Entretien. ATK détaille les piliers de la réforme de la santé

Deux réformes importantes sont menées en parallèle : celle de la protection sociale qui, à son tour, impose une refonte du système de la santé. Le ministre Khalid Ait Taleb explique, dans cet entretien accordé à Médias24, les piliers de la réforme et les changements qu'elle va apporter dans la vie des Marocains.

Entretien. ATK détaille les piliers de la réforme de la santé

Le 6 janvier 2022 à 19h39

Modifié 6 janvier 2022 à 23h02

Deux réformes importantes sont menées en parallèle : celle de la protection sociale qui, à son tour, impose une refonte du système de la santé. Le ministre Khalid Ait Taleb explique, dans cet entretien accordé à Médias24, les piliers de la réforme et les changements qu'elle va apporter dans la vie des Marocains.

Le ministre de la Santé, Khalid Ait Taleb, qui voit son périmètre élargi à la protection sociale durant ce nouveau mandat, doit agir sur plusieurs fronts, tous urgents et prioritaires.

Il doit faire face à la pandémie qui se poursuit avec la nouvelle vague Omicron et son ascension fulgurante.

Il doit renforcer la souveraineté sanitaire, une notion qui a pris toute son ampleur avec la crise sanitaire. À l'instar d'autres pays, le Maroc a compris la nécessité d'investir dans les domaines stratégiques, en vue d'assurer son indépendance sanitaire notamment.

Le ministre doit aussi mener la réforme du système de santé pour accompagner le chantier de la généralisation de la protection sociale.

Dans cette deuxième partie de l'entretien accordé à Médias24, ATK s'est exprimé sur la réforme de la santé et sur tous les projets associés à ce chantier colossal.

Médias24. La réforme de la santé et celle de la protection sociale vont de pair. 2022 est l'année de l'intégration des ex-Ramédistes au régime AMO. Comment se fera cette intégration ?

Khalid Ait Taleb. La protection sociale a trait à quatre grands axes : la couverture médicale généralisée, les allocations familiales, les indemnités pour perte d'emploi et l'élargissement de l'assiette des retraités. Ce qui nous interpelle aujourd'hui, et pour lequel l'échéancier est court, c'est la couverture médicale. Nous devons clôturer ce chantier d'ici fin 2022.

Toutes les personnes ramédistes ou affiliés à un autre système doivent rejoindre l'AMO. Un travail énorme a été fait pendant 2021 pour intégrer les travailleurs non salariés. Il ne reste plus que trois profils qui vont rallier le régime. Un arsenal juridique a accompagné ce travail. La grande partie du travail qui reste consiste à transférer les Ramédistes dans le régime AMO. Pour cela, le scénario est déjà prêt. D'ici six mois, on se penchera sur le versement, en une seule fois, des Ramédiste dans le régime. Ces personnes sont connues, on connaît leur dépenses, les pathologies les plus fréquentes.

Il y a quatre pathologies qui consomment plus de 90% des dépenses de santé : l'hypertension artérielle et tout ce qui s'ensuit, le diabète, le cancer et l'insuffisance rénale. Si on arrive à maîtriser ces grands paniers de soins entre les dépenses de santé et les cotisations, on sera dans nos équilibres.

- Vous évoquez ici la soutenabilité financière du système, qui est à sujette à questions...

- Notre challenge est la soutenabilité financière de la couverture médicale. Il y a un effort conséquent qui est fait. On doit s'assurer que cela permettra la viabilité du régime sur une période la plus longue possible. Cela nécessite, par conséquent, des mesures d'accompagnement regroupées dans le grand chantier de la refonte du système de santé, car il faut préparer le réceptacle.

- En quoi consiste cette refonte du système de santé  ?

- C'est un ensemble de mesures qui doivent être introduites pour assurer la réussite de la couverture. Nous sommes dans l'optimisation, dans la rationalisation, dans la soutenabilité. Et dans le système de santé, il faut considérer la notion de parcours. Cela permet d'éviter une consommation abusive, et que le système soit trop dépensier sans limites.

