Nuit du vendredi 20 au samedi 21 mai 2022, peu après minuit. Sur le boulevard Mohammed VI à Casablanca, au croisement des boulevards Al Qods, Driss El Harti, Dakhla et Amgala, commence une opération emblématique et décisive : celle du coulage du béton du nouveau pont. L’opération devrait prendre fin dimanche dans la soirée.

Ce pont est l’un des plus grands ouvrages d’infrastructure de transport dans la capitale économique. Sa longueur est de 620 m (contre 240 m pour le pont à haubans). En tenant compte des rampes d’accès, il s’étend sur 1 km environ. Les difficultés d’exécution tiennent à sa taille, mais aussi à sa complexité technique. Non seulement il concerne quatre croisements, mais en raison du dénivelé, chaque pilier est unique. Pourtant, l’entreprise Bioui, chargée des travaux, s’est vu fixer un délai de douze mois seulement pour achever le chantier.

Grosse opération de coffrage puis de coulage du béton armé sur le pont du boulevard Mohammed VI ce week-end.

Contractuellement, le pont doit être livré en octobre 2022. Il pourrait néanmoins être ouvert à la circulation dès la fin de l’été, avant les dernières finitions, si les problèmes engendrés par le contexte économique mondial sont surmontés. Quoi qu’il en soit, et selon une source informée consultée par Médias24, "il sera ouvert dans un délai raisonnable au vu de la situation, et avant la fin de l’année. Probablement en septembre".

Difficultés d’approvisionnement, hausses des prix

Les problèmes soulevés par le contexte économique mondial sont de deux ordres. Ils impactent tous les chantiers en cours à Casablanca et au Maroc, pas seulement liés au transport, mais dans les BTP de manière générale :

- la pénurie ou la rareté de produits ;

- le renchérissement des produits ;

En octobre 2021, plusieurs entreprises contractantes dans les marchés d’infrastructure de transport à Casablanca avaient alerté le maître d’ouvrage de la hausse des intrants et donc des coûts. Elles sont certes liées par contrat, mais les difficultés exogènes et imprévisibles apparues à l’automne créent une situation nouvelle.

Le 18 avril 2022, la primature a diffusé une circulaire du chef du gouvernement consacrée aux marchés publics et assimilés qui sont en cours.  Différentes mesures exceptionnelles ont été instaurées pour sauver un secteur qui emploie 1,2 million de personnes. Citons l’extension des délais d’exécution des marchés en cours jusqu’à six mois sans pénalités de retard ; la restitution des pénalités de retard encaissées dans le cadre des marchés en cours ; la résiliation sans confiscation des cautionnements pour les marchés en cours ; le règlement à l’amiable pour les litiges nés des décisions de résiliation avec confiscation du cautionnement définitif et application des indemnités de retard ; la généralisation de la révision des prix aux marchés de travaux passés à des prix non révisables.

La circulation redevient normale sur une partie du boulevard Al Qods où l’infrastructure d’une ligne BHNS est terminée.

Qu’en est-il à Casablanca dans le cadre des marchés liés au transport urbain ? Selon des sources sûres, les entreprises sont actuellement payées dans un délai de 40 jours au lieu des 60 jours fin de mois contractuels. Et la circulaire du chef du gouvernement sera respectée, y compris en matière de tolérance dans les délais de réalisation des marchés.

"Cette situation ne remet pas en cause la volonté du maître d’ouvrage et des entreprises contractantes d’honorer leurs engagements contractuels. Les parties ont intérêt à boucler les travaux au plus vite, car la conjoncture risque de s’aggraver et de créer une situation encore plus difficile", indique une source informée.

Parmi les perturbations dans la réalisation de ces marchés, notre source cite les approvisionnements, comme le cas de la corniche métallique de 620 m qui doit être installée sur le pont du boulevard Mohammed VI, ou le cas du bitume, une matière non stockable, à entreposage complexe et qui doit être déployée au plus vite dès qu’elle est disponible.

Les chantiers en cours à Casablanca

Quatre lignes, deux de tramway et deux de BHNS (bus à haut niveau de service), sont en cours de réalisation. Ces 50 km, auxquels s’ajoutent les travaux du pont du boulevard Mohammed VI, perturbent la circulation quasiment dans toute la ville. Il est presque impossible de parcourir un trajet de moyenne longueur sans être confronté aux travaux.

Cette concomitance, avec des chantiers répartis en arc de cercle dans la métropole, perturbent les habitants et mettent à rude épreuve leur patience.

Travaux de voirie à Al Joulane, pour la ligne 5 du BHNS.

Travaux du tramway, ligne T4, dans le centre-ville.

La bonne nouvelle, c’est que la délivrance approche. 80% des travaux d’infrastructure sont désormais terminés. Ces travaux se réalisent de façade à façade et portent sur le site lui-même, mais également sur toute la chaussée, les trottoirs et tous les réseaux. Dans certaines zones, il ne reste que les câblages à installer (rond-point Oulmes, boulevard Yacoub Mansour par exemple).

La fin des travaux des deux lignes de tramway est prévue pour la fin du 1er semestre 2023, pour une mise en service au cours du 1er trimestre 2024. Les travaux des busways devraient être achevés au cours de l’été 2022 pour un démarrage du service au cours du 1er trimestre 2023.

Hormis les perturbations nées du contexte économique international, ces travaux structurants se déroulent sans retard. Les informations faisant état de retards de paiement par Casa Transport à cause de difficultés financières de la commune, sont démenties par nos différents interlocuteurs.

Lorsque ces différents projets seront opérationnels, Casablanca sera dotée de quatre lignes de tramway et de deux lignes de busways, qui viendront s’ajouter à un réseau de bus bien plus dense. Au total, 400.000 à 450.000 personnes seront transportées quotidiennement par TCSP (transport en commun en site propre), et 700.000 voyageurs quotidiens par bus. Le réseau TCSP comportera douze points de correspondance.

Mais la mobilité d’une ville n’est pas uniquement affaire de tunnels, trémies, ponts, modes de transports. Elle est également tributaire d’une infrastructure telle que les parkings et de la répartition de l’activité économique. La circulation de camions dans le centre-ville en direction du port, ou encore l’activité de la zone de Derb Omar, sont des exemples de chantiers indispensables dans un avenir proche.

Voici les mesures prises au profit des entreprises titulaires de marchés publics