Situation confuse à Figuig: 15.000 palmiers et leurs fermiers menacés par la frontière

Grande émotion à Figuig et sa région. En l'absence de clarifications officielles, seuls les témoignages des habitants et des exploitations agricoles nous ont permis de reconstituer ce récit. Selon la version la plus cohérente, une trentaine de fermiers marocains doivent évacuer des exploitations qu'ils ont créées et dans lesquelles ils ont investi.

Situation confuse à Figuig: 15.000 palmiers et leurs fermiers menacés par la frontière

Le 14 mars 2021 à 9h39

Modifié 11 avril 2021 à 2h50

Grande émotion à Figuig et sa région. En l'absence de clarifications officielles, seuls les témoignages des habitants et des exploitations agricoles nous ont permis de reconstituer ce récit. Selon la version la plus cohérente, une trentaine de fermiers marocains doivent évacuer des exploitations qu'ils ont créées et dans lesquelles ils ont investi.

Samedi 13 mars, des habitants se sont regroupés dans la ville pour protester contre la perte annoncée de leurs exploitations agricoles qui se trouvent sur des terres revendiquées par l’Algérie.

Les exploitants, habitants et originaires de la région, ainsi que tous ceux qui s’intéressent à cette actualité, sont dans l’attente d’une réaction officielle publique marocaine de clarification. En l’absence de données officielles, Médias24 s’est basé sur des vidéos qu’il a authentifiées ainsi que sur des témoignages qu’il a recueillis auprès d’un exploitant ainsi que sur des échanges avec un notable originaire de Figuig.

Les témoignages convergent vers le récit qui suit.

Vers le 18 février, des soldats et/ou des gendarmes algériens se sont présentés au niveau de plusieurs exploitations et ont signifié aux propriétaires que les lieux devront être évacués dans un délai de 3 jours, car elles sont construites sur un territoire algérien.

Ces soldats et/ou gendarmes affirmaient que les autorités marocaines étaient au courant des faits.

Abdelmalek Boubekri, l'un des exploitants qui risquent de perdre le fruit de leur labeur.

Abdelmalek Boubekri, un exploitant concerné confie à Médias24 son incrédulité sur le moment. Il a contacté plusieurs autres exploitants et ensemble, ils s’étaient rendu chez le Pacha. Ce dernier a promis des informations dès qu’il y en aura.

Selon les recoupements de M. Boubekri, la partie algérienne a d’abord donné un délai de trois jours à la partie marocaine ; puis cette dernière a négocié un délai d’un mois, qui prend fin le 18 mars.

Vers le 10 mars, des soldats algériens sont revenus rappeler le délai. “Il y a quelques jours, un groupe composé de 37 Algériens, entre gendarmes, soldats, responsables civils, est venu repérer les exploitations et prendre les noms des propriétaires. Ils étaient conduits par un gradé auquel tout le monde s’adressait en l’apppelant Mon Général“.

“Il y a moins d’une semaine, les exploitants se sont regroupés et ont organisé un sit-in de protestation au centre de la ville de Figuig“. “Le gouverneur nous a alors reçus et nous a demandé des propositions“, poursuit Abdelmalek Boubekri qui estime que cette phrase et cette rencontre signifient que les autorités reconnaissent désormais l’existence d’un problème. Selon notre source, les exploitants ont rétorqué au gouverneur qu’il devait lui, leur faire des propositions.

Selon plusieurs fermiers, le Pacha a prévenu qu'à compter du 18 mars, un cordon de gendarmes et de soldats marocains "empêcherait les exploitants de revenir vers "leurs" terres.

La zone concernée est couverte par environ 15.000 palmiers, "produisant les dattes Aziz, très rares, que l'on trouve uniquement à Figuig et qui sont vendues jusqu'à 30 euros/kg à l'étranger". “Les palmiers de nos aïeux“, ajoute Boubekri. “Pour ma génération, 30 ans de travail vont partir en fumée“. Son fils prend le téléphone et évoque une “tragédie, un séisme“. Une trentaine d’exploitations sont concernées, avec non seulement les palmiers mais toutes les canalisations d’eau, les bassins, le solaire, les tracteurs, le bétail…. La mort dans l’âme, les larmes aux yeux, les exploitants sont en train de déménager ce qui peut l’être. 

La zone concernée s’appelle El Arja, à 7 km de Ksar Oulad Slimane. La convention maroco-algérienne relative au tracé de délimitation des frontières, publiée en juin 1992 par le Maroc évoque dans son article 1, un “oued sans nom“. Pour notre interlocuteur, il s’agit d’un oued situé au-delà d’El Arja et pas celui qui est ciblé par les autorités algériennes. La convention a été publiée dans le Bulletin Officiel du 24 juin 1992. De son côté, un notable de Figuig contacté par nos soins, rappelle que la frontière maroco-algérienne suit les cours d'oued en plusieurs endroits, dont la zone de Saïdia et celle d'El Arja et que les propriétaires doivent être indemnisés par l'Etat marocain.

En attendant la date fatidique du jeudi 18 mars, les images poignantes des exploitants marocains qui sont en train de perdre tout leur labeur, suscitent un sentiment de solidarité et de compassion. Dans quelle mesure la patrie sera-t-elle solidaire avec eux ? Dans quelle mesure seront-ils indemnisés par l'Etat s'il se confirme que le tracé frontalier est bien celui qui est revendiqué par l’Algérie ? Et si c'est ce tracé-là, pourquoi l'Algérie a-t-elle attendu autant d'années avant de le revendiquer ? Et pourquoi les fermiers marocains n'ont-ils pas été prévenus par leurs autorités ?

Ci-dessous, documents et vidéos:

Images de l'exploitation de Mohamed Boubekri:

Protestations samedi des exploitants concernés, au centre de la ville de Figuig:

Lettre des habitants adressée aux autorités françaises en 1950:

La convention maroco-algérienne de délimitation des frontières:

La convention, en langue française, dans le Journal officiel algérien:

Le titre de propriété détenu par Abdelmalek Boubekri et datant de 1939:

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