Le Maroc et l’Algérie deviennent un important marché d'armes en Méditerranée

La réception de la Frégate Mohammed VI conduit inévitablement à s'interroger sur les dimensions régionales. L’Algérie consacre un budget trois fois plus important que le Maroc à ses achats de matériel, et supérieur à l’Espagne.  

Le Maroc et l’Algérie deviennent un important marché d'armes en Méditerranée

Le 3 février 2014 à 14h16

Modifié 3 février 2014 à 14h16

La réception de la Frégate Mohammed VI conduit inévitablement à s'interroger sur les dimensions régionales. L’Algérie consacre un budget trois fois plus important que le Maroc à ses achats de matériel, et supérieur à l’Espagne.  

La livraison le 30 janvier de la frégate Mohammed VI à la Marine royale marocaine, dont elle est le navire amiral, intervient quelques jours après l’annonce de l’arrivée prochaine des drones sophistiqués au sein des armées de la région. De plus, il existe une probabilité sérieuse d'acquisition prochaine par le Maroc de 200 chars Abrams M1A1 américains. La frégate Mohammed VI est attendue au Maroc vers le mois de mars, car différents exercices sont prévus au large de la Bretagne au cours du mois de février.

L’Algérie et le Maroc poursuivent leurs achats de matériel militaire, qui sont en forte hausse depuis le milieu des années 2000. S'agit-il d'une course aux armements? ou d'une simple course au leadership régional? Est ce que comme le disait Raymond Aron (à propos de la guerre froide), entre l'Algérie et le Maroc, c'est "paix impossible et guerre improbable?"

En réalité, en plus du leadership régional, chacun des deux pays a des raisons objectives de s'équiper. Dans chacun des deux pays, les blindés et la marine étaient devenus obsolètes. Pour une partie importante de leurs armées, un cycle arrivait à sa fin et il était important de se rééquiper, voire de se réorganiser. Côté algérien, il arrive que des commentateurs évoquent une "frénésie d'achats nourris par la rente pétrolière".

Une armée ne s'évalue pas à ses seuls équipements. D'autres critères entrent en jeu: les effectifs, le professionnalisme, l'entraînement, l'organisation, l'expérience et la doctrine militaire. Les chiffres ci après n'ont donc pas pour objectif d'évaluer un quelconque match Maroc-Algérie. Ils visent plutôt à étayer une dynamique qui va se poursuivre pendant plusieurs années avec un gros effort d'équipement des deux principales armées de la région, armées qui font souvent des choix complètement différents.

Selon le SIPRI (Stockholm International Peace Research Institute), sur la période 2008-2012 par rapport à 2003-2007, le Maroc a enregistré une augmentation de 1.460% de ses livraisons et de 277% pour l’Algérie. Bon an, mal an depuis 10 ans, Alger dépense annuellement 3 fois plus que Rabat pour son armée.

Pour l’année 2014, la loi de Finances algérienne prévoit ainsi un budget de 12,45 MM de dollars tandis qu’à Rabat le parlement a approuvé une enveloppe de 3,8 MM de dollars dont 670 millions pour l’acquisition de «matériels et dépenses diverses» et 530 millions à l’«investissement et crédit de paiement».

Toujours selon les données du SIPRI, l’Algérie a dépensé 9,3 MM de dollars en armements en 2012 contre 3,4 MM de dollars pour le Maroc.

L’Algérie est le pays africain qui a acheté le plus d’armes en Afrique en 2012, suivi de :

-l’Afrique du Sud avec 4,5 MM de dollars,

-l’Egypte avec 4,4 MM de dollars,

-le Maroc avec 3,4 MM de dollars.

Le budget militaire algérien est supérieur à celui d’un pays comme l’Espagne.

Les deux pays, note l’universitaire espagnol Carlos Echeverria cité par El Pais du 25 janvier 2014, sont confrontés à des tensions à leurs frontières mais surtout à une augmentation du risque terroriste, les deux situations étant, au Maghreb, passablement liées.

Si le Maroc doit continue de s’équiper pour sécuriser ses frontières orientales et méridionales sur près de 3.000 km, l’Algérie fait face au défi de sécuriser ses frontières avec l’instable Mali, ainsi que le Niger, la Libye et la Tunisie sur plus de 6.000 km.

Acquisitions tous azimuts …

Les acquisitions de l’Algérie sur la période 2008-2012 ont porté sur :

-44 avions de combat Sukhoi Su-30MKA,

-2 sous-marins Project-636,

-des systèmes de défense sol-air,

- 185 chars T-90S.

