Andrea Bury. De Berlin à Marrakech, avec des idées

Installée à Marrakech depuis 2007, Andrea Bury y a développé un nombre respectable d’activités dans l’hôtellerie, l’artisanat et le travail social. Elle est également à la tête de la conférence TEDx Marrakech depuis 2011. Son prochain événement s’ouvre le 21 octobre prochain au palais Essaâdi.

Andrea Bury. De Berlin à Marrakech, avec des idées

Le 20 septembre 2017 à 11h19

Modifié 11 avril 2021 à 2h43

Installée à Marrakech depuis 2007, Andrea Bury y a développé un nombre respectable d’activités dans l’hôtellerie, l’artisanat et le travail social. Elle est également à la tête de la conférence TEDx Marrakech depuis 2011. Son prochain événement s’ouvre le 21 octobre prochain au palais Essaâdi.

Arrivée au départ avec son mari pour vivre au Maroc et monter un think tank dédié aux échanges sur les problèmes d’intérêt global, Andrea s'est, depuis, installée dans un riad et a lancé une gamme de vêtements et d’accessoires. "Nous cherchions un endroit différent de l’environnement européen, agréable à vivre et facilement accessible pour des Européens qui viendraient pour nos réunions et séminaires", explique-t-elle son choix de Marrakech.

"Marrakech est mystique"

"Pour nous, poursuit-elle, Marrakech est mystique et en même temps vous y affrontez une panoplie de problèmes et de défis qui sont globaux: le sujet de l’eau, les inégalités entre hommes et femmes, entre riches et pauvres et la place de la religion dans la société". "A Marrakech, on voit le 4X4 qui côtoie un chariot tiré par un âne, la maman voilée marchant aux côtés de sa fille portant des talons-aiguilles; cela pose des interrogations globales que nous ne voyons pas en Europe", poursuit-elle.

Andrea est aujourd’hui intarissable sur Marrakech. Visage d’ange et yeux bleus, son enthousiasme est palpable. "C’est une belle ville, attractive, juge-t-elle. Ce qui nous a le plus attiré au début, c’est l’intensité de la ville. C’est plein de couleurs. Les odeurs et les parfums y sont puissants".

Je lui demande: "Qu’avez-vous appris après 10 ans de vie à Marrakech?". "J’ai beaucoup appris, oui, certainement. En Allemagne et dans le monde occidental, on pense que les choses doivent être très organisées pour que le monde soit bon à vivre. Ce que j’ai appris, c’est de 'sortir de mes chaussures' et me mettre dans le point de vue de l’autre. On réalise ainsi la beauté de la vie si on la mène différemment. Cela m’a pris du temps".

"Naturellement, précise-t-elle, lorsque je suis venue pour la première fois à Marrakech, j’ai trouvé l’ambiance très chaotique. Je pensais avoir besoin de gérer très strictement les choses, que l’on ne pouvait pas compter sur les gens et qu’on n’arrive pas à mener les choses jusqu’au bout. Mais ensuite lorsque vous sortez de cette structure et regardez les choses de l’autre point de vue, vous voyez beaucoup de beauté et vous apprenez beaucoup de choses sur la famille, les valeurs, sur l’hospitalité, la chaleur humaine. La culture est riche et belle ici. Où que j’aille, j’emmène cela avec moi".

Un riad …

C’est le travail de rénovation du riad avec des artisans marrakchis pendant une année qui lui inspirera sa première action importante sur le plan local. Anayela, le riad qu’elle dirige à Marrakech signifie "lieu d’inspiration". Elle constate "les difficultés du travail des artisans, une situation qui ne motive pas de plus jeunes Marrakchis à poursuivre sur la voie du maintien et du développement des traditions artisanales".

De cette expérience naîtra "Abury", une affaire de commerce équitable dans laquelle, tout en développant de nouveaux produits, elle s’attache à réduire le nombre d’intermédiaires afin de pouvoir mieux rémunérer le travail fourni. "Un objet payé 100 DH à l’artisan à Marrakech se retrouve vendu 10 fois plus cher dans des boutiques en Europe", déplore-t-elle.

Andrea parvient à mettre en place un vaste réseau de créateurs et d’artisans marocains et internationaux qui lui permettent progressivement de mettre sur le marché des vêtements et des accessoires d’une grande finesse.

Avant de s’installer à Marrakech, Andrea a travaillé dans le marketing à Francfort avant de s’orienter vers Londres, Monaco et de retourner à Berlin où elle fonde sa propre entreprise de marketing et d’image d’entreprise, Calliope, en 2001. Parmi ses clients, elle compte la Deutsche Bank, Volkswagen, Campari et la firme de télécommunications O2 Germany notamment.

Andrea se décrit aujourd’hui comme étant "un peu nomade". "Je suis naturellement et positivement curieuse de différentes manières", avance-t-elle pour décrire un peu plus son caractère.

Avec son dynamisme et son caractère ouvert, Andrea a réussi à faire de son riad un lieu recherché par une importante clientèle allemande et américaine. Aujourd’hui, Anayela fait du réseau Design Hotels et du réseau hôtelier et de réservations Starwood dont "Anayela" est le plus petit établissement, dit-elle avec fierté. Starwood gère 1.200 Marriott et Ritz-Carlton dans 60 pays.

