Le CESE alerte sur les lacunes de la sécurité sanitaire des aliments

La sécurité sanitaire des aliments (SSA) au Maroc souffre de nombreuses lacunes, notamment une forte insuffisance des contrôles du secteur formel, sans compter l’informel qui échappe aux circuits officiels. Le CESE déplore aussi que la SSA ne soit pas clairement mentionnée dans les contrats de partenariat entre le gouvernement et les fédérations interprofessionnelles.

Le CESE alerte sur les lacunes de la sécurité sanitaire des aliments

Le 18 juin 2020 à 13h01

Modifié 11 avril 2021 à 2h46

La sécurité sanitaire des aliments (SSA) au Maroc souffre de nombreuses lacunes, notamment une forte insuffisance des contrôles du secteur formel, sans compter l’informel qui échappe aux circuits officiels. Le CESE déplore aussi que la SSA ne soit pas clairement mentionnée dans les contrats de partenariat entre le gouvernement et les fédérations interprofessionnelles.

Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a organisé, mercredi 17 juin, une rencontre virtuelle pour présenter son avis intitulé ''Pour une véritable politique publique de sécurité sanitaire des aliments (SSA) axée sur la protection des consommateurs et favorisant une compétitivité durable de l’entreprise au niveau national et international''.

Établissements alimentaires non agréés ; insuffisance criante des contrôles dans le secteur formel et la traçabilité du marché ; rôle limité des associations de défense du consommateur ; manque d’investissement dans la recherche scientifique liée au domaine alimentaire… C’est peu dire que la sécurité sanitaire au Maroc souffre de nombreuses lacunes énumérées dans l’avis du CESE.

Le secteur formel pas assez contrôlé

A fin août 2019, l’Office national de sécurité sanitaire des produits alimentaires (ONSSA) a agréé près de 7.500 établissements du secteur alimentaire. Pourtant, nombreux sont les établissements à ne disposer ni d’agréments, ni d’autorisations sanitaires. ''Ils continuent, en effet, à produire et mettre sur le marché des produits alimentaires dans des conditions qui ne respectent pas la réglementation en vigueur en matière de SSA'', déplore le CESE.

De plus, le secteur formel ne fait pas suffisamment l’objet de contrôles : à hauteur de 1% pour les abattoirs de viande (en 2018, seuls 8 abattoirs de viande justifient de l’agrément de l’ONSSA), 8% pour les abattoirs de poulet et 22% pour l’agroalimentaire. S’agissant des abattoirs de volailles, seuls 27 d’entre eux sont agréés sachant qu’il existe plus de 15.000 tueries non autorisées. Partant de ces chiffres, le CESE en déduit que le secteur formel ''se retrouve par conséquent au même niveau de vulnérabilité que le secteur informel : pas de traçabilité, pas de respect des normes d’hygiène, etc.''.

Quant au secteur informel, par nature difficile à quantifier, le CESE indique que ''certains acteurs auditionnés estiment qu’il représente plus de 20% du PIB hors secteur primaire, et correspond à plus de 68% dans le commerce et 19% dans l’industrie agroalimentaire. Ce secteur, qui échappe totalement au contrôle et à la surveillance, représente un risque sanitaire majeur pour le consommateur car la traçabilité n’y est pas du tout assurée.''

La sécurité sanitaire pas explicitement exigée dans les contrats de partenariat

Les opérateurs des filières des produits alimentaires sont pourtant tenus de mettre en place, au sein de leurs établissements, ''les moyens destinés à prévenir ou à maîtriser les dangers spécifiques à leur activité ainsi qu’un système fiable de traçabilité'', rappelle le CESE. Les exploitants ''doivent non seulement respecter les bonnes pratiques d’hygiène (BPH), établies réglementairement, mais également élaborer des procédures propres à son établissement''.

Ces procédures sont fondées sur les principes de la méthode HACCP, consacrée par le ''Codex Alimentarius'' (ou ''Code alimentaire''), un ensemble de normes relatives à la sécurité sanitaire alimentaire qui relève d’un programme commun entre l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et l’Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), ainsi que par la réglementation nationale et celle de l’Union européenne. Chaque établissement agréé doit disposer d’un plan de maîtrise sanitaire (PMS) qui rassemble les BPH, le HACCP et la traçabilité, et de procédures écrites de mise en place du PMS ainsi que de preuves de son application.

Problème : selon le rapport annuel de 2018 de la Cour des comptes, cité par le CESE, ''une proportion très appréciable des entreprises agroalimentaires ne disposent pas de plan de maîtrise sanitaire''. Il y a bien eu la signature de contrats-programmes entre le gouvernement et les fédérations interprofessionnelles (14 représentants des filières végétales et 5 pour les filières animales), mais ''ces contrats de partenariat ne mentionnent, que de manière indirecte, l’exigence de sécurité sanitaire et l’importance de produire et mettre sur le marché des produits sûrs''.

Une situation de surcroît aggravée ''par le fait que plusieurs acteurs de la chaîne alimentaire n’adhèrent pas aux organisations interprofessionnelles ; ce qui constitue une entrave à leur développement et à leur contact avec les pouvoirs publics pour recevoir des subventions existantes''.

Des consommateurs insuffisamment informés

Autre lacune relevée par le CESE : le rôle des associations de défense des consommateurs est limité par ''le manque d’information, d’éducation, la faiblesse des moyens humains et matériels et parfois même le manque de probité de certains acteurs''.

Pourtant, l’arsenal législatif ne manque pas : la loi n°31-08, entrée en vigueur le 7 avril 2011, édicte les mesures de protection du consommateur. Problème, là encore : ''certaines dispositions de cette loi tardent à voir le jour notamment la mise en place des mécanismes institutionnels chargés d’assurer la protection du consommateur, le renforcement des rôles des associations de protection du consommateur, la constitution de la fédération nationale de protection du consommateur, ainsi que la création du conseil consultatif supérieur de la consommation, en tant qu’institution indépendante'', relève le CESE.

Enfin, le CESE déplore l’insuffisance d’investissement en recherche scientifique, en l’occurrence dans le domaine alimentaire. Dans l’édition 2019 du Global Food Security Index (GFSI), mentionné par le CESE, le Maroc est classé 112e sur 113 pays en termes de dépenses publiques dans la recherche et développement (R&D) en agriculture. ''Le score du Maroc est jugé très faible sur l’échelle du GFSI. Ce sont les dépenses du gouvernement en R&D en agriculture, telles que reflétées par l’indice d’orientation agricole (IOA). Cette mesure est utilisée par les objectifs du développement durable des Nations unies, comme indicateur des investissements dans le secteur agricole, et qui concernent l’infrastructure rurale, la recherche et la vulgarisation agricoles, le développement technologique et les banques de gènes pour les plantes et les animaux d’élevage, afin d’améliorer la capacité de production agricole''.

Le CESE recommande ainsi de renforcer la R&D ''en soutenant la recherche scientifique afin de disposer d’une expertise scientifique nationale, avec la mise au point de normes nationales, pour conduire des analyses de risques fondées sur des preuves scientifiques'' et ''en encourageant la formation post-universitaire, à même de hisser le niveau des compétences nationales en termes de connaissances techniques, scientifiques et de diplomatie, pour défendre les intérêts du Maroc auprès des instances internationales''.

>>Lire aussi : Sécurité sanitaire des aliments : Les recommandations du CESE

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