Brésil: Moraes, l'épouvantail de Bolsonaro à la tête de la justice électorale

(AFP)

Le 15 août 2022

Surnommé "Robocop" quand il était ministre de la Justice, Alexandre de Moraes, devenu héraut de la lutte contre la désinformation à la Cour suprême, va présider à partir de mardi du Tribunal Supérieur Electoral (TSE), au grand dam du président Jair Bolsonaro dont il est une des bêtes noires.

Il s'agit d'un poste clé en vue de la présidentielle d'octobre : le TSE est chargé de l'organiser du scrutin, mais aussi de sanctionner les candidats qui commettent des irrégularités.

La lutte contre la désinformation est une des priorités de ce tribunal, qui a déjà le président d'extrême droite dans le collimateur en raison de ses attaques constantes -- et sans preuve -- contre le système électoral.

Le 7 septembre 2021, lors du discours le plus enflammé de son mandat, Jair Bolsonaro avait pris pour cible le juge Moraes.

"Je ne respecterai plus la moindre décision d'Alexandre de Moraes. Ma patience a des limites", avait-il scandé, haranguant des milliers de manifestants massés à Sao Paulo.

Parmi les "décisions" du magistrat de la Cour suprême, l'ouverture d'une enquête contre le chef de l'Etat pour désinformation et l'arrestation de militants bolsonaristes qui menaçaient ouvertement les institutions démocratiques sur les réseaux sociaux.

Lors de ce même discours, Jair Bolsonaro avait déclaré que "seul Dieu" lui ferait quitter le pouvoir et qu'il ne comptait pas "participer à la farce promue par le TSE", à savoir l'élection avec les urnes électroniques, un système pourtant en vigueur depuis 1996.

- "Ligne dure" pragmatique -

C'est dire l'ampleur de la tâche qui attend Alexandre de Moraes, 53 ans, en prenant la tête du tribunal électoral à un mois et demi du scrutin.

"Il va devoir diriger le TSE d'une main de fer pour éviter une rupture de notre système électoral", estime André César, analyste politique du cabinet de consultants Hold.

Chauve, le regard sévère, le juge Moraes, ancien procureur et professeur de Droit à la prestigieuse université de Sao Paulo (USP) a été nommé à la Cour suprême en 2017 par l'ex-président Michel Temer (2016-2018), dont il était ministre de la Justice.

Surnommé Robocop par les autres membres du gouvernement, il avait déjà la réputation d'être un adepte de la "ligne dure" avant d'arriver à Brasilia.

En tant que secrétaire à la Sécurité de l'Etat de Sao Paulo, il a été critiqué par la gauche pour avoir réprimé durement des manifestations étudiantes.

À la Cour suprême, Alexandre de Moraes est chargé d'un dossier épineux : une vaste enquête sur des réseaux de diffusion de masse de fausses informations.

Il est vu comme un juge implacable, mais qui sait se montrer pragmatique et ouvert au dialogue avec des personnalités politiques de tous bords et des hauts gradés de l'Armée.

En mai, il a même donné l'accolade au président Bolsonaro lors d'une cérémonie officielle, une image qui a fait entrevoir la possibilité d'un trêve entre les deux ennemis jurés.

- "Persécution implacable" -

Quelques semaines plus tôt, la tension était encore à son comble entre le magistrat et le chef de l'Etat.

Ce dernier avait accordé sa grâce présidentielle à Daniel Silveira, un député bolsonariste condamné à de la prison ferme pour avoir déclaré dans une vidéo sur les réseaux sociaux que les juges de la Cour suprême méritaient d'être "tabassés dans la rue".

C'était Alexandre de Moraes qui avait ordonné son arrestation en février 2021, en raison de cette vidéo truffée d'insultes et d'attaques contre les institutions démocratiques.

Autre point d'orgue de ce bras de fer : août 2021, quand le juge Moraes avait ouvert une enquête contre le chef de l'Etat pour diffusion de fausses informations, après ses attaques contre les urnes électroniques.

Il y a deux semaines, le président Bolsonaro s'est dit victime d'une "persécution implacable" du magistrat, lors d'un entretien à la radio locale Guaiba.

Alexandre de Moraes a pour sa part apporté son soutien appuyé sur Twitter aux manifestations organisées jeudi en défense de la démocratie face aux bravades du chef de l'Etat.

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Le 15 août 2022

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