En Auvergne, le signal d'alarme des pompistes ruraux

(AFP)

Le 6 décembre 2014

"Si je ferme, c'est la mort du village." Le regard perdu dans la brume du massif du Sancy, le pompiste de Picherande ne cache pas son inquiétude face à la suppression annoncée des aides aux petites stations-services.

Après un licenciement, Alain Marion a repris en 2011 celle de ce bourg d'altitude du Puy-de-Dôme aux quelque 400 âmes, raconte-t-il en faisant le plein d'un client. Parce que les temps sont durs et les charges lourdes, il attend avec fébrilité les 130.000 euros de subvention qu'il a demandés au Comité professionnel de distribution de carburants (CPDC) lors de son installation.

D'autant que cette enveloppe, il pourrait ne "jamais en voir la couleur": le gouvernement a annoncé dans son budget 2015 la suppression des aides versées jusqu'alors par le CPDC pour contribuer à financer les mises aux normes environnementales imposées par l'Union européenne.

Comme M. Marion, quelque 2.200 petits détaillants attendent le traitement de leur dossier. A terme, peut-être autant de fermetures potentielles: en Auvergne, la moitié des 300 stations-services existantes seraient en péril, selon le Conseil national des professionnels de l'automobile.

Pour beaucoup, cette décision aura un effet "boule de neige" car rares sont les pompistes en zone rurale à ne tenir qu'un seul commerce. Lorsque l'épicerie historique de Picherande a fermé, Alain Marion a décidé de "résister": il a repris l'activité et amoncelle dans son hangar quantité de produits alimentaires et d'articles de quincaillerie.

- L’âne et la carriole -

Un point de ravitaillement indispensable pour les habitants du coin, face aux 35 kilomètres aller-retour qui les séparent du supermarché de Besse-et-Saint-Anastaise, le plus proche. Surtout l'hiver, quand la neige allonge encore la route.

"Va falloir ressortir l'âne et la carriole pour se déplacer!", lance mi-figue, mi-raisin Pierre Amblard, 70 ans, venu s'approvisionner en briques de lait et en bonbons, "son indispensable gourmandise".

Pire encore, sans les trois "pistolets" de la station sur la D203, c'est un rayon de 60 kilomètres à la ronde qui se trouvera asséché de la moindre goutte d'essence. Un exemple comme tant d'autres qui préfigure "une France sans pompes", d'après les professionnels de l'automobile.

Depuis une trentaine d'années, leur nombre n'a cessé de diminuer, passant de 40.000 en 1980 à 11.476 en 2013, indique la Fédération nationale de l'Artisanat automobile. Quatre millions de Français dépendent aujourd'hui de 871 stations dites "ultimes", dont la disparition provoquerait des pénuries de carburant.

"On est appelé à mourir", lâche Michel Roudaire qui a hérité de celle ouverte dans les années 1930 par son père à Saint-Ours-les-Roches (Puy-de-Dôme), à une heure de voiture plus au nord.

- Combler le vide -

Aujourd'hui, malgré l'installation de cuves à double paroi et la refonte de la piste édictées par Bruxelles, il craint de voir son outil de travail rouiller s'il ne trouve pas rapidement un repreneur. "Quel jeune acceptera de travailler sept jours sur sept, de faire des heures à gogo sans gagner une fortune?", s'interroge cet homme de 63 ans.

Pour Jean-Louis Puech, pompiste-garagiste à Lafeuillade-en-Vézie (Cantal), l'annonce de Bercy est aussi "un coup bas" pour le monde rural.

"On voit souvent à la télé de belles cartes postales des villages français qui font rêver. Sauf que si l'on n'a plus de carburant, ces campagnes disparaîtront. On n'aura plus rien à offrir, hormis les ronces qui repousseront!", tempête ce conseiller municipal.

A Buxières-les-Mines (Allier), la municipalité a décidé de combler le vide en installant prochainement une station automatisée, où le litre d'essence devrait être vendu trois centimes d'euro plus cher qu'ailleurs.

"C'est le prix à payer si l'on veut protéger nos commerces. Cela évite que les gens se rabattent sur les grandes surfaces pour faire leurs courses quand ils partent chercher du carburant", explique le maire, François Olivier.

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Le 6 décembre 2014

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