Deux frégates allemandes Meko A200 sont en cours d’acquisition, ainsi que 54 blindés de transport sur un contrat de 1.200 unités.

Parmi les acquisitions prévues par l’armée algérienne en 2014 figurent des drones chinois Yi Long. Avec la Libye, l’Algérie est le pays le plus vaste du continent africain. Outre la surveillance des frontières, les drones peuvent être équipés de missiles.

Côté marocain, la période 2008-2012 a vu l’acquisition de :

-24 chasseurs américains F-16,

-3 frégates SIGMA des Pays-Bas,

-54 tanks chinois Type 90-2,

Et la mise à niveau de 27 chasseurs français MirageF1- 2000.

Cette année 2014 doit également être marquée par la poursuite des travaux de la première base navale marocaine à Ksar Sghir situé sur le détroit de Gibraltar à quelques encablures de Sebta et face à la colonie britannique.

Une visite sur les lieux cette semaine a permis de constater que le site ne devrait pas être prêt avant plusieurs mois. Hors installations techniques, les travaux de gros-œuvre du port semblent achevés à moins de 75%. Terre-pleins, quais et accès ne sont pas encore achevés.

C’est probablement à Ksar Sghir que sera basée la frégate Mohammed VI conçue pour la lutte anti-sous-marine, mais également la lutte anti-aérienne et mer-mer grâce à son équipement en missiles Exocet. D’un coût de 470 millions d’euros, la frégate dispose d’une autonomie de 45 jours.

La Marine semble d’ailleurs devenir l’arme vers laquelle se dirigent de plus en plus les dépenses militaires marocaines et algériennes.

… jusqu’en 2017-2018

Si l’on en croit  l’historien militaire Laurent Touchard qui s’exprime sur le blog Défense de Jeune Afrique, la flotte algérienne est «à prendre au sérieux» tandis que «l’armée de l’air algérienne continuera de monter en puissance jusqu’en 2017».

Trois corvettes ont été commandées à la Chine en 2013 et en 2015 un bâtiment italien amphibie et pouvant porter des hélicoptères pour la lutte anti-sous-marine entrera en service. Des 4 frégates Meko 200 du groupe Thyssen Krupp acquises, 2 doivent être assemblées en Algérie.

Le Maroc de son côté a reçu des offres d’Espagne, d’Allemagne et de Russie en vue de l’acquisition d’un ou de deux sous-marins. L’Algérie qui dispose de deux sous-marins russes, négocierait pour sa part l’acquisition de deux unités supplémentaires

Comme dans le cas des frégates Meko-200 allemandes, le transfert de savoir-faire technique est d’ailleurs de plus en plus utilisé par Alger dans ses contrats d’armements. Que ce soit pour les frégates allemandes, les systèmes de radars français acquis auprès de Thalès ou les pistolets semi-automatiques et les pistolets mitrailleurs.

Concernant le futur des dépenses militaires marocaines, selon rpdefense.over-blog.com, celles-ci devraient «passer de 3,8 MM de dollars en 2014 à 4,5 MM de dollars en 2018 en raison des besoins en acquisitions dans l’aviation, les véhicules blindés, les systèmes de radars, les sous-marins et les navires de patrouille afin d’améliorer la sécurité des frontières et combattre le terrorisme transfrontalier».

Dépenses militaires en hausse et faiblement contrôlées, coûts annuels du non-Maghreb estimés à 2-3% des PIB marocain et algérien, frontières bilatérales fermées depuis 20 ans, coopération sécuritaire et anti-terroriste minime: c’est un 17 février 1989, il y a exactement 25 ans que 5 chefs d’Etat se réunissaient à Marrakech pour lancer l’Union du Maghreb arabe…

Quant au SIPRI, c’est en mars prochain qu’il publie son rapport sur les ventes d’armes en 2013.

Ne nous focalisons pas sur le voisin de l'Est (malgré les provocations quotidiennes de ses dirigeants) et raisonnons plutôt en menaces implicites aux frontières quelles qu'en soient l'origine. L'armée marocaine est une armée de défense hautement professionnelle et efficace qui a fait ses preuves sur tous les théâtres où elle a été engagée. Les récents choix en matière d'équipement renforcent la confiance et la fierté de l'opinion dans son armée. Le Maroc poursuit son effort militaire et renforce son statut dans le sud de la Méditerranées, l'Afrique du Nord et l'Afrique.

 

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