Dossier Cet article est issu du dossier «Entretien avec Ahmed Rahhou président du conseil de la concurrence» Voir tout le sommaire

Concentrations clandestines : l’ultimatum d’Ahmed Rahhou

Le Conseil de la concurrence a ouvert la voie à la régularisation amiable des concentrations non notifiées. Les opérateurs concernés ont jusqu’au 31 décembre pour se manifester. Au-delà, le régulateur reprendra la main pour des conséquences potentiellement lourdes.

Concentrations clandestines : l’ultimatum d’Ahmed Rahhou

Le 14 juillet 2022 à 18h14

Modifié 14 juillet 2022 à 18h39

Le Conseil de la concurrence a ouvert la voie à la régularisation amiable des concentrations non notifiées. Les opérateurs concernés ont jusqu’au 31 décembre pour se manifester. Au-delà, le régulateur reprendra la main pour des conséquences potentiellement lourdes.

« La loi sur la concurrence, ce n’est pas de la plaisanterie. » La phrase d’Ahmed Rahhou sonne comme un avertissement aux opérateurs. Des mots simples pour alerter sur les risques, encore sous-estimés, liés au non-respect du cadre juridique actuel.

Les sanctions pour pratiques anticoncurrentielles ne sont qu’un volet de l’arsenal coercitif. Le régime des concentrations est également concerné. Une entité qui rachète une autre sans en informer le régulateur constitue un « Gun jumping ». Une infraction aux conséquences lourdes (amende atteignant 5% du chiffre d’affaires, entre autres sanctions). Le cas Sika a donné le la, avec une amende de 11 MDH contre ce géant suisse. Le régulateur planche sur d’autres dossiers similaires, dont l’issue sera annoncée dans les semaines à venir.

Sanctionner, oui. Corriger et rectifier, aussi. Lancée en juin, l’opération de régularisation des concentrations non notifiées obéit à la deuxième logique, sans perdre de vue la première. Ahmed Rahhou l’a expliqué dans un entretien accordé le mardi 12 juillet à Médias24.

Ne pas notifier une concentration : des sanctions pécuniaires et plus encore…

"Nous avons constaté qu’un certain nombre d’opérations de concentration ne sont pas déclarées au Conseil alors que la loi oblige [cette notification].

"On en a sorti quelques-unes, certaines sont en cours de traitement pour appliquer la loi. Quand ce n’est pas déclaré, c’est sanctionné. Il y des sanctions prévues par la loi, parfois très dures, parce que l’on peut revenir sur l’opération elle-même et la dénouer. Autrement dit, si vous avez acheté une société, vous devez la revendre. Pour le moment, on n’est pas allé jusque-là, mais il y a eu des sanctions pécuniaires.

La régularisation, une opération de rattrapage pour les opérateurs de bonne foi

"Dans une logique d’accompagnement du marché, on a fait une étude de marché et on a constaté que le Conseil de la concurrence, la loi sur la concurrence et les règles de déclarations semblent étrangers aux opérateurs. On a une économie qui tourne d’une certaine façon depuis l’indépendance, qui a déjà pas mal évolué, mais voilà qu’on vient dire qu’il y a de nouvelles règles.

"On peut comprendre que cela nécessite du temps. On a donc ouvert cette voie pour permettre aux opérateurs de déclarer leurs opérations et de les régulariser avec tout de même le paiement d’une amende, mais quasiment mise au minimum.

"Cela permettra de se rattraper, pour ceux de bonne foi qui n’ont pas pu déclarer, ou ne savaient pas, ou ont mal compris, etc.

"On a donné jusqu’à la fin de l’année. On a déjà des prémices d’opérations qui s’annoncent. Cela va s’accélérer vers la fin.

On sait et on saura qui n’a pas déclaré

"J’en profite pour envoyer un message au marché : il ne faut pas croire que nous avons lancé l’opération de régularisation parce qu’on ne sait pas [qui a effectué une concentration]. Il n’y rien de plus simple à trouver qu’une opération de concentration. On a mille canaux pour savoir.

"On va donner jusqu’à fin décembre pour que les gens régularisent spontanément. Pour toute opération qui n’aurait pas bénéficié de cela, que les gens ne s’attendent pas à beaucoup de sympathie de notre part si on le découvre après. Et on le découvrira fatalement puisqu’on fera un ratissage, le plus large possible, de toutes les concentrations qui ne seront pas passées par le Conseil.

"Pour le moment, on ne cherche pas. On laisse les gens venir. Mais à partir du 1er janvier, nous irons nous-mêmes à la recherche de l’information et on la retrouvera, car elle n’est pas confidentielle.

Saisir le Conseil de manière informelle pour vérifier le caractère "notifiable" ou non d’une concentration : déclarer ou assumer 

"La loi dans sa version ancienne, et dans sa version future, ne le prévoit pas. Quand vous effectuez une opération, vous devez assumer votre responsabilité en disant que ce n’est pas soumis au Conseil. Dans ce cas, si ce dernier a un avis contraire, vous payez.

"Nous avons demandé aux cabinets [d’avocats] de nous envoyer au moins le descriptif de l’opération, et nous répondrons. Cette réponse peut consister à dire que le Conseil n’est pas compétent pour traiter l’opération. Il vaut mieux avoir cette réponse du Conseil.

"Avant, les gens nous reprochaient des risques de délais allongés, lourds et coûteux.

"Pour ce dernier point, je voudrais rappeler que jusqu’à présent, ces procédures au Conseil ne sont pas payantes. Elles le seront [selon le projet de réforme], mais pas dans le cas où on nous envoie un dossier qui ne relève pas de la compétence du Conseil. Nous allons répondre mais il n’y aura pas de frais. Dans ce cas, comme nous n’avons ni émis une autorisation ni formulé un refus, il n’y a pas lieu de payer. Que les gens viennent nous consulter, si nous ne sommes pas compétents, cela ne leur coûtera rien.

"Quant au problème des délais, des gens avaient des appréhensions sur le temps nécessaire au Conseil pour répondre. Mais depuis pas mal de temps, nous avons donné très largement les gages sur la célérité de traitement des dossiers. Rappelons juste que nous ne sommes pas sur des opérations d’achat de tomates et de patates. En général, acheter une entreprise est un processus qui nécessite des mois (entre négociations, due diligence, etc.). Reprocher au Conseil d’y ajouter deux ou trois semaines, j’estime que c’est de la mauvaise foi.

"On a même ajouté une facilité : les opérateurs tenus par des délais de closing, qu’ils nous le disent. Nous essaierons de respecter ces délais dans la mesure du possible.

Rachat de Careem par Uber bloqué depuis 2019 au Maroc : une demande d’éclairage restée sans réponse

"On n’est pas cachotier sur ce dossier. C'est simplement qu'il n'y a pas eu de décision. Ce dossier est dans un statut incomplet. Quand c’est le cas, la loi permet d’arrêter l’instruction. Pourquoi ce dossier est incomplet ? Parce que nous avons formulé une demande à Uber et Careem sur leur statut juridique au Maroc, et sur le cadre dans lequel ils exercent leurs activités.

"Nous sommes dans une activité régulée, celle du transport de personnes. On ne peut pas se réveiller le matin, prendre une voiture, des passagers et se faire payer. Cela nécessite un agrément ou au moins une déclaration. Nous avons écrit aux deux sociétés pour demander sur la base de quel statut elles exercent au Maroc. Nous attendons toujours la réponse. Quand on l’aura, on continuera le dossier."

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