas de booster les arrivées de ce marché.

Ce dernier a en effet fait son grand retour en janvier 2024 avec 21.264 arrivées contre 16.601 pour le même mois de 2023, soit une hausse inédite de 28%.

"La clientèle inhabituelle du mois de janvier était désargentée"

Pour expliquer la baisse paradoxale des recettes nationales en devises, le porte-parole du CRT de Marrakech-Safi met surtout en cause la dégradation du pouvoir d'achat des touristes européens qui dépensent bien moins qu'avant.

"Malgré leur volonté de profiter de leurs vacances et du soleil marocain durant un mois de janvier glacial dans leur pays, ces visiteurs dépensent moins pour se loger ou se restaurer. En effet, j’en vois de plus en plus qui préfèrent s'acheter un sandwich dans la vieille ville au lieu de s'attabler à une table de restaurant", indique Abouricha.

Spécialiste des marchés étrangers, notre interlocuteur laisse ainsi entendre que les visiteurs du mois de janvier étaient plutôt désargentés et qu'il faudra attendre la haute saison du mois d'avril pour retrouver une clientèle aisée.

Après le Ramadan qui se terminera 11 avril prochain, Abdellatif Abouricha se veut optimiste en affirmant que la ville ocre devrait retrouver une clientèle étrangère bien plus dépensière à l'occasion des vacances scolaires de Pâques.

Celles-ci se présentent favorablement sachant que de nombreux hôtels affichent d'ores et déjà quasi complet, souligne-t-il.

"Une hausse des arrivées à relativiser, car elle engendre moins de recettes"

À la question de savoir comment le nombre d’arrivées nationales a pu augmenter de 10% durant le mois de janvier qui correspond à la très basse saison (période de rénovation des établissements d’hébergement), un grand hôtelier de la ville ocre, affirme de son  côté qu'il faut relativiser cette hausse constituée en réalité de visiteurs qui ne séjournent pas automatiquement dans les établissements classés.

Cette croissance  exceptionnelle serait en effet biaisée par l’existence d’un gap important entre les chiffres officiels de la DGSN relatifs aux arrivées de visiteurs dans les aéroports et ceux qui résident réellement à l'hôtel.

"Positive en apparence, cette hausse n’est pas réaliste, car la majorité des voyageurs recensés à nos postes-frontières sont des MRE (+9,5%) ou des TES (+11%) qui ont préféré loger dans le secteur extra hôtelier (famille, appartements, chez l’habitant, Airbnb)", affirme l’opérateur en ajoutant que ce phénomène croissant entraîne une absence des retombées économiques et in fine une baisse des recettes.

L’hôtelier estime toutefois que la désaffection des marchés au fort pouvoir d’achat, engendrée après le 7 octobre, est en train de s'estomper avec un retour en force des Français, des Espagnols, des Anglais… dans le seul pays arabo-musulman qui ne connaît aucun problème de sécurité

Un écosystème incomplet sans parc des expositions

Et d'ajouter qu'un parc des expositions à Marrakech spécialisé en tourisme d’affaires devient vital pour remplir les hôtels du lundi au jeudi dans une ville touristique où la durée de séjour ne cesse de se réduire pour devenir une destination city break, avec un taux d'occupation hôtelier important le week-end uniquement.

Un retard inexplicable alors que tous les acteurs publics (ministre de tutelle, ONMT, SMIT…) et privés (CN …) ne cessent de rappeler son importance pour booster un écosystème touristique incomplet.

"Dans le contexte mondial agité, l’Espagne et le Maroc sont les dernières destinations hivernales fiables"

Face à la situation géopolitique inquiétante pour de nombreux touristes, un grand professionnel du secteur estime que la hausse inédite des arrivées au Maroc s’explique par le fait que les étrangers désireux de voyager en hiver vers une destination moyen-courrier n’ont plus beaucoup de choix.

Citant la Tunisie qui vit des moments très difficiles, ainsi que l’Egypte et la Jordanie qui souffrent de la situation au Moyen-Orient en raison de leur proximité avec Gaza, l’expert affirme qu’il ne reste aux marchés européens proches que le Maroc et l’Espagne qui sont considérés comme des îlots de stabilité.

"Un taux de change défavorable et la baisse de l’inflation ont plombé les recettes"

Ainsi, les touristes étrangers de séjour (TES) et les MRE, qui n’avaient pas pu venir en décembre à cause de l’inflation mondiale et de la haute saison qui a fait flamber les prix, ont préféré voyager en janvier où les coûts de transport et d’hébergement étaient bien plus abordables pour leurs bourses.

Sur la baisse des recettes nationales en devises constatée en janvier, notre interlocuteur avance une double explication financière. Il estime que le renforcement du cours du dirham par rapport à l’euro et au dollar a provoqué un effet de change défavorable pour le Maroc et que la baisse des prix de ce début d’année, ayant suivi celle de l’inflation, n’y sont pas pour rien...

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