Notariat. Entre règlement des litiges et supervision de la profession (Amal Msanda)
Dans cet entretien, la première présidente du Conseil régional des notaires de Casablanca, Amal Msanda, évoque les rôles clés de l’institution, de la supervision de la profession à l’accompagnement et la médiation en cas de litige.

Notariat. Entre règlement des litiges et supervision de la profession (Amal Msanda)
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Sara Ibriz
Le 21 janvier 2025 à 16h29
Modifié 21 janvier 2025 à 17h27Dans cet entretien, la première présidente du Conseil régional des notaires de Casablanca, Amal Msanda, évoque les rôles clés de l’institution, de la supervision de la profession à l’accompagnement et la médiation en cas de litige.
Le Conseil régional des notaires joue un rôle central dans la gestion et la résolution des conflits au sein de la profession. Il intervient en favorisant le règlement amiable des différends, en protégeant les notaires contre les accusations infondées et en émettant des avis éclairés sur les plaintes portées devant le parquet.
En parallèle, il veille à l’accompagnement des notaires à travers des programmes de formation continue, contribuant ainsi à renforcer leurs compétences et à assurer un exercice professionnel conforme aux normes en vigueur.
C’est ainsi qu’Amal Msanda, présidente du Conseil régional des notaires de Casablanca, présente cette instance professionnelle régionale qui est, pour la première fois, dirigée par une femme. Un défi de plus pour cette institution qui participe à la gestion collégiale du Conseil national de l’ordre des notaires du Maroc (CNONM) depuis octobre 2024.
Depuis la nomination de l’ancien président du CNONM, Hicham Sabiry, en tant que secrétaire d’État en charge du Travail, le CNONM est dirigé, de manière collégiale, par les présidents des conseils régionaux. L’occasion de s’intéresser à leur fonctionnement, leurs rôles et aux défis auxquels ils font face.
Médias24 : Vous êtes la première femme à présider le Conseil régional des notaires de Casablanca. Qu’est-ce que cette élection représente pour vous, personnellement, et pour la profession ?
Amal Msanda : Être élue première femme présidente du Conseil régional des notaires de Casablanca, qui est le plus grand Conseil régional du Maroc avec plus de 572 notaires, est un honneur immense et une grande responsabilité. C’est une étape importante non seulement pour moi, mais aussi pour toutes les femmes dans la profession notariale. Cela me remplit d’une grande fierté et d’humilité face à la confiance que mes consœurs et confrères m’ont témoignée.
Cette élection est une pierre supplémentaire posée dans l’édifice d’un Maroc moderne et inclusif, fidèle à la vision éclairée de Sa Majesté le Roi Mohammed VI, que Dieu le glorifie, qui a toujours encouragé la parité et l’égalité des chances, tout en œuvrant pour la valorisation des compétences féminines dans le cadre d’une société marocaine qui évolue harmonieusement entre tradition et modernité.
Je veux que mon élection inspire une nouvelle génération de jeunes femmes à rêver grand et à croire en leur potentiel, peu importent les obstacles.
L’absence de modèles féminins peut rendre plus difficile la projection vers de hautes responsabilités
- Quels sont les défis spécifiques auxquels vous avez dû faire face en tant que femme dans un domaine historiquement dominé par les hommes ?
- Introduire une perspective féminine a toujours été perçu comme un bouleversement, et l’absence de modèles féminins peut rendre plus difficile la projection vers de hautes responsabilités. J’ai donc dû tracer mon propre chemin. C’est pour cela que j’ai choisi de voir ces défis comme des opportunités d’apprentissage et de transformation. Ils m’ont permis de développer une résilience et une détermination qui sont devenues des forces, et de prouver que le mérite et la compétence priment toujours sur les préjugés. En somme, la diversité n’est pas une menace, mais une richesse.
Comme beaucoup de femmes, j’ai dû jongler entre mes responsabilités professionnelles et personnelles. L’équilibre n’est pas toujours facile, surtout lorsqu’on aspire à des rôles exigeants, mais cela demande une grande organisation et le soutien de son entourage.
