Al Amoudi vs Maroc au Cirdi : Craintes et révélations d’observateurs politiques

Entre inquiétude et pessimisme, deux hommes politiques évoquent le litige international opposant le Maroc à l’ex-actionnaire majoritaire de la Samir.

Al Amoudi vs Maroc au Cirdi : Craintes et révélations d’observateurs politiques

Le 20 juillet 2020 à 17h06

Modifié le 11 avril 2021 à 2h47

Entre inquiétude et pessimisme, deux hommes politiques évoquent le litige international opposant le Maroc à l’ex-actionnaire majoritaire de la Samir.

La Samir est un sujet qui transcende les frontières nationales. En atteste l’épineux litige opposant le Royaume à Corral Morocco Holdings, entité dirigée par Mohamed Al Amoudi, ancien propriétaire du raffineur. A Washington, cet arbitrage est traité depuis 2 ans devant le Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements (CIRDI), organisme rattaché à la Banque mondiale.

« C’est un dossier qu’il faut prendre avec sérieux et gravité », avertit Mohammed Benmoussa, vice-président du Fonds national pour le sauvetage de la raffinerie. Devant les arbitres, l’homme d’affaires saoudien accuse le Maroc de lui avoir « exproprié » son « investissement ». Et lui réclame pas moins de 14 MMDH à titre de réparation !

Un dossier grave et sérieux donc, puisque qu’il pourrait engager directement et lourdement « les finances publiques de l’Etat », ajoute l’économiste. Le vendredi 17 juillet, il animait un webinaire où il interpellait deux hommes politiques sur les différents axes de « l’affaire la Samir », dont celui qui se joue actuellement au CIRDI.   

La gravité du sujet n’a d’égale que la discrétion qui l’entoure. La confidentialité est une caractéristique essentielle des procédures arbitrales, a fortiori pour les dossiers de cette ampleur. Dans le litige en question, le secret est tel qu’il couvre même les instances représentatives. « En tant qu’acteurs, que nous soyons députés ou responsables politiques dans nos partis, nous demeurons en déficit d’informations par rapport au dossier », déplore Mehdi Mezouari, membre du bureau politique de l’USFP. « Nous sommes peu informés sur l’affaire, dont nous n’avons appris l’existence qu’à travers la presse », ajoute-t-il.

L’absence d’information constitue « incontestablement un déficit de gouvernance, de transparence », enfonce Abdelouahed Souhail, membre du bureau politique au PPS.

La rareté des données n’empêche pas les deux intervenants de livrer leur lecture quant à l’issue du litige. M. Mezouari se dit à la fois « serein » et « inquiet ». Une position « mitigée » qu’il explique par les « relâchements » et « manquements », imputables aussi bien à l'ancien management de la Samir (requérant) qu’au gouvernement marocain (défendeur).

« Quand j’étais député, j’avais exigé l’ouverture d’une enquête au sujet de la fuite de capitaux impliquant le raffineur. La Samir est une grosse histoire de vol et de fuite d’argent vers l’étranger (…) Nous savons très bien qu’à un certain moment, la Samir servait à financer des campagnes électorales au Maroc », rappelle l’intervenant.

L’ex-député se dit « sûr que l’Etat savait beaucoup de choses à ce sujet, mais personne n’a voulu bouger le petit doigt. » Et d’ajouter : « Nous n’avons pas su mesurer le danger de cette privatisation en cédant une entité stratégique et unique dans le pays, à des gens qui ont eu des pratiques de banditisme. La Samir a été une grosse caisse noire qui avait toutes les facilités de l’Etat. Aucune régulation, ni contrôle ou réglementation de l’Etat. »

« Je suis peut-être inquiet par méconnaissance du dossier. Mais je pense que même les autorités publiques ont eu beaucoup de moments de relâchement, de laxisme et même de complicité, volontaire ou pas, avec le patron [Al Amoudi]. Ce qui a mené à la situation actuelle de la Samir », conclut M. Mezouari.

>>Lire aussi : Exclusif. Corral vs Maroc: les détails de la requête déposée au CIRDI

Abdelouahed Souhail (PPS) se dit quant à lui « pessimiste ». La nature de la procédure y est pour quelque chose. « Ce type de recours a une religion : défendre à tout prix les intérêts privés face aux intérêts publics », explique l’intervenant, faisant savoir qu’avec « d’excellents avocats, un escroc peut s’en sortir et enrichi ». 

« Je suis tout à fait inquiet du fait que notre pays accepte l’arbitrage parce que c’est la règle, étant donné qu’il s’agit d’un investissement étranger. Du fait qu’il n’ait pas réagi à temps au moment où on a constaté les premiers défauts de paiement. Mais aussi au moment où on a constaté des faits extrêmement graves dont certains relèvent du pénal », explique-t-il.

De là, l’homme politique exprime une crainte : « Cela pourrait nous coûter excessivement cher. Je ne le souhaite pas à notre pays. J’espère que notre pays sera bien défendu, que les gens du CIRDI nous prêteront une oreille attentive et que cela ne vienne pas compliquer notre projet : celui de remettre à flot cet outil [la Samir] que le Maroc est en train de perdre. »

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