Maroc-UE, les explications du négociateur marocain des accords de 2003

EXCLUSIF. Hassan Benabderrazik, expert reconnu et respecté dans toute la profession, répond aux questions que l’on se pose : quelle est l’étendue réelle de l’impact sur le Maroc ? L’UE a-t-elle réellement violé les accords ? Est-il possible de trouver d’autres marchés ?

Maroc-UE, les explications du négociateur marocain des accords de 2003

Le 15 avril 2014 à 9h43

Modifié 27 avril 2021 à 22h27

EXCLUSIF. Hassan Benabderrazik, expert reconnu et respecté dans toute la profession, répond aux questions que l’on se pose : quelle est l’étendue réelle de l’impact sur le Maroc ? L’UE a-t-elle réellement violé les accords ? Est-il possible de trouver d’autres marchés ?

Beaucoup de producteurs ont encore du mal à y croire. La décision européenne de changer les conditions relatives à l’entrée des fruits et légumes est perçue comme une trahison de la parole donnée.

Le Maroc va faire jouer ses cartes, c’est clair: droits de pêche certes, mais également contingent européen de céréales qui accèdent sur le marché marocain à des tarifs préférentiels.

Du côté européen, on feint de jouer l’étonnement.

Interrogé par Médias 24, Roger Waite, porte-parole de la Commission européenne pour l’agriculture et le développement rural, nous a fourni des réponses de la plus belle langue de bois : “il s'agit des importations (non-préférentielles) de tous les fruits et légumes de tous les pays tiers,  et le principe a été adopté dans la réforme de la PAC l'an passé. Par exemple, les quotas préférentiels pour les tomates marocaines négociés dans l'accord - qui font plus de 2/3 des importations - ne sont pas concernés. Les actes délégués sont des éléments plutôt techniques pour le mis-en œuvre - sur la base des principes définis dans les actes de base l'année passée“.

 

      Nous sollicitons l’avis d’un expert marocain reconnu, Hassan Benabderrazik, très respecté au sein de la profession, économiste, négociateur marocain des accords de 2003.

“Cette réponse reconnaît que le tiers des exportations marocaines va être impacté directement. Les simulations que j’ai effectuées sont éloquentes et ne laissent aucun doute: au moins 30% des exportations marocaines totales seront évincées“.

M. Benabderrazik explique: il y a deux catégories d’exportations marocaines. Celles qui se font sous le régime commun et celles qui se font sous le régime des quotas. Ce sont les premières qui sont de prime abord menacées. 70% d’entre elles le sont dans un premier temps puis la totalité, par un effet d’éviction, un effet domino qui rendra l’origine Maroc peu fiable aux yeux des acheteurs des circuits modernes de distribution.

En effet, poursuit notre interlocuteur, les droits de douane seront calculés sur la base de la VFI, valeur forfaitaire à l’importation, calculée sur la base des tomates rondes. Il y aura presque systématiquement application des droits de douane maximum.

M. Roger Waite esquive également notre question au sujet de la violation des accords bilatéraux et des règles de l’OMC et l’absence de concertation avec le Maroc : “Les changements dans l'acte de base ont pour objectif de simplifier les règles de douanes et les aligner avec des autres secteurs. Il s'agissait d'avoir un système d'importation plus simple et harmonisé pour touts les fruits et légumes pour le commerce non-préférentiel“.

Au contraire, juge M. Benabderrazik, le système actuel est plus complexe.

Le Maroc peut-il trouver des marchés de substitution, tels que l’Afrique ou le monde arabe? “Non“, répond notre expert marocain.  “Nos exportations connaissent une forte croissance en direction des pays d’Afrique de l’Ouest, de l’ordre de 30% par an, mais les volumes restent faibles. Sur le monde arabe, les possibilités restent marginales. Les pays concernés sont plus proches de pays producteurs tels que la Jordanie ou la Turquie, voire le Kénya. Nous sommes un peu présents au Canada, très peu aux Etats-Unis pour des raisons logistiques et de proximité. Le marché européen, de par sa taille et sa proximité, est irremplaçable“.

Quels conseils donneriez-vous aux exportateurs marocains? “Multiplier les contrats de ventes fermes, mais cela, ils le savent déjà“, répond M. Benabderrazik.

Les Européens ont bien violé les accords bilatéraux et les règles de l’OMC, conclut M. Benabderrazik :

-sur le plan bilatéral, chaque changement doit être précédé de consultations, c’est précisé dans les accords. Non seulement il n’y en a pas eu, mais lorsque le Maroc a demandé des éclaircissements, il n’en a pas obtenu.

-le protocole agricole maroco-européen comprenait des concessions commerciales réciproques. Et il était clairement stipulé que par système des prix d’entrée on entendait le système tel que précédemment défini. Il y a donc rupture unilatérale de contrat.

-Les règles de l’OMC stipulent qu’il ne peut pas y avoir de durcissement du régime de dédouanement sans notification préalable aux partenaires et négociation de compensations“.

Une délégation européenne arrive au Maroc le 23 avril. On verra ce qu’il en sortira.

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