Comment l'État tente de freiner la baisse de la nappe phréatique de l'axe Meski-Boudnib

Des milliers d'hectares de nouvelles plantations de palmiers dattiers dans la région. Cet accord tente de réduire, à l’horizon 2030, la pression sur des ressources hydriques mises à mal par le développement de la filière phœnicicole irriguée dans une zone désertique.

Comment l'État tente de freiner la baisse de la nappe phréatique de l'axe Meski-Boudnib

Le 28 octobre 2022 à 15h11

Modifié 29 octobre 2022 à 7h51

Des milliers d'hectares de nouvelles plantations de palmiers dattiers dans la région. Cet accord tente de réduire, à l’horizon 2030, la pression sur des ressources hydriques mises à mal par le développement de la filière phœnicicole irriguée dans une zone désertique.

Signé ce vendredi 28 octobre par Nizar Baraka, ministre de l’Équipement et de l’eau, et Mohammed Sadiki, ministre de l’Agriculture, au siège de la commune urbaine d’Errachidia, le contrat de gestion participative de la nappe phréatique (CGPN) - axe Meski-Boudnib - mobilisera près de 2,3 milliards de dirhams (MMDH).

Cette enveloppe budgétaire permettra de financer jusqu’à 2030 le plan d’action d’un contrat conçu conformément aux dispositions de la loi 36-15 sur l’eau. Il repose sur quatre axes :

  • Développement de l’offre des ressources en eau (2,1 MMDH) ;
  • Gestion de la demande en eau (43 MDH) ;
  • Renforcement des outils de contrôle des ressources de la nappe phréatique (25 MDH) ;
  • Sensibilisation et formation (2,5 MDH).

L’enjeu principal de ce contrat, qui concerne deux communes (Mdaghra et Oued Naam), est de maîtriser une demande accrue sur des ressources de bonne qualité, mais estimées à seulement 110 millions de m³ par l’Agence du bassin hydraulique (ABH) Guir-Ziz-Rhéris.

En détail, les ressources de cette zone, “connue pour une sécheresse structurelle” selon Nizar Baraka, se composent des eaux souterraines (60 Mm³) de la nappe phréatique et des eaux de surface, dont une dotation à l’irrigation annuelle de 26 Mm³ en provenance du barrage Kadoussa, à laquelle il faut ajouter 24 Mm³ issus du bassin versant de ce barrage.

“La mise à l’eau du barrage a récemment été réalisée, mais il est toujours sous le contrôle de la Direction générale de l’hydraulique”, nous précise l’ABH. En d'autres termes, il n'est pas opérationnel.

Si la surface couverte par le CGPN est importante (4.670 km²), ses ressources sont en constante diminution. Entre le mois de décembre 2016 et celui de février 2021, la nappe phréatique de l’axe Meski-Boudnib a perdu trois mètres de niveau piézométrique, soit un peu plus d’un demi-mètre par an. Et des milliers d'hectares sont plantés de nouveaux palmiers dattiers qui vont à leur tour ponctionner les ressources.

Sécheresse et multiplication des points d’eau

Dans cette zone où les palmiers dattiers nécessitent entre 12.000 et 15.000 m³ par hectare annuellement, la pluviométrie a été encore plus défavorable que d’habitude. En 2021, le périmètre de l’ABH a subi sa troisième année de sécheresse.

Par rapport à une année normale (100 à 150 mm), ce déficit a atteint 32% pour le bassin de Ziz, 24% pour celui de Rhéris et 17% pour celui de Guir. En outre, les apports en eau de surface ont été déficitaires à hauteur de 77% par rapport à la moyenne annuelle. La multiplication des points d’extraction d’eau souterraine et une utilisation déraisonnée des ressources aggravent la situation.

Ces points d’eau sont destinés à irriguer les palmiers dattiers de l’axe Meski-Boudnib, dont les surfaces ne cessent d’augmenter. D’ici 2030, la surface irriguée devrait passer de 9.000 à 15.000 ha. “Dans la lignée du plan Maroc vert, la stratégie Génération Green a prévu la plantation de 5 millions de palmiers dattiers dans la région Drâa-Tafilalet”, a rappelé Mohammed Sadiki.

