8 mars et droits des femmes : l’heure est à l'action, pas aux célébrations !
Alors qu'elle est censée rappeler les revendications et promouvoir les droits des femmes, la journée du 8 mars est devenue l'occasion de célébrations. Mais que fêtons-nous au juste ? N’est-il pas temps de troquer les cadeaux contre une réelle mobilisation et des actions concrètes pour l’égalité des genres ?

8 mars et droits des femmes : l’heure est à l'action, pas aux célébrations !
Alors qu'elle est censée rappeler les revendications et promouvoir les droits des femmes, la journée du 8 mars est devenue l'occasion de célébrations. Mais que fêtons-nous au juste ? N’est-il pas temps de troquer les cadeaux contre une réelle mobilisation et des actions concrètes pour l’égalité des genres ?
Alors que les abus et les discriminations à l’égard des femmes se poursuivent, souvent rappelés par des faits divers graves (féminicides, viols, décès à la suite d'un avortement clandestin, etc.), le 8 mars se transforme de plus en plus en une journée de célébration où l'on souhaite aux femmes une bonne fête.
Une fête qui se manifeste souvent par la distribution de cadeaux, de roses ou par des offres promotionnelles dédiées qu’une partie des femmes apprécient certainement. Mais ces attentions répondent-elles aux véritables enjeux ? Suppriment-elles les inégalités ? Compensent-elles les discriminations subies ?
Le 8 mars n'est pas une fête. Ni une Saint-Valentin bis. La Journée internationale des droits des femmes est une journée dédiée à l'égalité, l'autonomisation, l'émancipation des femmes et l'équité à leur égard. Que l'on en fasse une journée d'hommage à la femme, où l'on reconnaît sa contribution, n'est pas condamnable. Mais ce n'est pas suffisant.
La journée du 8 mars, comme tous les jours d'ailleurs, doit être consacrée aux droits des femmes. L’occasion de dresser le bilan des avancées en matière de droits, d'égalité... et peut-être aussi de célébrer ces avancées quand il y en a !
Quelles avancées célébrons-nous aujourd’hui ? S’agit-il de la culture du viol qui continue de se propager ? Des vingt ans d’application d’une Moudawana en partie discriminatoire ? Du célibat forcé des mères divorcées pour le maintien de la garde de leurs enfants ? Ou bien de l’écart salarial de 30% au détriment des femmes ?
Quelques données chiffrées
La mobilisation s'organise pour la réforme de la Moudawana
Heureusement, le tableau n'est pas totalement noir. Certains organismes ont saisi l'occasion de cette date symbolique pour rappeler la nécessité des réformes à effectuer afin de garantir des droits égaux entre les femmes et les hommes.
Le Conseil national des droits de l’Homme (CNDH) a annoncé, le mardi 7 mars, la création d’un "groupe de travail sur la réforme de la Moudawana", qui engagera une réflexion pluraliste en vue d’élaborer un mémorandum permettant d’élaborer une vision globale de la réforme à venir.
Une initiative qui converge avec le travail initié par sept associations de défense des droits des femmes en décembre dernier, visant à réaliser un travail coordonné pour établir une feuille de route et proposer des recommandations relatives au Code de la famille.
"Plaider pour un Code de la famille plus juste pour toutes les composantes de la famille"
Au sein de la sphère politique, l’Union constitutionnelle a annoncé, le 4 mars, la création d’une commission pour élaborer une note globale de propositions sur la réforme de la Moudawana.
L’Organisation des femmes ittihadies, quant à elle, a réaffirmé sa position visant à "plaider pour un Code de la famille plus juste pour toutes les composantes de la famille".
Ces propositions et appels à la réforme interviennent après le discours du Trône du Roi Mohammed VI en juillet dernier, venu ouvrir la voie à une révision de la Moudawana en vigueur depuis deux décennies. Considérée comme une avancée à l’époque, elle est désormais désuète et en déphasage avec les besoins de la femme marocaine d’aujourd’hui.
Le texte comporte de nombreuses dispositions discriminatoires, notamment à l’égard des femmes célibataires, privées du droit de garde de leurs enfants en cas de remariage.
Elles sont également privées du droit de tutelle sur leurs enfants ; celui-ci étant octroyé automatiquement, et en priorité, au père. Elles ne disposent pas non plus des mêmes droits en matière d’héritage, puisque le Livre VI du Code de la famille, consacré au système successoral, ne reflète pas les principes d’équité énoncés dans les autres dispositions du même texte.
Dans son article 4, la Moudawana indique que la famille est constituée sous la coresponsabilité du mari et de la femme. Pourtant, ni les dispositions concernant le droit de tutelle ni le principe de la qiwamah, sur lequel repose tout le texte, ne s’alignent avec le contenu de cet article.
Les femmes sont également privées du droit de disposer librement de leur corps en matière d’avortement et font l’objet de stigmatisations sociales tout en subissant une exclusion économique, comme l’a démontré la période du Covid-19, durant laquelle le taux de chômage des femmes a fortement augmenté. Elles ont été les premières à être écartées par leurs employeurs qui, comble de l’ironie, célèbrent aujourd’hui la Journée internationale des droits des femmes.
Il serait plus judicieux de repousser les célébrations au jour où l’égalité ne sera plus un objectif, mais une réalité quotidienne et concrète qui bénéficie autant aux femmes qu’aux hommes ; où il ne sera plus nécessaire de consacrer une journée à rappeler les revendications des femmes, leurs souffrances et leur combat.
En attendant, saisissons cette occasion pour nous mobiliser pour l’égalité des genres. Une mobilisation qui ne doit pas s’arrêter au terme de cette journée du 8 mars, mais se poursuivre chaque jour de l’année.
LIRE AUSSI notre dossier sur la Moudawana (ici)