Entreprises : Youssef Alaoui commente les modifications apportées au PLF 2023

Le président du groupe parlementaire de la CGEM à la deuxième chambre expose, dans cet entretien, les actions menées par les représentants du patronat en son sein. Un travail qui a pu, explique-t-il, améliorer de manière significative les différentes mesures ayant trait à la fiscalité des entreprises.

Entreprises : Youssef Alaoui commente les modifications apportées au PLF 2023

Le 12 décembre 2022 à 14h11

Modifié 12 décembre 2022 à 18h00

Le président du groupe parlementaire de la CGEM à la deuxième chambre expose, dans cet entretien, les actions menées par les représentants du patronat en son sein. Un travail qui a pu, explique-t-il, améliorer de manière significative les différentes mesures ayant trait à la fiscalité des entreprises.

Médias24 : Après le vote de la première chambre, le PLF est aujourd’hui bouclé sans changement par rapport à la version validée en deuxième chambre, où votre groupe est représenté. Quelle est tout d’abord votre évaluation générale de la dernière mouture du PLF après les modifications apportées ?

Youssef Alaoui : Entre le PLF qui a été déposé par le gouvernement et la mouture actuelle, je peux dire que c’est une loi de finances majeure. Plusieurs modifications ont effectivement été introduites à la demande de la CGEM, ce qui est rassurant pour les opérateurs économiques.

Cette loi de finances a été marquée par la réforme effective de l’IS avec l’établissement d’un taux commun à 20% pour les sociétés réalisant moins de 100 millions de dirhams de bénéfice net, une baisse de la taxation des dividendes de 15% à 10% et une baisse de la cotisation minimale jusqu’à 0.15%, ce qui veut dire que nous nous dirigeons bien vers un taux de 0%. Tout cela touche 99.95% des entreprises, donc toutes les catégories d’entreprises.

Nous avons également pu obtenir un plafonnement de l’IS à 20% pour les sociétés sous statut CFC et ZAI, qui auraient vu leur taux passer à 35% si elles dépassent les 100 millions de dirhams de bénéfice net.

La loi de finances prévoit aussi, à la demande de la CGEM, une baisse de l’IS à 20% pour les sociétés qui font plus de 100 MDH de résultat net et qui s’engagent à faire des investissements de 1,5 milliard de dirhams sur cinq ans. Cette baisse ne s’applique qu’aux sociétés nouvellement créées.

- Mais les exportateurs qui ne sont ni à CFC ni dans les ZAI sont, selon des sources au sein même de la CGEM, perdants dans cette affaire.

- Oui, le problème se pose effectivement pour certaines entreprises exportatrices réalisant plus de 100 millions de résultat net. Dans nos propositions d’amendements, nous souhaitions inclure les entreprises exportatrices et les plateformes industrielles intégrées (P2I) dans le dispositif de plafonnement à 20%, au même titre que CFC et les ZAI, mais cette mesure n’a pas été retenue par le gouvernement. Nous ne manquerons pas de revenir à la charge l’année prochaine.

- Il y a un secteur que l’on dit être le grand perdant de cette réforme de l’IS : l’offshoring. C’est un secteur exportateur, grand créateur d’emplois, mais dont les acteurs qui font plus de 100 MDH seront pénalisés, d’autant qu’ils font face à une concurrence internationale féroce. Selon nos sources, le groupe parlementaire de la CGEM n’a pas pu trouver un accord avec le gouvernement sur ce cas…

- L’offshoring est un secteur stratégique, soumis à une concurrence rude à l’international, et dans lequel notre pays a développé des acquis importants sur les quinze dernières années. Des acquis que nous gagnerons à conserver.

Heureusement, certaines conventions spécifiques existent pour protéger ces opérateurs à court terme, engageant le gouvernement à maintenir leur fiscalité stable. Nous espérons pouvoir capitaliser sur ces conventions pour préserver cette industrie locomotive en matière de création d’emplois.

L’avenir est à l’élargissement de la pression fiscale, et nous espérons qu’avec l’amélioration des recettes de l’Etat, nous aurons la possibilité de poursuivre la baisse de la pression fiscale sur les prochaines années pour converger vers un taux unifié de 20% à terme pour tous les secteurs ; y compris, nous l’espérons, pour les entreprises qui sont passées de 31% à 35% ou de 37% à 40%, sachant toutefois qu’elles vont entre-temps payer 5 points de moins sur les dividendes, ce qui est une chose positive.

