Croissance inclusive, le Maroc mauvais élève de l’Afrique du Nord

C’est un rapport fort instructif que vient de publier la Banque Africaine de Développement (BAD) sur la croissance inclusive en Afrique du Nord. La Banque a en effet mis au point son indice de l’inclusion. Le Maroc et l’Algérie sont les deux mauvais élèves de la région. Lecture.

Croissance inclusive, le Maroc mauvais élève de l’Afrique du Nord

Le 9 septembre 2014 à 10h10

Modifié 27 avril 2021 à 22h31

C’est un rapport fort instructif que vient de publier la Banque Africaine de Développement (BAD) sur la croissance inclusive en Afrique du Nord. La Banque a en effet mis au point son indice de l’inclusion. Le Maroc et l’Algérie sont les deux mauvais élèves de la région. Lecture.

Dans ce rapport, on apprend qu’en dépit des progrès enregistrés par les économies d'Afrique du Nord, parmi lesquelles l’économie marocaine, les inégalités entre les groupes sociaux se sont fortement accentuées dans deux domaines: sur le marché du travail et entre les régions. En d’autres termes, ni sur le marché du travail ni en termes d’inégalités régionales, la croissance –réelle- n’a été inclusive.

L’ironie du sort veut qu’entre 2008 et 2010, ce sont les économies tunisienne, égyptienne et libyenne qui ont été les plus inclusives et celles qui ont généré le moins d’inégalités et mieux redistribué les richesses.

Il ne faut pas y voir de cause à effet. Mais les causes des révolutions en Afrique du Nord n’ont pas été étudiées sous l’angle des causalités économiques et sociales. De rares articles scientifiques ou observations journalistiques s’y sont intéressés. Ce que l’on constate, c’est qu’en Tunisie, l’explosion sociale a culminé avec le pic de diplômés universitaires formés et le pic du chômage des jeunes.

A la recherche de l’inclusion

Une synthèse de la situation socio-économique du Maroc, de l’Algérie, de la Tunisie, de la Libye et de l’Égypte, voilà donc ce que propose la BAD dans son nouveau rapport. En matière de modèle économique, la BAD constate en effet que la croissance en Asie réduit bien davantage les inégalités que la croissance en Afrique.

D’emblée, la banque multinationale de développement dont le siège se trouve à Abidjaninsiste sur l'importance d'une croissance et d’un développement inclusifs.

Une meilleure croissance pour les pays qui ont connu le Printemps arabe

Dans le chapitre 1, intitulé «Comment mesurer le caractère inclusif de la croissance?», le rapport de l’institution  présente une nouvelle approche pour mesurer les progrès du bien-être, laquelle approche permet selon la BAD une meilleure comparaison de la trajectoire de développement l’Afrique du Nord avec celles d'autres pays en développement.

Sur la base de cette nouvelle approche, il s'avère que sur la période 2008-2010, c'est-à-dire juste avant que le début du Printemps arabe, les cinq pays d'Afrique du Nord étudiés ont affiché une performance inférieure à la moyenne enregistrée dans les autres pays au plan de l’inclusion. Mais c'est ce qui est paradoxal, c'est que ce sont les pays qui ont connu les turbulences du Printemps arabe qui affichent les meilleurs classements. Ainsi, la Tunisie arrive en tête, suivie de l'Égypte de la Libye. Viennent ensuite le Maroc puis l'Algérie. 

Le tableau ci-dessous présente l’indice de croissance inclusive (moyenne sur la période 2008-2010) :

 

 

Chômage et secteur informel

Dès lors, et en dépit les progrès enregistrés par nos économies, le rapport affirme que les inégalités entre les groupes sociaux se sont considérablement accentués dans deux domaines: sur le marché du travail et entre les régions.

Ces inégalités constituent le principal obstacle au caractère inclusif de la croissance, alors même qu’une croissance inclusive dans ces pays permettrait justement un meilleur partage des richesses entre classes d’âges, catégories sociales et entre régions.

Autre point important évoqué par le rapport: les marchés du travail respectifs de la région sont tout à fait inégalitaires, car caractérisés par une fracture considérable entre secteurs formel et informel. Les obstacles à l’emploi renforcent les inégalités et font basculer les salariés vers l’informel.

En effet, le taux de participation au marché du travail de la population en âge de travailler reste extrêmement faible (inférieur à 50 %), tandis que celui du chômage avoisine les 10 % dans tous les pays d’Afrique du Nord. Selon la BAD, les jeunes de 15 à 24 ans risquent trois fois plus de se retrouver au chômage que les adultes de 25 ans et plus.

Autre constat tout aussi frappant: le chômage est particulièrement élevé parmi les jeunes gens éduqués et les femmes, lesquelles sont deux fois plus susceptibles d'être au chômage que les hommes. La situation s’avère encore plus grave pour les jeunes femmes âgées de 15 à 24 ans, trois fois plus exposées au chômage que les femmes de plus de 24 ans. C’est dire si les inégalités encore les hommes et les femmes sont criantes dans nos sociétés.

Le chômage peut conduire à des troubles sociaux

Comme le rappelle si bien le rapport de la BAD, le chômage de longue durée conduit presque systématiquement à un retrait du marché de l'emploi, à la pauvreté chronique et à une marginalisation des populations. In fine, comme l’a démontré le Printemps arabe, le chômage de longue durée est susceptible d'exaspérer les populations aboutissant ainsi à des troubles sociaux.

Outre le chômage, les pays de la région souffrent de l’importance du secteur informel. En effet, une forte proportion des travailleurs nord-africains occupe un emploi précaire dans l’informel sans contrat ni protection sociale. Les chiffres sont alarmants: seuls 30 % des travailleurs au Maroc sont dotés d’un contrat de travail, contre 46 % en Tunisie et 50 % en Égypte.

Inégalités entre les régions

La situation est pour le moins hétérogène en Afrique du Nord.En effet, le rapport souligne que le niveau des revenus, tout comme d'autres indicateurs de bien-être, diffère sensiblement en fonction des zones géographiques, au sein même des pays d’Afrique du Nord.

Ces différences se reflètent, aussi bien dans la qualité des services publics et des aides sociales octroyées, qu’en termes d’opportunités d’emploi dans le secteur privé ou d’appui public au développement du secteur privé.

Au final, les pays d'Afrique du Nord ont une opportunité historique à saisir, conclut le rapport. Et pour cause, les dynamiques démographiques continueront de générer une masse de travailleurs sans cesse croissante jusqu'en 2020. Moyennant un marché du travail bien fonctionnel et un climat de l'investissement attrayant, cette dynamique pourrait favoriser une forte croissance.

Il convient de noter que la BAD demeure l’un des principaux partenaires de la région. Elle y compte plus de 100 opérations en cours d’exécution, financées par des prêts et des dons, pour un montant total de 7 milliards de dollars. Sa coopération avec Maroc est en constante évolution. Récemment, le Fonds Africa 50 initié par la BAD et destiné au financement des infrastructures au Maroc est venu établir son siège à Casablanca Finance City (CFC).

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