Le Middle East Institute, think thank et centre culturel à but non lucratif basé à Washington, a publié le 18 janvier une note intitulée "Les nouveaux défis du Maroc en tant que gardien de l'approvisionnement alimentaire mondial : la géopolitique, l'économie et la durabilité des exportations mondiales d'engrais d'OCP". Son auteur est le professeur Michaël Tanchum, enseignant à l'Université de Navarre et chercheur principal associé en politique, au sein du programme Afrique du Conseil européen des relations étrangères.

"Alors que la plupart des indicateurs économiques signalent une poursuite ou même une aggravation des niveaux déjà élevés de l'inflation alimentaire mondiale en 2022, le rôle du Maroc dans le système commercial international, assurant à la fois l'approvisionnement et le prix des engrais, deviendra encore plus vital pour la stabilité et l'accessibilité des approvisionnements alimentaires", a indiqué l'auteur.

Dans son rapport annuel 2021 sur l'état de la sécurité alimentaire et de la nutrition dans le monde, la Food and Agriculture Organisation (FAO) a averti que "le monde était à un moment critique", estimant que 768 millions de personnes étaient confrontées à la faim en 2020.

Ainsi, en contribuant à endiguer la vague montante de la faim en Afrique, le Maroc deviendra l'un des principaux acteurs géopolitiques du continent.

L'auteur rappelle que, depuis le début de son industrie minière de phosphate en 1921, le Maroc a été une source majeure de phosphore pour les engrais synthétiques. L'utilisation mondiale de ces engrais a favorisé l'énorme augmentation des rendements des cultures qui ont entraîné le boom démographique mondial au cours des cent dernières années.

La même source estime que la manière dont le Maroc jouera son rôle de "gardien des chaînes d'approvisionnement alimentaire mondiales" dépendra en fin de compte de son succès dans la réalisation de la transition énergétique, grâce à l'expansion de son secteur des énergies renouvelables.

En utilisant ses importantes ressources d'énergie solaire pour alimenter la production d'hydrogène vert et d'ammoniac vert, ainsi que le dessalement, le Maroc pourrait échapper au cercle vicieux des prix ascendants de la spirale alimentation-énergie-eau. Les exportations d'hydrogène vert et d'ammoniac vert pourraient aider d'autres pays à faire de même.

La même source précise que "l'affaire est urgente tant pour le Maroc que pour la communauté internationale. Le Royaume a besoin d'investissements supplémentaires de plusieurs milliards de dollars dans les infrastructures pour parvenir à une industrie des engrais durable et neutre en carbone".

De tels investissements offrent aux États-Unis et à l'Europe l'opportunité d'élever le niveau de leur engagement stratégique auprès du Royaume. En l'absence d'un tel engagement, le Maroc s'associera à d'autres acteurs régionaux et mondiaux, modifiant la géopolitique de la sécurité alimentaire mondiale.