Pour ce faire, il y aura un parcours de soins coordonné qu'il faudra suivre du niveau 1 au niveau 3. Il sera obligatoire par la force de la loi. Vous avez besoin d'un médecin généraliste ou de famille ou d'un médecin de quartier pour accéder au niveau supérieur, et ainsi de suite. Il y aura donc un parcours qu'il faut respecter que ce soit dans le secteur public ou privé. Car la couverture ne fait pas de distinction entre les deux.

Pour maîtriser davantage les dépenses et permettre à cette couverture d'être viable, il faut gérer le coût du soin. Il y a donc un travail à faire sur le prix du médicament, sur la fabrication locale des génériques... À chaque fois qu'on a plus de génériques, le coût du soin se réduit, ce qui impacte à la baisse la facture de soins.

On ne va pas pouvoir financer tous les soins. On va aller vers les protocoles thérapeutiques avec des plafonds. Pour aller au-delà de ces plafonds, il faudra respecter des conditions particulières, et c'est une commission qui va statuer sur ces critères.

- Qu'en est-il du partenariat public-privé ? 

- Au début, quand les assurés ex-Ramed vont bénéficier de la couverture médicale généralisée, certains auront tendance à vouloir aller vers le privé directement. Le privé doit respecter les conditions qui seront décidées dans les conventions, à savoir la nomenclature et la tarification.

- Des conventions avec le privé et des Tarifs nationaux de référence (TNR) existent. Le secteur privé appelle à leur révision depuis des années. Une révision est-elle prévue sur le court terme ?

- Pas tout de suite. Déjà, il y a un travail d'harmonisation à réaliser entre la nomenclature de tarification du public et celle du privé, qui sont aujourd'hui différentes, en attendant les trois prochaines années. Il y a un système de couverture qui commence, il y a un équilibre à instaurer. On ne peut opérer immédiatement une révision des tarifs au risque de tout déséquilibrer.

- Qu'en est-il de la composante facteur humain ?

- On a beau élaborer tout un schéma de réforme, il y a en effet le facteur humain qui domine. Le Maroc a une insuffisance en ressources humaines de 32.000 médecins et 65.000 infirmiers. En même temps, on a des gens formés dans le secteur de l'enseignement privé, dont les diplômes ne sont pas reconnus, sachant que c'est l’État qui a autorisé ces établissements. Il y a un paradoxe à régler. Je pense qu'il faudra se pencher sur cette question pour résoudre ce problème quitte à instaurer des concours de qualification et une gradation.

Pour les médecins, nous avons commencé par l'amendement de la loi 131.13 qui est devenue aujourd'hui la loi modifiée 33.21, qui permet aux médecins étrangers, et même marocains exerçant à l'étranger, de pouvoir exercer au Maroc. On a opté pour cette solution car on ne peut pas compter que sur la formation pour combler le déficit. Il faut plusieurs solutions, y compris la contractualisation, le partenariat public-privé, le prolongement de l'âge de la retraite pour ceux qui le souhaitent.

Avec ce schéma, il va falloir agir au niveau territorial. Chaque région doit, selon son contexte, mobiliser et déployer ses propres ressources. Elle doit aussi s'adapter à sa carte de besoin. Dans ce sens, il faut inciter les ressources humaines. On ne peut pas travailler avec les salaires proposés aujourd'hui. Autant le médecin dans les années 1970 avait un rang social qui lui permettait de bénéficier de conditions confortables, aujourd'hui, il est au 28e rang. Il fait beaucoup d'années d'études, mais quand il les achève, il peine. S'il exerce un travail lucratif dans le secteur libéral, il ne peut plus revenir en arrière.

Si nous voulons retenir nos compétences dans le secteur public, il va falloir les payer en conséquence, les intéresser, les inciter. Mais il ne faut pas qu'ils soient égaux en termes de rémunération. Ceux qui travaillent plus toucheront plus.

Omicron, fabrication de vaccins, situation sanitaire : les réponses de Khalid Ait Taleb

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