Renforcer les capacités de stockage

En se basant sur le scénario prévisionnel établi par l’ABH Guir-Ziz-Rhéris, le contrat de nappe permettra de maintenir le rythme de baisse du niveau piézométrique de la nappe phréatique, estimée entre 10 m et 40 m à l’horizon 2050, parallèlement à l’augmentation de la surface irriguée, et ce, malgré les nouvelles plantations.

À cet effet, le CGPN mobilisera également les eaux du barrage Kadoussa situé sur l’Oued Guir, inscrit dans le cadre du projet de développement de l’irrigation et d’adaptation de l’agriculture irriguée aux changements climatiques, à l’aval du barrage susmentionné.

D’une capacité de 200 millions de m³, le barrage Kadoussa est l’un des piliers du plan d’action mis en place dans le cadre du contrat de gestion participative de la nappe phréatique - axe Meski-Boudnib. L’édifice permettra de renforcer les capacités de stockage de la région et de protéger les périmètres oasiens en aval contre les inondations. En outre, il contribuera à sécuriser l’irrigation d’extensions hors oasis.

La construction d’une seconde retenue d’eau artificielle est également prévue, notamment celle de Kheng Grou pour le développement de l’irrigation et la recharge de la nappe phréatique. Relevant de la province de Figuig, l’édification de ce barrage nécessitera 836,5 MDH.

A noter que le ministre de l'Equipement et de l'Eau, présent sur les lieux et qui a coprésidé cet événement, n'était pas disponible pour répondre aux questions de la presse et n'a donc pas répondu aux nôtres.

Une exploitation inégale des ressources des barrages

Néanmoins, selon une étude sur la transformation des systèmes agricoles et leurs impacts sur les moyens de subsistance dans la zone de Boudnib, les barrages ne constituent pas une réponse parfaite, ni suffisante, aux défis de l’approvisionnement en eau, car ils “aggravent les inégalités existantes”.

“Les individus ayant plus de pouvoir politique, social et économique s’assurent l’accès à une eau limitée au détriment de ceux qui en ont moins”, précisent les auteurs de l’étude, sur la base des différents témoignages recueillis. Par exemple, Omar, habitant de la région, s’est plaint “des investisseurs étrangers [qui] profitent des ressources naturelles de Boudnib, exploitent une main-d’œuvre bon marché et donnent peu en retour”.

“Omar a imaginé que le développement à Boudnib comprendrait la fourniture d’un hôpital, de meilleures routes, d’un centre de formation professionnelle agricole, de plus d’écoles pour la population croissante, et plus particulièrement d’un internat pour filles pour poursuivre l’éducation des filles des villages environnants”, lit-on dans la même étude.

Développement de l’offre et installation de compteur

La feuille de route, établie dans le cadre du nouveau contrat de gestion participative de la nappe - axe Meski-Boudnib -, prévoit également les actions suivantes :

- le développement de l’offre des ressources hydriques ;

- le renforcement des aménagements hydrauliques ;

- la conservation de la nappe phréatique et son rechargement ;

- le renforcement des outils de communication et de formation au profit des agriculteurs pour une meilleure gestion des ressources;

- l’instauration du principe du comptage et de la déclaration périodique de prélèvements des eaux souterraines ;

- la protection des sources et des khettaras existantes ;

- la mise en place d’une police de l’eau pour un meilleur contrôle de l’exploitation des ressources ;

Par ailleurs, la liste des intervenants dans ce contrat de nappe comprend :

- le ministère de l’Intérieur ;

- le ministère de l’Agriculture, de la pêche maritime, du développement rural et des eaux et forêts ;

- le ministère de l’Équipement et de l’eau ;

- la wilaya de la région Drâa-Tafilalet ;

- le Conseil de la région ;

- le Conseil régional de l’investissement Drâa-Tafilalet ;

- la Chambre agricole régionale ;

- l’Agence du bassin hydraulique Guir-Ziz-Rhéris ;

- l’Office régional de mise en valeur agricole (Drâa-Tafilalet) ;

- l’Agence nationale pour le développement des zones oasiennes et de l’arganier (ANDZOA) ;

- l’Institut national de recherche agronomique (INRA) ;

- la direction régionale de l’ONEE (Drâa-Tafilalet) ;

- la direction régionale de l’Agriculture ;

- l’association des investisseurs.

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