En résumé, cette expérience m’a montré que, lorsqu’il y a un objectif commun et une volonté de bien faire, les différences s’effacent et la collaboration prend le dessus. Les membres du Conseil régional des notaires de Casablanca avec qui je travaille sont tous des hommes. Ils se distinguent par leur engagement et leur professionnalisme, ce qui crée une dynamique exceptionnelle où règne une véritable unité et une complémentarité entre nous.
- Quelles sont vos priorités pour ce mandat en tant que présidente ?
- Ma priorité absolue est d’assurer la sécurité des notaires et de valoriser la profession. Ce sont les clés pour construire un futur prospère, où le notaire pourra continuer à jouer un rôle central dans la société, avec la reconnaissance et le respect qu’il mérite.
Mon autre priorité est d’être à l’écoute et proche des notaires car, jusqu’à présent, ce lien de proximité était souvent négligé. Dans un domaine aussi exigeant que le nôtre, les notaires ont besoin de se sentir soutenus, compris et accompagnés, surtout face aux défis complexes qu’ils rencontrent quotidiennement.
Par le passé, beaucoup de mes consœurs et confrères ont exprimé un sentiment d’éloignement avec les instances dirigeantes. Cette distance a parfois généré un manque de communication, d’empathie et de réactivité face aux besoins concrets. Mon objectif est de changer cette dynamique. J’aspire à ce que chaque notaire se sente pleinement intégré et représenté.
Personnellement, je reste convaincue que le rôle primordial d’un président est d’être un conseiller de confiance, un médiateur dans les moments clés de la vie et un garant de la stabilité juridique. Ce rôle, nous devons le préserver et l’enrichir pour le rayonnement de la profession notariale et pour l’assurance de la confiance du public en nos services.
- Le citoyen connaît peu le fonctionnement du Conseil régional des notaires. Pouvez-vous expliquer brièvement son rôle et ses missions principales ?
- Le Conseil régional des notaires de Casablanca est bien plus qu’un organe de supervision. C’est une institution au service de la profession et de la société, œuvrant à garantir l’excellence et la confiance dans le notariat. Le Conseil s’engage à renforcer ces missions pour un notariat encore plus performant et proche des attentes de tous. Il est la voix des notaires auprès des institutions publiques, juridiques et administratives. Il veille à défendre les intérêts de la profession et à renforcer son rôle dans la société, tout en collaborant avec les autorités pour adapter les cadres législatifs et réglementaires.
En plus de veiller à défendre les intérêts de la profession, son rôle s’articule autour de plusieurs missions fondamentales notamment la formation continue, le règlement à l’amiable des différends, la défense du notaire contre les plaintes calomnieuses et la présentation d’avis au sujet des plaintes adressées au parquet.
Tous les dossiers ayant atteint le stade du traitement du fonds par le conseil d’administration, présidé par le ministre de la Justice, ont été liquidés
- Comment le Conseil intervient-il dans les litiges impliquant des notaires, notamment en matière de protection des droits des citoyens ?
- Le Conseil régional des notaires de Casablanca joue un rôle clé dans la régulation et le suivi des activités des notaires. Lorsqu'un litige survient, ce rôle varie en fonction du type de plainte.
Il existe deux sortes de plaintes. La première concerne celles déposées au niveau du Conseil régional des notaires de Casablanca, qui agit comme une instance de médiation pour trouver une solution amiable entre les parties, et qui peut également jouer le rôle d’arbitre, en examinant les faits, en interprétant les normes professionnelles, mais aussi pour résoudre les différends sans passer par une procédure judiciaire. Cela permet d'économiser du temps et des frais pour les parties concernées.
La deuxième concerne les plaintes qui sont déposées directement devant le parquet. Le Conseil est alors sollicité pour donner son avis dans le but d’expliquer et de clarifier les pratiques notariales spécifiques, les procédures suivies et leur conformité avec la réglementation en vigueur.
Le Conseil peut ainsi aider le parquet à déterminer si le notaire a agi en respectant les règles déontologiques ou s’il y a eu faute professionnelle. Dans les deux cas, nous veillons à protéger les droits des citoyens.
Les victimes d’abus de confiance ou d’escroquerie d’un notaire malintentionné ou insolvable peuvent, quant à elles, compter sur le fonds de garantie des notaires instauré par la loi 32-09 pour être indemnisées en cas de décision judiciaire en leur faveur.
