Crise des marchés financiers : les banques marocaines sont-elles à l’abri ?

La réponse est "oui", selon plusieurs experts du secteur financier. Car les banques marocaines n’ont aucun lien avec celles de la tech californiennes qui ont fait faillite, ni avec le Crédit Suisse, dont les difficultés sont indépendantes de la crise américaine. Les seules retombées pour le Maroc seraient d’ordre économique, en cas de contagion du système financier mondial. Explications.

Crise des marchés financiers : les banques marocaines sont-elles à l’abri ?

Le 20 mars 2023 à 15h43

Modifié 20 mars 2023 à 17h47

La réponse est "oui", selon plusieurs experts du secteur financier. Car les banques marocaines n’ont aucun lien avec celles de la tech californiennes qui ont fait faillite, ni avec le Crédit Suisse, dont les difficultés sont indépendantes de la crise américaine. Les seules retombées pour le Maroc seraient d’ordre économique, en cas de contagion du système financier mondial. Explications.

La panique des marchés financiers qui a suivi la faillite de la SVB et de quelques autres banques régionales américaines, ainsi que la déroute du Crédit Suisse, suscitent des inquiétudes quant au déclenchement d’une nouvelle crise financière mondiale, qui pèserait lourd sur le système financier marocain et son économie. Car celle des subprimes est encore dans toutes les mémoires.

Assistera-t-on à un remake de la crise financière majeure de 2008 ? Selon plusieurs experts du secteur financier marocain, la réponse est "non".

"On n'est pas dans la même situation, c'est beaucoup plus circonscrit, avec un certain type de banques travaillant avec le secteur technologique américain et une clientèle assez particulière. Cette crise, si on peut l’appeler ainsi, n’a rien à voir avec celle de 2008, ni dans ses causes ni dans ses éventuelles conséquences", explique une de nos sources.

Les banques marocaines, plus solides que jamais

Selon nos experts, à part la panique créée sur les marchés mondiaux, il n’y a en effet aucune similitude entre la crise des subprimes et celle d’aujourd’hui. La première était systémique, profonde, et touchait le fonctionnement même du secteur bancaire global. Avec des investissements massifs de toutes les grandes banques mondiales dans des actifs toxiques, sans le moindre contrôle, la faillite de Lehman Brothers a créé une sorte d’effet domino, et surtout une méfiance des banques les unes vis-à-vis des autres. Ce qui a paralysé le marché interbancaire, puisqu’aucune banque ne voulait prêter à ses consœurs.

Ce qui n’a rien avoir avec la situation actuelle. Ainsi, la SVB, considérée comme une petite banque, a périclité non pas à cause d’un dysfonctionnement interne, d'un manque de contrôle ou de la présence d’actifs toxiques dans ses bilans, mais à la suite des répercussions de la hausse des taux de la FED sur la valeur de ses avoirs investis dans des produits de taux.

"En dehors de la ressemblance ou pas des deux crises, il faut se rappeler que même pendant la crise des subprimes, les banques marocaines étaient à l’abri et n’ont pas été touchées par la vague de défaillance… Notre système financier a la qualité de ses défauts : il n’est pas connecté au système financier mondial, ce qui se révèle être une bonne chose dans les moments de tension, de crise et de panique", souligne un des experts consultés par Médias24.

Autre point rassurant selon nos experts : la solidité actuelle des banques mondiales, depuis le renforcement des règles de Bâle et des exigences en fonds propres et de liquidités. Des exigences qui sont appliquées de la même manière au Maroc, avec une rigueur encore plus grande.

"Les banques marocaines n’ont jamais été aussi bien dotées en fonds propres qu’aujourd’hui. Alors que la Banque centrale exige un ratio de solvabilité de 12%, toutes nos banques dépassent d’au moins 1,5 point ce ratio", indique un banquier.

C’est le cas également des banques européennes, avec lesquelles certaines banques marocaines sont liées, soit par le capital, soit par des transactions commerciales et financières qui restent assez limitées.

En Europe, l’inflation inquiète beaucoup plus que la crise bancaire

"Aux Etats-Unis comme en Europe, le système bancaire est devenu très solide depuis 2010, date d’entrée en vigueur des règles de Bâle III et du renforcement de la régulation. Et puis, la grande erreur commise en 2008, c’était d’avoir laissé Lehman Brothers tomber. Les Américains ont retenu la leçon, comme on l’a vu avec l’intervention rapide de la FED et la sortie de Joe Biden qui a tenu à rassurer les déposants américains", ajoute notre source.

Cet optimisme est de mise également en Europe, qui reste sereine jusque-là, malgré la déconfiture du Crédit Suisse - sans lien avec la faillite de la SVB américaine - qui paie le prix de plusieurs années de mauvaise gouvernance. Preuve par la décision prise jeudi dernier par la BCE qui, malgré le spectre d’une nouvelle crise mondiale, a pris la décision d’augmenter son taux directeur d’un demi-point afin de poursuivre sa lutte contre l’inflation.

"Le secteur bancaire est actuellement dans une position beaucoup plus solide qu’en 2008", a justifié Christine Lagarde face à la presse. Une décision interprétée par les milieux financiers européens comme un signal rassurant, qui montre que la BCE craint beaucoup plus l’inflation que les répercussions de la crise américaine ou les difficultés du Crédit Suisse. Considéré comme un des poids lourds du système financier mondial, le Crédit Suisse a été rapidement mis à l’abri ce week-end, avec son rachat express par UBS. Un nouveau signal qui rassure et qui montre que les décideurs font tout pour éviter de reproduire de l’effet boule de neige de la faillite de Lehman Brothers.

L’impact économique sur le Maroc n’est pas à exclure

Si les banques européennes se disent à l’abri, malgré leur forte connexion au système financier américain, les banques marocaines se sentent, elles, à peine concernées par les événements actuels. Et le Conseil de Bank Al-Maghrib, qui se tiendra mardi 21 mars, viendra le confirmer, selon une de nos sources.

Si les premiers retentissements se font déjà sentir, ils sont pour l’instant positifs. Car qui dit crise bancaire dit risque de ralentissement économique. Et donc baisse de la demande sur les produits énergétiques.

En quelques jours, le prix du baril est descendu sous la barre des 80 dollars, traitant à l’heure où ces lignes sont écrites à 74 dollars, contre 86 dollars il y a à peine dix jours. Et cette tendance baissière risque de se poursuivre, pour le plus grand bonheur de l’Etat, des entreprises et du consommateur marocains.

Mais le revers de la médaille risque d'être lourd de conséquences. Car, comme en 2008, ce qui secoué le pays n’était pas tant la contagion financière (nos banques sont restées à l'écart du tsunami mondial) qu'économique, avec une baisse de la demande étrangère adressée au Maroc. Un scénario qui pourrait se répéter si la crise financière venait à prendre de l'ampleur...

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