Que signifie réellement la rupture des relations Maroc-Algérie ? La réponse d'Ahmed Faouzi
Ahmed Faouzi, ancien ambassadeur et chercheur en relations internationales, connaît bien l'Algérie ainsi que les relations internationales, la géopolitique et leurs arcanes. Il répond aux questions que l'on peut se poser suite à la décision de l'Algérie de rompre ses relations avec le Maroc.
Que signifie réellement la rupture des relations Maroc-Algérie ? La réponse d'Ahmed Faouzi
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Yahya Benabdellah
Le 25 août 2021 à 14h19
Modifié 25 août 2021 à 14h45Ahmed Faouzi, ancien ambassadeur et chercheur en relations internationales, connaît bien l'Algérie ainsi que les relations internationales, la géopolitique et leurs arcanes. Il répond aux questions que l'on peut se poser suite à la décision de l'Algérie de rompre ses relations avec le Maroc.
Si la rupture des relations exprime une grave crise entre les deux pays, les relations autres que diplomatiques ne devraient pas être affectées, sauf si l'Algérie décide d'aller plus loin dans l'exacerbation des tensions.
Médias24: Que signifie la rupture en langage diplomatique ?
Ahmed Faouzi : La rupture des relations entre deux pays signifie l’arrêt total de tout contact diplomatique entre eux. Elle vient généralement à la suite d’un incident qui n’a pas été résolu par les voies diplomatiques.
La rupture des relations est le stade le plus avancé des crises diplomatiques. Si on peut faire un classement du degré de gravité d’une crise diplomatique, la convocation de l’ambassadeur pour lui communiquer la protestation, vient comme première étape. Elle est suivie du rappel de son propre ambassadeur, ce qu’a aussi fait l’Algérie. La rupture des relations bilatérales, quant à elle, exprime la forme la plus grave des crises diplomatiques.
-Qu’en est-il des ressortissants marocains en Algérie et des ressortissants algériens au Maroc, sachant que l’Algérie a annoncé que ses affaires consulaires travailleraient normalement ?
-La convention de Vienne qui régit les relations internationales, dans ses articles 45 et 46, stipule de ne pas toucher aux locaux diplomatiques et de poursuivre les affaires consulaires pour servir les ressortissants des deux pays, normalement.
Le Maroc, même en 1975, quand l’Algérie avait expulsé 350.000 ressortissants marocains suite à la Marche Verte, n’a pas touché aux algériens résidant au Maroc.
-Doit-on nous attendre à des conséquences sur les relations économiques ?
-Une rupture des relations diplomatiques ne signifie pas l’arrêt des échanges commerciaux. Mais d’autre part, les relations économiques entre le Maroc et l’Algérie sont insignifiantes. Il n’y a pas de risque à craindre pour l’économie marocaine. Les relations commerciales intra-maghrébines ne dépassent pas les 4% des échanges globaux de ces pays. Même quand les Algériens veulent importer du Maroc, ils passent généralement par les ports de Marseille ou de Barcelone, alors 60 km séparent Oujda de Tlemcen.
-Les lignes aériennes peuvent-elles être affectées ?
-Pour le moment, il n’y a aucune annonce algérienne dans ce sens. En principe, la rupture des relations ne touche que les aspects diplomatiques.
-Justement, comment seront dorénavant les contacts entre diplomates marocains et algériens dans les coulisses des organisations internationales ?
-Il n’y aura aucun contact diplomatique. La rupture des relations signifie la suppression de toute forme de relation diplomatique.
-Le sommet arabe est prévu prochainement à Alger. Est-ce que la participation du Maroc peut être compromise ?
-Avec cette nouvelle donne, la Ligue arabe devrait normalement trouver un pays neutre pour y organiser ce sommet. Un sommet arabe est censé unir et il ne peut pas être organisé dans un pays qui est en rupture de relations avec un autre pays arabe.
-Comment pensez-vous que les grandes puissances vont réagir ?
-Les grandes puissances ont maintes fois exprimé leur souhait de voir les frontières ouvertes et les relations normalisées. Elles veulent voir une coopération maghrébine pour affronter les défis du terrorisme et de la migration. Elles ne peuvent que déplorer cette situation qui jette de nouveaux risques sur la région.
-Une nouvelle escalade vers un conflit armé, est-elle probable ?
-En tous les cas, on ne le souhaite pas. Ce serait catastrophique pour les deux pays, les deux peuples, pour toute la région et pour le monde.
Dans une région qui connaît une grande instabilité au Sahel et en Libye, avec des groupes armés qui y circulent, on ne peut pas se permettre d’y ajouter un autre conflit de cette taille.
-Dans son communiqué, le ministère des Affaires étrangères marocain a déclaré que “le Maroc restera un partenaire crédible et loyal pour le peuple algérien”. Quel sens porte cette déclaration ?
-Cela signifie que dans le différend qui oppose notre pays au régime militaire en Algérie, le Maroc n’a rien à reprocher au peuple algérien frère. Cela signifie que la main tendue par le Maroc est sincère et le restera pour le bien du peuple algérien.
-Des matchs de la sélection algérienne de football sont programmés au Maroc, au titre des qualifications pour la coupe du monde 2022. Est-ce qu’elle peuvent être affectées ?
-Non, toutes les relations de type autre que diplomatiques, ne devraient pas être touchées.
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