Environ 12.000 manifestants se sont donné rendez-vous à Sahat Sraghna à Casablanca, pour une marche de soutien qui les a menés jusqu’à l’intersection des boulevards Fida et 2 mars.

La manifestation a été organisée par une vingtaine d’associations et de partis politiques pour protester contre les tueries de civils palestiniens perpétrées par des soldats et des colons israéliens. L'ampleur de la manifestation n'est pas étonnante: le Maroc a toujours été d'une solidarité totale et inconditionnelle avec le peuple palestinien.

Selon notre collègue d’Al Majalla24, présent sur les lieux, près de 60% des manifestants et du service d’ordre faisaient partie de l’association islamiste non reconnue Al Adl Wal Ihsane.

Le reste était composé de membres de partis politiques comme l’USFP, le PAM ou le PJD, et de la matrice idéologique de ce dernier, le MUR (Mouvement unicité et réforme).

Lors de cette marche, les manifestants ont scandé entre 10 heures et midi des slogans contre les crimes barbares de l'Etat d'Israël et contre l'occupation israélienne en Palestine.

"Avec l'âme et le sang, nous te défendrons Al Aqsa", "La Palestine est libre" et "Le Maroc et la Palestine, un seul peuple et pas deux" sont les slogans scandés en chœur par les manifestants en keffieh qui ont également appelé au soutien à la résistance palestinienne.

Si ces slogans n’étaient pas différents de ceux des précédentes manifestations de soutien au peuple palestinien, certains manifestants ont cependant donné une dimension confessionnelle, appelant indirectement à la haine contre les juifs.

Dans le cortège, on a pu voir deux manifestants grimés en juifs orthodoxes exhibés à la foule avec des mitraillettes (en plastique) pointées sur leur nuque par des pseudo-combattants palestiniens. On a aussi aperçu quelques manifestants porteurs de roquettes en carton. Voir la vidéo

Cette représentation symbolique a provoqué plusieurs réactions sur les réseaux sociaux dénonçant le laxisme du service d’ordre d’Al Adl Wal Ihsanne et les répercussions négatives sur l’image du Maroc.

Au lendemain de cette manifestation, certains milieux sionistes ont d’ailleurs largement relayé ces images en appelant au boycott touristique du Maroc avec le slogan suivant: "Le Nazislamisme en action à Casablanca au Maroc dimanche sous la bienveillance des autorités."

Notre rédaction a contacté un des acteurs principaux de cette manifestation ainsi que le secrétaire général du PPS et le ministre du Tourisme pour recueillir leur réaction à ces images

Fathallah Arsalane, porte-parole d’Al Adl Wal Ihsane, se défend d’abord d’avoir organisé seul la manifestation pour éviter d’endosser l’entière responsabilité de ce dérapage.

"Nous n’avons aucun problème avec le peuple juif que tous les musulmans reconnaissent comme des gens du Livre. Notre combat porte plutôt sur la colonisation des autorités israéliennes et sur leurs méthodes criminelles de répression sauvage du peuple palestinien."

Interrogé sur la portée médiatique des images -devenues virales- des deux juifs orthodoxes exhibés comme des boucs émissaires, notre interlocuteur affirme ne pas les avoir vues.

"Je considère que cette mise en scène est un malentendu car je pense que les jeunes qui les pointaient avec leur mitraillette en plastique n’avaient pas l’intention de véhiculer un appel à la haine des juifs. Ce message maladroit voulait avant tout pointer du doigt les criminels de guerre israéliens. Ces derniers peuvent être des soldats de l’entité sioniste mais aussi de simples civils comme les colons disposant d’un permis de tuer les Palestiniens."

Lahcen Haddad, ministre du Tourisme se veut quant à lui moins indulgent et s’indigne clairement de ce dérapage qui ne représente pas la culture du Maroc.

"Après avoir visionné les images en question, je considère qu’elles ne reflètent pas les valeurs de tolérance et de coexistence qui ont toujours caractérisé nos valeurs sociétales. Notre pays est clairement contre la politique d’occupation israélienne réprimant les droits légitimes des palestiniens mais nous rejettons toute forme d’antisémitisme ou d’antijudaïsme."

"Exhiber des soi-disant juifs orthodoxes avec des mitraillettes pointées sur leur tête est contraire à l’esprit de cette marche qui se voulait pacifique. Des extrémistes s’y sont certainement infiltrés mais les organisateurs doivent assumer leurs responsabilités. Le porte-parole du Mouvement populaire que je suis est complètement opposé à ce genre de représentation car le conflit israélo-palestinien n’est ni confessionnel ni culturel."

Nabil Benabdellah, secrétaire général du PPS considère tout comme son collègue au gouvernement que l’initiative de ces manifestants est inacceptable et contre-productive mais que les excès ne se trouvent pas d’un seul côté.

"Ce dérapage stupide n’aurait jamais dû avoir lieu mais le Maroc ne peut pas être mis sur le banc des accusés alors que le véritable responsable des excès est l’Etat meurtrier d’Israël."

"Si nous devions répertorier tous les dérapages israéliens, on ne sortirait pas de l’auberge car les atteintes contre les vies palestiniennes sont légion."

"Tous les meurtres sont permis du côté israélien et ils sont à peine dénoncés alors qu’on fait tout un tintamarre des excès de langage comme ceux de la manifestation de dimanche."

Pour le secrétaire général du PPS, il n’y a pas eu de laxisme des autorités marocaines car toutes les manifestations dans le monde peuvent occasionner des dérapages incontrôlés.