Elle parle de sa méthode. "Au début du projet de riad, nous avons embauché pendant trois ans un manager international qui a mis en place les structures de l’établissement et formé le personnel qui vient en partie de notre voisinage immédiat à Bab El Khmis", précise-t-elle. Mon riad est une maison et le personnel est fier de ce qu’il y a accompli. Lorsque vous arrivez vous y êtes accueilli par des gens très professionnels dans leur manière de faire. "Nous constituons une vraie famille maintenant", insiste Andrea.

Des artisans aussi

Andrea se défend d’être un designer. "Je suis une économiste", insiste-t-elle, si l’on pense que la rénovation du riad et le lancement de sa gamme de vêtements et d’accessoires en font une artiste. "Je fais une sorte de commerce solidaire mais c’est surtout de l’empowerment que je fais; J’agis pour rendre les gens qui le souhaitent plus autonomes"..

"En travaillant avec les artisans sur le riad poursuit-elle, j’ai découvert trois types de problèmes structurels à résoudre. Celui du design très liés aux traditions de couleurs et de formes; ensuite un problème de gestion de la qualité et enfin l’accès aux marchés. Le marché local est aujourd’hui envahi de produits chinois et les produits originaux se vendent à très bas prix à des touristes de masse qui y trouvent leur compte. Mais à terme, l’artisanat et la création y perdent, souligne-t-elle.

"J’ai aussi constaté et appris, poursuit Andrea, que la jeune génération ne veut plus de l’artisanat car elle voit que leurs parents triment sans grand retour financier. Je me suis dit que tout cela n’est pas juste car nous aimons avoir des produits de qualité qui racontent une histoire et qui sont faits mains". "C’est à ce moment que l’idée m’est venue de créer une plate-forme qui connecte les artisans avec des designers en soutenant les premiers dans la gestion de la qualité, et les seconds dans l’affinement de leur design".

Vers les marchés internationaux

"Ensuite nous intervenons pour les aider à accéder aux marchés internationaux. Nous faisons cela depuis 2011", précise-t-elle. "Les artisans avec lesquels nous travaillons aujourd’hui sur Marrakech sont fiers de voir leurs chemises ou sacs brodés portés par des stars sur les tapis rouges", souligne-t-elle.

"Les autres résultats et satisfactions de ce travail sont financiers et sociaux. Les artisans sont mieux payés et car nous réinvestissons une partie des bénéfices dans l’éducation dans le monde rural au bénéfice des enfants mais aussi des adultes qui souhaitent accéder à l’alphabétisation. Nous organisons des visites de nos artisans dans les villages des environs de Marrakech qu’ils constatent le résultat de leur travail sur les terrains sociaux et éducatifs".

TEDx Marrakech

A un mois du prochain rendez-vous TEDx Marrakech, Andrea est désormais concentré sur la date du 21 octobre. L’édition 2017 traitera du thème de la digitalisation, comment elle affecte notre quotidien et notre futur. "On y parlera block chain, réseaux sociaux, cryto monnaie, cyber sécurité, trolls, branding et impact sur le travail notamment". "La nouveauté cette année, souligne Andréa, est que nous avons organisé une compétition étudiante sur le format des conférences". La lauréate de cette compétition figure sur la liste des conférenciers TEDx du samedi 21 octobre prochain. L’aventure TEDx avait commencé avec Vanessa Branson quelques années plus tôt.

Avant de me séparer d’Andrea Bury, je l’interpelle sur ce qui l’inspire, sa philosophie de la vie. Elle marque une pause. "Au bout du compte, tout se ramène à des choses simples", finit-elle par dire. J’insiste: "Mais encore?". "Il y a trois choses qui me sont importantes, commence-t-elle à détailler. La première me vient de ma grand-mère qui m’a dit lorsque j’étais enfant de "toujours sourire pour avoir plus tard des rides souriantes". Je n’oublie jamais cela. C’est très philosophique en fin de compte lorsqu’on y pense. Cela m’amène à mon deuxième point: dans chaque culture que j’ai approché, il existe une sagesse finalement universelle qui dit que "le miroir te renvoie l’image que tu lui proposes".

En Allemagne, on dit que "la manière avec laquelle tu cries dans la forêt te revient, et te revient en écho". Je souris tout le temps et c’est ainsi je crois que je reçois énormément de retours et de feedback positifs. Il est aussi démontré que lorsque vous opposez un visage souriant, vos interlocuteurs ou vis-à-vis vous imitent. C’est un réflexe naturel.

Enfin le troisième point est inspiré du philosophe allemand, Nietzsche, qui a dit que "vous devez toujours avoir un peu de chaos en vous pour donner naissance à une étoile dansante". "Je crois en l’organisation et aux structures, mais je crois aussi que le chaos est utile pour créer des choses. Il faut être un peu naïf, ne pas toujours réfléchir profondément sur des choses négatives qui pourraient arriver. J’ai ainsi fait beaucoup de choses positives et j’en suis heureuse".
 

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