Les gravures rupestres de Berkane, véritables témoins de la présence humaine

Les gravures rupestres récemment découvertes dans la grotte du Chameau à Zegzel, dans la province de Berkane, attestent de la présence humaine dans cet endroit. Cela ne signifie pas pour autant que des hommes s’y sont véritablement installés, mais confère à la grotte une valeur résolument culturelle.

Les gravures rupestres de Berkane, véritables témoins de la présence humaine

Le 27 janvier 2021 à 15h28

Modifié 11 avril 2021 à 2h50

Les gravures rupestres récemment découvertes dans la grotte du Chameau à Zegzel, dans la province de Berkane, attestent de la présence humaine dans cet endroit. Cela ne signifie pas pour autant que des hommes s’y sont véritablement installés, mais confère à la grotte une valeur résolument culturelle.

La découverte des plus anciennes gravures rupestres d’Afrique du Nord, rapportée dimanche par l’agence MAP, ne date pourtant pas de quelques jours. Contactés par Médias24, Aicha Oujâa, directrice du département d’archéologie préhistorique de l’Institut national des sciences de l’archéologie et du patrimoine (INSAP), et Hassan Aouragh, professeur de géologie et d’archéologie à l’université Mohammed Ier d’Oujda, expliquent que cette découverte remonte en réalité à décembre 2012. A l’époque, c’est Hassan Aouragh et Ramón Vinas, chercheur espagnol de l’Institut de paléoécologie et de l’évolution sociale à Tarragone, qui mettent la main sur ces gravures.

"On les a en effet découvertes en 2012, mais nous avons dû réaménager la grotte pour la rendre accessible et poursuivre nos recherches", précise Hassan Aouragh. "Entre-temps, il a notamment fallu évaluer la superficie gravée et identifier les figurations. Au printemps 2019, nous avons pris beaucoup de photos avec des filtres spéciaux, de jour et de nuit, mené nos investigations et établi des descriptions lors de fouilles archéologiques. En 2020 en revanche, à cause de la crise sanitaire, nous n’avons pratiquement rien fait", complète Aicha Oujâa.

L’intérêt majeur de ces gravures, expliquent les deux chercheurs, est que ce sont "les plus anciennes qui ont été découvertes jusqu’à présent". Elles appartiennent à la période préhistorique du paléolithique supérieur et ont entre 12.000 et 13.000 ans. "Cela coïncide avec l’occupation humaine d’autres grottes de la région de Berkane, notamment la grotte de Tafoughalt (autrement appelée grotte des Pigeons), qui a été occupée par l’homme durant le paléolithique supérieur", informe Aicha Oujâa.

La grotte du Chameau, du nom de la cavité où ces gravures rupestres ont été découvertes, se situe en effet "dans une zone orientale riche en sites archéologiques ; ceux-ci ont fourni des témoins d’occupation humaine comportant des documents lithiques significatifs, paléolithiques et néolithiques", indique Hassan Aouragh dans une note annexe relative à cette découverte. Parmi ces sites figure ainsi la grotte préhistorique de Tafoughalt, l’une des plus célèbres d'Afrique du Nord, située à 9 km de la grotte du Chameau. "Elle conserve un épais remplissage doté d’une longue séquence stratigraphique comprenant trois grandes cultures préhistoriques : pré-moustérienne, atérienne et ibéromaurusienne", ajoute le chercheur. Le Maroc est d’ailleurs un important vivier de gravures rupestres : le Centre national du patrimoine rupestre recense plus de 400 sites répartis sur plusieurs régions au niveau national.

Une présence humaine relative

La grotte du Chameau est quant à elle un important complexe karstique (du karst, un massif calcaire où l’eau a creusé des cavités), classé patrimoine national en décembre 1953, et qui a fait l’objet de diverses études géologiques, spéléologiques et désormais archéologiques. "C’est une grotte classée au patrimoine national, mais uniquement sur la base de données spéléologiques et géologiques. La découverte de ces gravures nous permet de confirmer la présence humaine. Cela confère à la grotte une valeur culturelle, et plus uniquement spéléologique et géologique", souligne Hassan Aouragh.

La présence humaine semble toutefois relative : Aicha Oujâa suggère que la grotte n’a jamais été habitée, mais seulement visitée. "Nous n’avons pas d’éléments qui laisseraient supposer que l’homme se soit véritablement installé dans cette grotte. Sa morphologie n’incite pas à l’occupation humaine car il y a des gouffres très profonds et peu de luminosité ; les rayons du soleil ne pénètrent pas. Or l’homme recherche d’abord un lieu d’où il puisse avoir une vue sur son paysage environnant ; à la fois pour surveiller son environnement et prévenir l’intrusion d’animaux sauvages potentiellement dangereux, et pour guetter le gibier. A l’époque, les hommes étaient des chasseurs et des cueilleurs, pas des producteurs", explique Aicha Oujâa. Selon la note rédigée par Hassan Aouragh, la cavité s’étend sur environ 1.150 m de longueur.

Des gravures animales

Cette découverte est constituée d’un petit panel de gravures préhistoriques "figuratives, semi-figuratives et géométriques, actuellement en cours d’étude, pour préciser son âge et son contexte culturel". En les étudiant, l’équipe de chercheurs s’est rendu compte qu’elles étaient différentes des autres gravures rupestres recensées au Maroc, qui représentent "des animaux distincts et bien dessinés". Celles-ci regroupent une quinzaine d’éléments, eux-mêmes scindés en deux unités : "On range dans la première unité des représentations figuratives ou semi-figuratives, de type zoomorphe, quoique incomplètes, et, dans la seconde, des formes géométriques paraissant associées aux motifs fauniques cités."

Difficile pour l’heure de dire ce que ces gravures représentent, si ce n’est qu’il s’agit de gravures animales. "Nous sommes en train de poursuivre nos investigations pour savoir de quel type d’animal il s’agit", précise Aicha Oujâa. Difficile également de dire comment elles ont été gravées : "Nous n’en savons rien pour l’instant. L’équipe va scanner les parois et, grâce à la tracéologie, nous allons pouvoir identifier les outils qui ont été utilisés pour dessiner ces gravures."

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