Le gouvernement a-t-il enterré le projet de Registre social unifié ?

Depuis la constitution du gouvernement Akhannouch, rien ne circule sur l’ambitieux projet de mise en place d’un Registre social unifié pour mieux cibler les aides octroyées par l’Etat. Le projet était pourtant dans les starting-blocks, l’équipe El Otmani prévoyant de lancer une expérience pilote dans la région de Rabat dès 2022, pour une généralisation du système en 2024. Le RSU est-il mort-né ?

Le gouvernement a-t-il enterré le projet de Registre social unifié ?

Le 19 avril 2022 à 17h49

Modifié 19 avril 2022 à 20h58

Depuis la constitution du gouvernement Akhannouch, rien ne circule sur l’ambitieux projet de mise en place d’un Registre social unifié pour mieux cibler les aides octroyées par l’Etat. Le projet était pourtant dans les starting-blocks, l’équipe El Otmani prévoyant de lancer une expérience pilote dans la région de Rabat dès 2022, pour une généralisation du système en 2024. Le RSU est-il mort-né ?

C’est l’omerta sur le projet du Registre social unifié. Médias24 essaie depuis plusieurs semaines de s'informer sur l’évolution de cet ambitieux projet lancé sous le gouvernement El Otmani, mais aucune information ne circule.

Au ministère de l’Intérieur, département qui pilote le projet, nous n’avons obtenu aucune réponse. Idem pour le porte-parole du chef du gouvernement, Mustapha Baitas, qui n’a pas donné suite à nos questions sur le sujet, nous renvoyant vers le ministère de l’Intérieur.

Même silence observé auprès de la Banque mondiale, qui assiste le département de l’Intérieur sur le volet technique du projet et qui est un de ses bailleurs de fonds…

Au ministère des Finances, on se contente de nous dire que "le ciblage est une solution pour la Caisse de compensation", mais que pour cela "il faut que le RSU soit prêt et que les conditions soient réunies. C’est en cours".

Un silence plutôt surprenant autour d'un projet qui était en tête des priorités de l’ancien gouvernement, et qui devrait l’être davantage pour l’exécutif actuel.

Un projet-pilote à Rabat était prévu début 2022

Quelle interprétation faire de ce silence ? Le projet est-il en suspens ?  Est-il totalement enterré ?

Le lancement du projet était pourtant imminent. D’après les dernières informations communiquées par l’ancien gouvernement en juillet 2021, à l’occasion de l’adoption par le Conseil du gouvernement d’un décret relatif au projet, ce registre devait être lancé dès 2022 pour une phase pilote dans la Région de Rabat et la province de Kénitra, avant sa généralisation à l’ensemble du territoire en 2024.

Lire aussi : Registre national de la population : les détails du décret 

Projet stratégique et structurant, sa mise en place répondait à une double problématique, qui demeure toujours d’actualité : la fragmentation des mécanismes d’aide sociale de l’Etat (plus de 120 programmes) et le ciblage direct des subventions du gaz butane, de la farine et du sucre, en prévision de la suppression de la Caisse de compensation et son mécanisme d’aides aveugles.

En 2020 déjà, la crise de la Covid, qui avait imposé le versement d'aides directes aux familles impactées par le confinement, avait mis en exergue l'importance et l'urgence de la mise en place du RSU.

Le silence sur ce chantier stratégique est d’autant plus intrigant que le RSU vient répondre à une problématique très actuelle : celle du ciblage des subventions du gaz butane, du sucre et de la farine dont le budget a explosé cette année.

Au lieu du système actuel du « tout subventionner », le RSU allait permettre d’identifier, avec un système de scoring, les ménages éligibles, qui méritent cette subvention. Sa mise en place aurait permis non seulement de mieux cibler les aides octroyées, mais également de réaliser des économies subtantielles pour le budget de l'Etat.

Le RSU nécessaire pour la réforme de généralisation de la protection sociale

Le RSU est également un prérequis pour la généralisation des allocations familiales, une des composantes de la réforme de la généralisation de la protection sociale.

L'article 8 de la loi-cadre sur la protection sociale dispose que la généralisation des allocations passe particulièrement par trois actions :

-  la réforme des programmes d'aide, relatifs à la protection de l'enfance en vigueur (Tayssir...) afin de les regrouper et de les généraliser selon des critères d'éligibilité précis ;

- la réforme progressive de la Caisse de compensation, avec l'objectif de consacrer les marges budgétaires dégagées grâce à la décompensation progressive pour financer les allocations familiales ;

-  et l'adoption du Registre social unifié (RSU) comme outil pour un meilleur ciblage des catégories sociales éligibles aux aides.

Si le projet est reporté en raison de problèmes techniques, ce serait compréhensible, mais il faut le communiquer à l’opinion publique.

Mais s’il a été enterré en catimini, cela signifie une seule chose : le gouvernement actuel ne veut pas aller dans le sens de l’instauration d’aides directes aux ménages. L’actuel chef du gouvernement a montré à plusieurs reprises, par le passé, son désaccord avec cette politique. D’abord lors des négociations pour la constitution du gouvernement Benkirane en 2016, où il a conditionné sa participation à la majorité par la suppression du projet d’aides directes aux citoyens ; puis lors d’une de ses sorties médiatiques en tant que président du RNI, à l’occasion de la campagne électorale de 2021.

Une sortie où il avait expliqué qu’il n’était pas opposé à l’aide aux ménages, mais contre « l’assistanat », avançant que le meilleur moyen de soutenir les ménages était de leur donner les outils pour améliorer leurs revenus et leur capacité à créer de la richesse.

Si le chef du gouvernement maintient le même principe - qui peut se défendre -, il faut l'annoncer  à l’opinion publique et ouvrir le débat sur son bon fondement ou pas. Faute de quoi, la théorie du complot prend le dessus, et la question « à qui profite le statu quo ? » devient légitime à poser.

Une question à laquelle la réponse est simple, comme l’ont montré plusieurs études sur la problématique de la compensation. Le statu quo profite aux distributeurs de gaz butane, ainsi qu'aux producteurs de sucre et de farine, qui reçoivent aujourd’hui la subvention directe de l’Etat, avec les nombreux dysfonctionnements que l’on connaît.

Cette éventualité explique-t-elle l’arrêt net de ce projet qui allait mettre fin une fois pour toutes au système de la compensation ? Nous n’avons pas la réponse. Le gouvernement non plus visiblement…

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