Des commerçants rejettent le nouveau régime de la contribution professionnelle unique

Les commerçants sont divisés. Plusieurs associations ont signé un courrier pour rejeter ce nouveau régime fiscal qui remplace celui du bénéfice forfaitaire. En face, la coordination des syndicats les plus représentatifs y adhère. Explications.

Des commerçants rejettent le nouveau régime de la contribution professionnelle unique

Le 28 mars 2021 à 17h53

Modifié 11 avril 2021 à 2h50

Les commerçants sont divisés. Plusieurs associations ont signé un courrier pour rejeter ce nouveau régime fiscal qui remplace celui du bénéfice forfaitaire. En face, la coordination des syndicats les plus représentatifs y adhère. Explications.

Un vent de résistance au changement du régime fiscal du "bénéfice forfaitaire" par la "contribution professionnelle unique - CPU" se fait sentir. 64 associations de commerçants de toutes les régions du Maroc ont adressé le 23 mars un courrier au gouvernement, à la Direction générale des impôts (DGI) et aux présidents des deux chambres du Parlement.  Ils expriment le rejet pur et simple de la contribution professionnelle unique.

64 associations locales rejettent la CPU

"Nous appelons le gouvernement, le Parlement, les ministères du Commerce et des Finances et la DGI à l'annulation d'urgence du régime de la CPU ou du moins à le rendre facultatif en maintenant le régime forfaitaire qui a prouvé au fil des décennies qu'il est le régime le plus adéquat à la catégorie des petits contribuables", lit-on dans le courrier. 

"Le silence des personnes assujetties au régime forfaitaire n'est pas un signe d'acceptation de la CPU, mais c'est le silence qui précède la tempête. La grande majorité n'a pas compris le danger que représente cette nouvelle situation et sa réaction se fera sentir quand elle prendra conscience des hausses astronomiques de l'impôt à payer. Ce qui risque d'engendrer une vague de colère, de manifestations, de grèves et de hausse des prix", menacent les associations signataires.

La sortie des commerçants coïncide avec l'échéance pour la déclaration du chiffre d'affaires et le paiement de l'impôt relatif à 2020 avant fin mars 2021. Toutes les personnes optant pour le régime forfaitaire ont reçu au cours de ce mois un courrier de la DGI, leur expliquant l'entrée en vigueur de la CPU et le nouveau mode de calcul.

Cette contribution comprend en plus de l'impôt un droit complémentaire destiné à la couverture médicale, suite à l'élargissement de l'AMO aux commerçants. Dans ce sens, la CNSS a également fait une annonce il y a quelques jours, appelant tous les assujettis à la CPU qui auront déposé leur déclaration fiscale à s'adresser à elle pour accomplir les formalités d'immatriculation à l'AMO. 

مراسلة لجمعيات و هيئات مهنية رافضة لنظام المساهمة المهنية الموحدة موجهة لرئيس الحكومة و جميع الجهات المعنية.

Publiée par ‎جمعية إتحاد تجار و مهنيي درب عمر‎ sur Mercredi 24 mars 2021

Les syndicats les plus représentatifs tiennent à la CPU

Contacté par Médias24, le président de l'Union générale des entreprises et des professions (UGEP) Moulay Ahmed Afilal, qui s'exprime au nom de la coalition des syndicats les plus représentatifs (UGEP, SNCP et Espace marocain des commerçants), nous explique qu'ils se désolidarisent de ce courrier.

"Nous sommes pour la CPU et nous défendrons son maintien et sa mise en œuvre. Tous les commerçants étaient d'accord pour son application", nous déclare-t-il. 

"La CPU est un acquis pour lequel nous avons milité pendant des années où nous avons mené des pourparlers avec le gouvernement et des discussions au Parlement. C'est une contribution qui rassemble tous les impôts et taxes locales", nous déclare-t-il.

"Elle permet en plus de faire accéder ces personnes à la couverture sociale moyennant un droit complémentaire. Ce qui répond aux instructions royales", poursuit-il en insistant que les syndicats les plus représentatifs n'hésiteront pas à s'opposer à ceux qui cherchent à faire échouer ce chantier. 

Qu'en est-il de la menace de grèves et de manifestations exprimée dans le courrier ? "Il n'y aura pas de grève. Nous savons qui nous représentons", répond sans équivoque le président de l'UGEP qui assure que les syndicats formant la coalition ne cautionneront pas de grèves ou de manifestations dans ce sens. 

"Cette levée de boucliers est le résultat d'une incompréhension du nouveau régime et de ses bénéfices et nous allons remédier à cette lacune en organisant une grande campagne de sensibilisation et de communication", ajoute-t-il. 

Selon notre interlocuteur, une réunion a été organisée ce vendredi 26 mars entre la coordination, la DGI et la direction du commerce intérieur au ministère du Commerce pour discuter de ce courrier et de la démarche à suivre. 

Les grossistes derrière la levée de boucliers ?

Dans leur courrier, les commerçants qui font de la résistance expliquent leur position par plusieurs arguments dont :

- "La direction des impôts a violé l'article 6 paragraphe 4 de la loi de finances 2021 qui stipule que "les dispositions relatives au régime du bénéfice forfaitaire en vigueur avant le 1er janvier 2021 demeurent applicables pour les besoins d'assiette, de contrôle, de contentieux et de recouvrement pour les contribuables dont le revenu professionnel est déterminé selon ledit régime antérieurement à cette date".

- "La DGI a violé l'article 6 de la Constitution qui dispose clairement que "la loi ne peut avoir d'effet rétroactif".

- "Après examen de la méthode de calcul de la CPU, il s'avère que ce régime est injuste dans la mesure où il permet aux contribuables ayant d'importants revenus de bénéficier de réductions d'impôts et impose aux petits contribuables un impôt élevé. 

- "La loi de finances 2021 n'a pas maintenu l'exonération des droits de timbres pour les assujettis à la CPU comme c'était le cas pour le régime forfaitaire". 

- "La suppression du régime forfaitaire et son remplacement par la CPU sous prétexte de mettre en place une couverture sociale pour ces contribuables n'a aucune base objective. La mise en place de la couverture sociale peut tout aussi se faire dans le cadre du régime forfaitaire".

Selon nos sources, il y a deux facteurs qui ont mené à cette situation.

D'un côté, "l'administration a failli à son devoir et son engagement de sensibilisation et d'explication du nouveau régime". "Il était question d'une tournée régionale pour aller au plus près des commerçants, les directeurs régionaux des impôts devaient expliquer le nouveau régime. Cela n'a pas été fait", nous confie-t-on. 

"De grosses lacunes en termes de communication ont été constatées. Une loi qui introduit un changement aussi important doit être marketée, expliquée,....", insiste l'un de nos interlocuteurs.

Il ne suffit pas de publier une brochure ou une vidéo explicative sur les réseaux sociaux pour s'assurer de l'adhésion des contribuables et leur acceptation du changement.

Ce flou et cette ignorance du nouveau régime ont été instrumentalisés par "des grossistes qui n'ont pas intérêt que la CPU soit mise en place", nous explique une source au fait de ce dossier épineux. "Les grossistes font d'importants chiffres, mais se cachent parmi les forfaitaires. Désormais, ils doivent commencer à travailler avec une comptabilité, ce qui n'arrange pas leurs affaires", ajoute notre interlocuteur. 

La réunion du vendredi entre les syndicats les plus représentatifs et la tutelle et la DGI avait pour but de trouver des solutions pour dénouer la situation et remédier aux lacunes qui ont marqué la mise en œuvre de la CPU et l'intégration des commerçants à l'AMO. 

>>Lire aussi : 

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