Les nouvelles routes de la soie, un projet hautement stratégique pour la Chine et le Maroc

Les visions stratégiques du Maroc et de la Chine, en matière d’économie et de commerce international, se rejoignent et se mettent en synergie pour faire du Maroc un "pays pivot" dans le projet chinois des nouvelles routes de la soie.

Les nouvelles routes de la soie, un projet hautement stratégique pour la Chine et le Maroc

Le 9 janvier 2022 à 18h23

Modifié 10 janvier 2022 à 7h29

Les visions stratégiques du Maroc et de la Chine, en matière d’économie et de commerce international, se rejoignent et se mettent en synergie pour faire du Maroc un "pays pivot" dans le projet chinois des nouvelles routes de la soie.

Le Maroc et la Chine ont signé mercredi 5 janvier 2021, une convention portant sur le plan de mise en œuvre conjointe de “l’initiative de la ceinture et de la route” (Belt and Road Initiative), lors d’une cérémonie à distance, qui a réuni le ministre des affaires étrangères Nasser Bourita au vice-président de la Commission nationale chinoise de la Réforme et du Développement, Ning Jizhe. Que signifie cette initiative? que signifie cette convention?

Le Maroc a intégré ce projet plus communément appelé “les nouvelles routes de la soie”, dès 2017, suite à la signature d’un mémorandum d’entente avec la Chine, comme étant le premier pays maghrébin et l’un des premiers pays africains à le rejoindre.

Cette nouvelle convention, élaborée conjointement par les deux pays afin de mettre en œuvre ce partenariat, constitue une feuille de route globale, à plusieurs niveaux et dans plusieurs domaines, selon Ning Jizhe.

Ce plan met en place un cadre bien pensé, avec des principes clairs et des mécanismes solides, de même qu’il fournit un outil complet pour la gestion stratégique et le déploiement concret d'un partenariat global allant du dialogue politique à une coopération sectorielle transversale, explique Nasser Bourita.

Cette Convention vise à favoriser l'accès aux financements chinois prévus par l’initiative la Ceinture et la Route, pour la réalisation de projets d’envergure au Maroc ou pour faciliter les échanges commerciaux, établir des joint-ventures dans différents domaines (parcs industriels, énergies, y compris les énergies renouvelables).

Il est également question d’encourager la coopération en matière de recherche et développement et la coopération technologique et technique, ainsi que la formation professionnelle, indique la MAP.

Le gouvernement chinois s’engage, en vertu de cette convention, à encourager les grandes sociétés chinoises à s’implanter ou à investir sur le territoire marocain notamment dans les secteurs de l’industrie automobile, aéronautique, high-tech et e-commerce, industrie agricole et textile, etc.

Les nouvelles routes de la soie, un projet pharaonique à portée mondiale

Initialement appelée “One Belt, On Road Initiative”, elle a été renommée “Belt and Road Initiative”, mais elle est plus connue sous le nom des nouvelles routes de la soie. C’est un projet pharaonique et fondateur de la nouvelle stratégie de la Chine dans le monde.

Portée par le président chinois Xi Jinping, dès son accession au pouvoir en 2013, elle vise à accompagner le déploiement de l’économie chinoise dans le monde. La Chine consacrée “usine du monde” et dépendante de ses exportations avait besoin de sécuriser les routes commerciales afin d’approvisionner ses principaux marchés, notamment en Europe.

La Chine se trouvait également largement dépendante de la route maritime qui part des ports de son littoral-Est dans la mer de Chine en passant par le détroit de Malacca. Ce projet de faire renaître l’ancestrale route de la soie, qui relie la Chine à l’Europe, prend donc tout son sens. Il est considéré comme hautement stratégique et prioritaire par le pouvoir chinois.

Plus concrètement, cela consiste en des investissements colossaux dans les infrastructures, routières, portuaires et logistiques; des investissements financés par l’État chinois, dans les pays de passage. Pour plusieurs pays en développement qui manquent d'infrastructures et de moyens de financement, c'est considéré comme une aubaine.

A son début, cette vision se basait sur deux routes principales, la première terrestre passant par l’Eurasie et l’autre maritime passant par le canal de Suez. Désormais, les nouvelles routes de la soie se conçoivent au pluriel, voulant toucher différents pays et différentes parties du globe, mais le concept reste le même : déployer la force commerciale chinoise à travers le monde.

Toutefois, ces investissements ne sont pas toujours vus d’un bon œil. Les médias occidentaux insistent souvent sur la faible capacité des pays à rembourser leurs dettes et le risque de perte de la souveraineté sur ces infrastructures. Le port de Hambantota au Sri Lanka qui a été cédé à la Chine pour 99 ans, est le cas le plus souvent mis en avant.

Le Maroc et la Chine, des partenaires naturels pour un tel projet

Le Maroc est un pays qui investit lourdement dans son infrastructure et ce n’est pas prêt de finir. Même si l’infrastructure routière et portuaire marocaine a connu un développement colossal pendant les deux dernières décennies, le Maroc aspire à faire davantage.

De grands projets attendent tels que le port de Dakhla-Atlantique, la ligne ferroviaire vers les provinces du sud, l’extension de la ligne à grande vitesse, etc. Les projets du Maroc relatifs à ses ambitions dans les énergies renouvelables sont également très coûteux et pourraient potentiellement profiter de ces financements.

Un financement chinois serait forcément le bienvenu, mais ce n’est pas ce qu’attend le Maroc le plus de son partenariat avec la Chine. Le Maroc ne cherche pas simplement à être un point de passage ou une porte d’entrée des marchandises, il veut devenir une plaque tournante de l’industrie mondiale.

Et cela, la Chine l’a bien compris. C’est la raison pour laquelle ce plan d’action ne concerne pas simplement les infrastructures logistiques, mais aussi l’énergie, l’industrie, la technologie, la recherche et développement et la formation, tout en encourageant les grandes entreprises chinoises à s’installer au Maroc.

La Chine voit en le Maroc un partenaire idéal dans sa stratégie des nouvelles routes de la soie, notamment grâce à sa position géographique entre l’Afrique et l’Europe, ses infrastructures, sa connectivité logistique à l’international, sa main d'œuvre qualifiée et son environnement des affaires.

Au moment où s’opère une reconfiguration des chaînes de valeur internationales en faveur de plus de proximité par rapport aux grands marchés tels que l’Europe et les États-Unis, la Chine peut faire du Maroc une base relais pour son industrie. 

C’est du moins l’ambition du Maroc qui, à travers la cité Mohammed VI Tanger Tech; veut offrir un environnement attractif pour les entreprises chinoises. Un projet qui n'avance pas, freiné notamment par la pandémie, mais qui pourrait profiter d’un nouveau départ à l’occasion de cette nouvelle convention signée entre les deux pays et où la Chine s’engage à encourager ses entreprises à s’installer au Maroc.

Cette convention comporte également une volonté de développer des projets tripartites entre le Maroc et la Chine à destination de l’Afrique. L’exemple du partenariat avec Sinopharm pour la production du vaccin pour les besoins de l’Afrique témoigne de l’étendue du potentiel qui existe dans ce sens.

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