IB Maroc : une situation financière difficile, une communication absente

| Le 8/1/2023 à 15:59
Le 30 décembre 2022, la société cotée en bourse IB Maroc a demandé sa mise en redressement judiciaire. Une démarche qui sème le trouble dans un contexte où l'information financière récente (les résultats 2022) n'est pas disponible. Rappel des faits.

IB Maroc est cotée en bourse depuis le 10 juillet 2001. Elle a été la première société du secteur ‘Télécommunications et nouvelles technologies’ à être introduite en bourse.

Elle opère dans l’intégration informatique, principalement la mise en place de serveurs, stockage et cloud chez ses clients. En soi, la valeur est une très petite capitalisation à la Bourse de Casablanca et n’est que peu liquide. Sa capitalisation boursière s’élève à 13,4 MDH. En 2022, d’après le résumé annuel de la Bourse de Casablanca, la valeur n’a traité que durant 99 séances sur un total annuel de 254.

Désormais, la société est dans une situation financière critique. Le 30 décembre dernier, IB Maroc a effectué une demande de mise en redressement judiciaire dont la première audience d’examen s’est tenue le 5 janvier 2023.

En entamant cette démarche, l'entreprise espère la protection du tribunal pour tenter de redresser la situation. Que sait-on de sa situation financière ?

Des difficultés qui durent depuis plusieurs années

Étant cotée en bourse, la société a obligation de publier ses comptes. Sur le site de l’Autorité marocaine du marché des capitaux (AMMC), on peut voir qu’au fil des années, la société a connu de nombreuses difficultés financières avec de multiples publications de profit warnings. En remontant le fil des publications, nous constatons que l'entreprise est en zone de turbulence depuis 2012, si ce n'est pas avant. Le premier document répertorié disponible sur le site de l’AMMC date de mai 2012 et provenait de l’ancien Conseil déontologique des valeurs mobilières (CDVM). Un avertissement suivi d’une sanction pécuniaire de 42.000 dirhams avait été décidé à l’encontre de la société car "IB Maroc n’a procédé à l’information du public sur la baisse inhabituelle et substantielle de son résultat pour l’exercice 2011, par rapport à l’historique des réalisations, qu’à l’occasion de la publication de ses états financiers au titre du second semestre 2011, le 29 mars 2012, alors que ladite baisse était bien avérée à la date du 15 février 2012, soit avec un retard de 42 jours".

L’entreprise a, par la suite, publié de nombreux profit warning sur ses résultats annuels ou semestriels, notamment en 2015, 2017, 2018, 2019.

Cette même année 2019, IB Maroc expliquait le 27 septembre, suite à son assemblée générale ordinaire "ne pas prononcer la dissolution anticipée de la société malgré des capitaux propres devenus inférieurs au quart au capital social et donc de poursuivre l'activité de la société". A cette date, IB Maroc affichait des indicateurs dans le rouge. Les résultats d'exploitation, courant et net, tous négatifs.

Dans sa communication, l'entreprise cotée expliquait qu'elle "continuait de connaître des difficultés liées à la perte de ses concours bancaires l'empêchant de financer des approvisionnements et par voie de conséquence de réaliser son chiffre d'affaires malgré les nombreuses opportunités de réalisation".  Face à cette situation, la solution envisagée à l'époque était de "trouver d'urgence un nouvel actionnaire" pour renforcer les capitaux propres et relancer la société.

Il semble que cette piste n'a pas été concrétisée au regard de la suite des évènements. Un chiffre d'affaires qui fondait comme neige au soleil d'une année à l'autre et un déficit permanent. En 2019, le groupe affichait un déficit de 26,3 MDH.

Un rapport du commissaire aux comptes défavorable

Par la suite, les choses ne se sont pas améliorées en temps de pandémie. L'entreprise a clôturé l'année 2020 avec un chiffre d'affaires de 11,3 MDH (contre 34,5 MDH en 2029)  et un déficit de 16 MDH.

En 2020, la société avait fait l'objet d'une vente aux enchères visant une partie de ses actifs au profit d'un créancier pour le remboursement d'une créance impayée.

L’année 2021, quant à elle, s’est clôturée sur une perte de 23 MDH. Lors de la publication des résultats annuels, les documents étaient accompagnés d’un rapport général du commissaire aux comptes. Ce dernier diagnostiquait une incertitude significative quant à la continuité de l’exploitation et émettait une opinion défavorable suite à l’analyse de différents documents financiers de la société, à savoir le compte de produits et charges, le bilan, l’état des soldes de gestion, etc.

"les états de synthèse ne donnent pas une image fidèle du résultat des opérations de l'exercice écoulé, ni de la situation financière, ni du patrimoine de la société IB Maroc au 31 décembre 2021".  Et d'ajouter, "la société connait des difficultés importantes pour régler ses créanciers, de financer des projets et d'honorer les commandes clients. (...) Cette situation entraine une incertitude significative sur la capacité de la société a poursuivre on activité".

Aucune information sur les réalisations de l’année 2022, mais une condamnation

Il est aussi à noter que le dernier document publié par IB Maroc et diffusé par l’AMMC date du 30 mai 2022 et informe d’un avis de convocation à une AGO au 30 juin.

Aucune publication n'est affichée concernant les réalisations financières de la société courant 2022, pourtant il s'agit d'une obligation légale. Aucune sanction, non plus, ne figure sur la liste des sanctions décidées par l'AMMC.

Une source proche du sujet, nous confie que "IB Maroc a effectivement zappé les publications et se sont fait rappeler à l'ordre pour ce motif. Le management a tenté de remédier à la situation mais en publiant dans un journal d'annonces légales peu connu. La date de la publication est le 22 décembre".

Pourtant, même sur le site de l'AMMC, cette publication n'y figure pas.

Contactée à ce sujet, l'AMMC nous explique qu'elle "suit de manière rigoureuse le respect des exigences de communication financière auxquelles sont assujetties les sociétés faisant appel public à l’épargne. Lorsqu’une situation susceptible de constituer un manquement auxdites exigences est relevée, l’AMMC demande systématiquement des explications et/ou une régularisation de ladite situation. Dans les cas où les manquements sont avérés, une procédure disciplinaire est engagée et qui peut mener à des sanctions pouvant varier selon la nature des manquements relevés".

"Lorsqu’une société faisant appel public à l’épargne connait des difficultés, celle-ci fait l’objet d’un suivi rapproché de la part de l’AMMC et ce compte tenu de la situation particulière qu’elle traverse. Dans ce cadre, plusieurs actions sont menées notamment afin de sensibiliser ladite société sur la nécessité de respecter ses obligations d’information malgré les difficultés qu’elle connait, poursuit-on auprès de l'AMMC.

A l’heure où nous écrivons ces lignes, il est donc impossible de savoir comment l’activité du groupe s’est comportée durant l’année 2022. En revanche, nous savons (information publique) qu'en décembre 2022, la société a été notifiée d’un jugement la condamnant à payer 6 MDH à la banque BMCI.

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