Bugaled Breizh: les familles évoquent les marins décédés lors de l'enquête britannique

(AFP)

Le 4 octobre 2021

La pêche "dans le sang", "blagueur" mais "carré" en mer: les familles ont dressé lundi un portrait attachant de marins décédés dans le naufrage du chalutier français Bugaled Breizh, espérant que la justice britannique fasse la lumière sur ce drame inexpliqué depuis 2004.

Devant la Haute Cour de Londres, le fils d'une des victimes, Thierry Lemétayer, a lu quelques lignes pour faire revivre trois des cinq marins, au centre de l'enquête britannique prévue sur trois semaines, avec l'espoir commun de parvenir à "la vérité".

En moins d'une minute le 15 janvier 2004, tout l'équipage du Bugaled Breizh ("Enfants de Bretagne" en breton) avait été emporté par le fond, quand le chalutier de Loctudy (Finistère) avait sombré dans des conditions météorologiques plutôt bonnes, au large des Cornouailles (Sud-Ouest de l'Angleterre).

Seuls les corps de Patrick Gloaguen, Yves Gloaguen et Pascal Le Floch ont été retrouvés - le premier dans l'épave lors de son renflouement, les deux autres dans les eaux britanniques. Georges Lemétayer et Eric Guillamet ont, eux, été portés disparus en mer.

La pêche, "il avait ça dans le sang depuis tout petit", a indiqué le frère de Pascal Le Floch, 49 ans, né dans une famille de pêcheurs, selon des mots relayés par Thierry Lemétayer. "Petit, il allait en mer pendant les vacances scolaires (...): jamais nous n'aurions imaginé une mort aussi brutale, voire violente".

Yves Gloaguen, 44 ans, était "joyeux" et "blagueur", mais "carré quand il prenait la mer", a assuré sa sœur. "A cheval sur la sécurité, il n'aurait jamais pris de risques à mettre ses hommes et son outil de travail en danger", a-t-elle ajouté.

Thierry Lemétayer s'est lui souvenu de son père Georges, 60 ans, embarqué à 13 ans et demi comme "novice sur un chalutier lorientais" et devenu, à ce jeune âge, "la seule source de revenus de sa famille".

Il avait un jour évoqué "les accidents récurrents entre pêcheurs et sous-marins" "sur un ton très fataliste" mais "dans l'espoir que cela change un jour", a-t-il raconté: "ça n'a pas changé assez vite sans doute".

- "Un si mauvais secret" -

Depuis le début, les familles estiment que le chalutier a coulé après avoir été accroché par un sous-marin militaire. Il se trouvait dans une zone où se déroulaient des exercices militaires de l'Otan et de la Royal Navy.

"Si le ministère de la Défense britannique ou l'Otan dit +on a couvert des choses effectivement, on s'excuse et on règle l'affaire+, moi je rentre à la maison, je n'embête plus personne et vous n'entendrez plus jamais parler de moi", a confié Thierry Lemétayer avant l'audience, regrettant que le secret-défense ait toujours été opposé aux familles.

L'hypothèse du sous-marin n'a jamais pu être confirmée par la justice française au terme d'une très longue procédure, clôturée en 2016 sans parvenir à une conclusion.

Près de 18 ans après le drame, l'objectif de l'enquête au Royaume-Uni est d'éclaircir les causes des décès, sans toutefois prononcer de condamnations.

Parmi les dizaines de témoignages prévus --marins, secouristes, experts, militaires--, il y aura le 12 octobre celui de l'ancien commandant du sous-marin nucléaire britannique HMS Turbulent, Andrew Coles, bâtiment soupçonné d'avoir joué un rôle dans le naufrage.

"Les familles des victimes (...) ne pourront construire un deuil que quand elles sauront comment sont morts leurs proches", a confié à l'AFP leur avocat Dominique Tricaud. "Les auteurs sont aussi des marins et je crois qu'un marin ne meurt pas avec un si mauvais secret", a-t-il ajouté.

"Nous ne voulons envoyer personne en prison, nous n'attendons pas d'argent de ce procès, nous voulons simplement que soit admis que l'armée britannique est responsable du naufrage du Bugaled Breizh", a-t-il insisté.

Le ministère britannique de la Défense et la Royal Navy ont démenti toute implication d'un sous-marin britannique.

En Grande-Bretagne, la procédure, lancée en raison des deux corps repêchés dans les eaux britannique, avait été suspendue pour donner la préséance à la justice française.

Lors d'une audience préliminaire en mars, le juge chargé de l'affaire, Nigel Lickley, avait assuré qu'il mènerait une "enquête complète, rigoureuse et juste".

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Le 4 octobre 2021

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