Tous les dossiers ayant atteint le stade du traitement du fonds par le conseil d’administration, présidé par le ministre de la Justice, ont été liquidés. L’indemnisation correspond à la somme objet de l’infraction, majorée d’intérêts annuels (6%), lesquels sont calculés à partir de la date de l’infraction.
- Pensez-vous que les citoyens ont suffisamment confiance dans les notaires et le système qui les encadre ? Sinon, comment rétablir cette confiance ?
- La confiance des citoyens envers les notaires a toujours été une base essentielle de notre profession, mais il serait naïf de dire qu’elle est aujourd’hui acquise de manière unanime. Plusieurs facteurs, comme une méconnaissance de notre rôle ou des cas isolés de pratiques inappropriées, ont pu éroder cette confiance chez certains.
Les citoyens ont parfois l’impression que le métier de notaire est complexe ou opaque. Il est important d’expliquer clairement nos processus et nos tarifs, et de simplifier l’accès à l’information.
Le Conseil régional des notaires de Casablanca considère la confiance du citoyen comme une priorité absolue, et son rôle est de renforcer la transparence et la communication sur les pratiques notariales en préservant l’intégrité de la profession, en sanctionnant les manquements et en valorisant les bonnes pratiques.
Cependant, il ne faut pas oublier les cas de certains citoyens malintentionnés ou mal informés et qui portent atteinte à la réputation et à l’intégrité des notaires. Ces situations sont regrettables, mais elles existent et sont abordées par le Conseil régional des notaires de Casablanca avec rigueur, fermeté et professionnalisme, car elles ne sont pas tolérées et nuisent à l’image de la profession.
- Quels conseils donneriez-vous aux citoyens pour mieux comprendre leurs droits lorsqu’ils font appel à un notaire ?
- Faire appel à un notaire est une démarche importante, souvent liée à des moments clés de la vie (achat immobilier, succession, création d’entreprise, etc.). Avant de signer un acte, il faut prendre le temps de poser toutes les questions nécessaires pour bien comprendre son contenu. Si une clause semble obscure ou suscite des doutes, il faut demander des clarifications puisque la signature engage la responsabilité du citoyen. Le notaire est là pour expliquer, en langage clair, chaque clause et ses implications juridiques.
En outre, les citoyens ont le droit de demander une transparence sur les frais et honoraires. Avant de conclure, le notaire doit fournir un devis détaillé qui explique les coûts associés à la prestation, notamment les taxes, les émoluments et les débours. Si les citoyens ont des doutes sur une opération, ils peuvent toujours s’adresser au Conseil régional des notaires. Nous avons un rôle de médiation et de régulation pour protéger leurs intérêts.
En conclusion, il est important de rappeler que le notaire est un allié dans la sécurisation des projets juridiques. En restant informé et en dialoguant avec votre notaire, vous vous assurez de protéger vos droits et de conclure vos opérations en toute sérénité.
- Avez-vous un dernier message à transmettre ?
- Mon dernier message serait un message d’engagement et d’espoir. Je m’engage à être une voix forte pour les notaires, à travailler pour moderniser notre profession et à la rendre plus accessible et transparente pour les citoyens.
Aux citoyens, je tiens à dire que les notaires sont là pour vous, pour garantir votre sécurité juridique et vous accompagner dans des étapes cruciales de votre vie. N’hésitez pas à nous solliciter, à poser vos questions et à faire valoir vos droits. La transparence et l’écoute sont au cœur de notre engagement.
À mes consœurs et confrères, je souhaite rappeler que cette présidence est la vôtre autant que la mienne. Mon mandat est guidé par une écoute active de vos besoins et par un travail collectif pour relever les défis que nous partageons.
Enfin, je tiens à souligner que cette élection, avec un score historique, montre que le changement est possible et que les portes de l’avenir s’ouvrent lorsqu’on agit avec détermination et conviction. Je suis honorée de porter cette responsabilité, et je suis convaincue que nous pouvons bâtir un notariat encore plus fort, à la hauteur des attentes de notre époque et pour les citoyens que nous servons.
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