Avec une capacité de production estimée à 735.000 tonnes de muriate de potasse et 1 million de tonnes de sel de déglaçage par an, la mine de potasse de Khémisset permettra au Maroc, et au reste de l’Afrique, de faire face à la pénurie mondiale de potasse.

Actuellement en phase “d’études d’ingénierie”, le projet de potasse de Khémisset de la société minière Emmerson sera “le premier fournisseur de potasse en Afrique”, car jusqu’à présent “il n’y a pas de production de potassium dans le continent africain”, comme l’indique à Médias24 son PDG, Graham Clarke.

Si la société compte lancer la production à fin 2024-début 2025, ses dirigeants, joints par Médias24, sont confiants quant à la réalisation du projet dans les temps. Ils misent sur leur expertise, mais aussi sur la valeur ajoutée du projet pour la région de Khémisset et pour l’économie marocaine.

"Nous comptons transformer l’économie locale"

Selon le directeur général Maroc chez Emmerson, Lahcen Alloubane, la société "prévoit d’investir plus de 2,5 milliards de dollars au cours de la durée de vie du projet, y compris un investissement initial de plus de 400 millions de dollars. La durée de vie du projet étant estimée à 19 ans, en utilisant seulement 43% des ressources estimées et confirmées jusqu’à présent”.

“Le projet consiste en une mine souterraine de potasse, à plus de 400 mètres en dessous de la surface qu’il faudra extraire en tant que matière première, avant de la traiter sur le site pour obtenir le produit final. C’est un projet qui rassemble un écosystème autour de lui, notamment en créant des emplois et en rapportant le savoir-faire de l’équipe basée au Royaume-Uni, à travers des programmes de formations au profit de l’équipe installée au Maroc”, poursuit Lahcen Alloubane.

Pour Graham Clarke, la création d’un écosystème autour du projet est essentielle. “Emmerson est cotée à la bourse anglaise, mais ce projet est réalisé au Maroc. Il est donc important pour nous que sa réalisation soit faite dans les meilleures conditions en construisant une perspective environnementale et sociale, des interactions avec les parties prenantes, et que ses bénéfices soient ressentis et visibles au Maroc. Les habitants de la région luttent pour obtenir des emplois, et nous comptons transformer l’économie locale. J’ai travaillé dans le secteur minier tout au long de ma carrière et, là où il y a une mine, une communauté se construit autour. Il est important pour nous de faire partie de cette communauté qui va en bénéficier et garantir son succès.”

Aussi, le PDG de Emmerson estime que les ressources, les infrastructures et le peuple marocains constituent les principales raisons faisant du Maroc “le parfait endroit pour les investisseurs étrangers”.

La potasse pour combler la pénurie d’engrais

“Pour le Maroc, ce projet a un impact socio-économique. Il constitue un important potentiel d’utilisation d’engrais dans le continent et peut contribuer considérablement à faire du Maroc un hub de l'industrie des fertilisants. En raison du changement climatique, de l’urbanisation, de la croissance démographique, etc. il est nécessaire de nourrir les populations qui ne cessent pas de croître. Pour ce faire, il faut des engrais afin d'augmenter la productivité des sols. Or, l’Afrique est l’une des régions où l’on utilise le moins d’engrais par hectare. Il y a donc un important potentiel pour le continent, et la potasse peut jouer ce rôle”, indique Lahcen Alloubane.

Ce dernier souligne qu’il existe “une pénurie d’engrais dans le monde de nos jours, et ce, depuis le début de la pandémie du covid-19, qui a été exacerbée par le conflit ukraino-russe”. Selon Graham Clarke, “38% de l’approvisionnement mondial en potassium vient de la Russie et du Belarus”. “La Chine produit également beaucoup de potassium, mais elle en interdit l'exportation pour satisfaire son marché interne”, ajoute Lahcen Alloubane, mettant ainsi en exergue l’importance de ce projet pour le Maroc.

Construction en 2022 et production en 2024

Le DG Maroc nous apprend que le projet en est cours d'avancement. “Après avoir complété les études de faisabilité, nous avons beaucoup progressé en matière d’autorisations et de financement. Nous en sommes actuellement à la phase d’études d’ingénierie, qui est la dernière étape avant de passer à la construction du projet. En parallèle, nous progressons en matière de financement ; nous recevons un intérêt considérable, notamment de la part de banques marocaines, et sommes également en communication continue avec les autorités pour obtenir les autorisations dont nous avons besoin. Si tout se passe comme prévu, nous prévoyons de démarrer la construction fin 2022. Cela nous prendra deux ans avant de démarrer la production.”

“Nous maîtrisons le volet technique du projet ; soit les études d’ingénierie que nous faisons. Mais nous ne pouvons pas contrôler, le volet financier car nous dépendons des banques et des investisseurs. Cela dit, nous constatons un appétit certain de leur part, dû aussi à l'attractivité du Maroc pour les investisseurs étrangers, mais aussi au soutien des autorités, car tout le monde croit en ce projet que ce soit au niveau ministériel ou local. Sachant que les relations maroco-britanniques contribuent à faciliter la coordination, ce qui nous apporte également un énorme soutien”, confie Lahcen Alloubane.