Il est du rôle de l’Etat d’œuvrer pour l’intégration de l’informel et l’élargissement de l’assiette fiscale en vue de baisser la pression fiscale pour les entreprises citoyennes et de converger vers un taux unique de 20%.

- Sur la retenue à la source, votre groupe a défendu la suppression de ce mode de collecte de l’impôt pour les personnes morales. Vous avez fait finalement match nul, avec une retenue à la source appliquée aux personnes morales pour les transactions avec le secteur public...

- C’est loin d’être un match nul. Nous considérons que le problème a été en grande partie réglé. La quasi-totalité du business des personnes morales concernées par cette retenue à la source se fait entre acteurs privés. La part des revenus perçus par l’Etat ou les collectivités locales est minime. D’autant que les avances qui seront payées via cette retenue à la source seront déduites du premier acompte d’IS.

- La majorité a, semble-t-il, joué le jeu avec vous. Non ?

- L’ensemble des parties prenantes ont travaillé à ce que ce PLF aille dans le sens du progrès et de la croissance, et conjugue l’équilibre délicat entre l’amélioration de l’environnement des affaires et la stabilité des recettes budgétaires. Le débat engagé par le gouvernement, les syndicats, les partis de la majorité, ainsi que ceux de l’opposition, a été sain et riche, et a porté ses fruits.

Les partis de la majorité ont bien évidemment pesé de leur poids pour soutenir les amendements logiques, sérieux, et allant dans le sens de l’intérêt public. Les partis de l’opposition ont été à l’écoute et ont travaillé dans un esprit constructif, et non pas en s'opposant pour s'opposer.

J’aimerais également saluer l’esprit constructif des syndicats. Quand on a proposé, par exemple, l’exonération de l’IR sur les pourboires pour les personnes travaillant dans les secteurs de l’hôtellerie et de la restauration, ils ont voté avec nous. Idem pour la reconduction de l’exonération de l’IR pour les salariés nouvellement embauchés en CDI par une entreprise.

- A vous entendre parler, on peut dire que la CGEM a pesé lourdement sur ce PLF. Comment expliquez-vous cela ?

- Oui, notre groupe a réellement pesé... Parce que notre nouvelle méthodologie de travail a tout simplement fait la différence. Avant, on attendait le dépôt du PLF avant de commencer le travail. Cette année, les fédérations sectorielles ont déposé leurs propositions à la Commission fiscale de la CGEM dès le mois de mars. La commission a abattu un travail énorme de mars jusqu’à juin pour discuter avec les fédérations et filtrer les propositions dans le sens des orientations de la loi-cadre sur la fiscalité. Et à partir de là, le groupe parlementaire a commencé à travailler sur le sujet pour bien préparer les discussions au niveau du Parlement et avec le gouvernement. Dès juin, nous avions tout bouclé. On avait de la marge pour travailler sereinement et aller exposer nos propositions au gouvernement.

Notre caractère apolitique a aussi laissé transparaître des propositions argumentées qui ont gagné le soutien des différentes composantes de la deuxième chambre, quand celles-ci étaient considérées justes et raisonnables. Et nous allons continuer à travailler dans le même esprit pour réussir les chantiers prioritaires de l’année prochaine.

- Vous avez déjà identifié les chantiers de l’année prochaine ?

- Trois chantiers sont prioritaires pour l’année prochaine : l’intégration de l’informel, la réforme de la TVA et la réforme de la fiscalité locale. Ces chantiers stratégiques sont très attendus par le monde de l’entreprise. L’enjeu est bel et bien celui de la compétitivité de notre tissu économique.

Nous devons nous diriger vers la neutralité de la TVA et la simplification du dispositif dans son ensemble pour réduire le nombre de taxes. Il en va de même pour la fiscalité locale, avec une refonte à opérer de la taxe professionnelle. Enfin, en ce qui concerne l’informel, je pense que le timing est bon pour traiter ce sujet. Avec l’élargissement de la couverture sociale à tous les citoyens, les réformes de la santé et de l’éducation qui sont en cours, il n’y aura plus de raison ou d’alibi pour ne pas payer l’impôt et rester en dehors du système.

Ces chantiers d’une certaine envergure devront être abordés dès l’entame de l’année fiscale 2023 avec les différents départements concernés, afin d'arriver à des mesures concluantes pour le PLF 2024.

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